Reportage

Programmes sida ciblés en Asie et dans le Pacifique

21 mars 2007

C’est malheureusement une réalité, mais trop souvent les personnes les plus menacées et celles qui ont le plus besoin de programmes de prévention, de traitement et de soutien liés au VIH, sont aussi celles qui sont les moins susceptibles d’avoir accès à ces services. Selon les dernières estimations, seule une personne sur dix parmi les plus exposées au risque a accès à des services de prévention. Dans de nombreux cas, pour les consommateurs de drogues injectables, les professionnel(le)s du sexe et les hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes, le sida représente un double fardeau : d’une part, il n’y a qu’un nombre limité de programmes conçus spécifiquement pour eux, et d’autre part, ils sont souvent confrontés à la discrimination, à l’ostracisme et même dans certains cas aux poursuites pénales dans les sociétés dans lesquelles ils vivent.

Mais la recherche et l’expérience démontrent que cibler les programmes et services sida sur les personnes les plus exposées au risque conduit à des progrès encourageants dans la riposte au sida et peut aider à réduire la discrimination et la stigmatisation.

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Ce mois-ci, la collection des Meilleures Pratiques de l’ONUSIDA se penche sur la question des hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes (HSH) dans la région Asie et Pacifique, et sur les programmes ciblés mis en place dans six pays qui montrent des avancées. 

En Asie, les hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes sont affectés par le VIH de manière disproportionnée. On estime que la prévalence du VIH atteint 14% à Phnom Penh, Cambodge ; 16% en Andhra Pradesh, Inde ; et 28% à Bangkok, Thaïlande.

Les hommes qui ont des rapports sexuels non protégés avec des hommes peuvent également avoir des rapports sexuels non protégés avec des femmes et ainsi servir de pont épidémiologique pour le virus vers la population élargie. A titre d’exemple, une étude en Chine portant sur 800 hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes a révélé que 59% d’entre eux avaient déclaré avoir eu des relations sexuelles vaginales non protégées avec des femmes pendant l’année écoulée.

La publication souligne : « C’est une idée fausse très répandue que les rapports sexuels entre hommes n’ont lieu que parmi les hommes qui s’identifient eux-mêmes comme gays. La plupart des hommes vivant en dehors de l’Occident qui ont des rapports avec des hommes ne sont pas identifiables en tant que tels, ils vivent et travaillent dans leurs communautés sans être remarqués, et sont souvent des pères de familles avec enfants.

Les programmes de prévention de transmission du VIH s’adressant aux hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes sont donc par conséquent d’une importance vitale. Mais cette population est souvent gravement laissée pour compte en raison de la dénégation officielle des gouvernements, de la relative invisibilité des HSH, de la discrimination qui entoure les rapports sexuels entre hommes, de l’ignorance ou du manque d’information adéquate. »

Les programmes HSH mis en place au Bangladesh, en Inde, en Indonésie, aux Philippines, en Chine et en Nouvelle-Zélande ont été choisis pour la collection des Meilleures Pratiques de l’ONUSIDA en raison de leur succès à fournir des interventions globales impliquant tous les acteurs de la riposte au sida.

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Bien que diversement constitués, ces programmes ont des activités et des éléments communs qui ont prouvé qu’ils étaient en mesure d’atteindre et de soutenir les HSH confrontés à des problèmes de sida en Asie.

Les activités de plaidoyer auprès des gouvernements, des services de santé et des principales communautés sont communes à tous les programmes. Au Bangladesh, le plaidoyer fructueux de la Banhu Social Welfare Society, comprenant la constitution de réseaux et la participation à des réunions gouvernementales, a garanti l’intégration des questions relatives aux HSH dans le Plan stratégique national sur le sida pour les cinq prochaines années. En Indonésie, les programmes Aksi Stop AIDS et Family Health International ont travaillé dur pour engager les pouvoirs publics dans la riposte au sida. Le ministère indonésien de la santé reconnaît aujourd’hui la gravité de la situation et des communautés de HSH ont été invitées à participer à des consultations sur des problèmes relatifs au sida.

La publication des Meilleures Pratiques met en évidence les activités de sensibilisation intéressantes mises en place par certains de ces programmes. A Hong Kong, par exemple, l’organisation ‘AIDS concern’ a mis en place un programme ciblé sur les clients des saunas. Des publications faisant la promotion de rapports sexuels plus sûrs, tels que des prospectus, des bandes dessinées et des brochures informatives, ont été imprimées et distribuées dans 13 saunas et des travailleurs de proximité ont rencontré les propriétaires et le personnel afin d’entretenir des liens et d’évaluer la situation.De plus en plus, des préservatifs et des lubrifiants ont également été distribués. « Les bonnes relations entre les travailleurs de proximité et les propriétaires de sauna se poursuivent et les services de dépistage ont donné lieu à un nombre accru d’occasions de contact avec les clients. Il en résulte que les clients ont moins d’appréhension», déclare la publication. 

Les programmes mis en évidence dans cette publication soulignent que les activités mises en place par des personnes vivant avec le VIH ont prouvé qu’elles étaient plus efficaces et contribuaient à briser plus encore la stigmatisation et la discrimination liées au sida.

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Connaître son épidémie

Ainsi que le soulignent les Meilleures Pratiques, les efforts de prévention sont, dans de nombreux pays, entravés par des lois qui criminalisent les rapports sexuels entre hommes, rendant le travail de prévention difficile avec les HSH et les empêchant de contribuer à la riposte à l’épidémie. Là où des attitudes sociales, culturelles et religieuses rendent le problème politiquement sensible, les politiciens sont peu disposés à soutenir des politiques et des programmes qui pourraient susciter la critique publique de leaders et groupes communautaires.

Les programmes de prévention du VIH pour les hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes, tels qu’ils sont décrits dans les Meilleures Pratiques, sont d’une importance vitale pour arrêter la transmission du VIH. Mais le manque de recherche sur les HSH, y compris sur leurs comportements et attitudes, ainsi que la criminalisation, l’ostracisme et la discrimination appuyée par la loi à leur encontre, sont des obstacles considérables à la mise en place de programmes efficaces.
La recherche a fait partie intégrante du succès des activités de sensibilisation de Aids Concern dans les saunas de Hong Kong : parmi ces activités un projet de recherche a été mis en place afin de déterminer la prévalence des comportements à risque parmi les clients des saunas, les niveaux d’accès à des préservatifs et lubrifiants gratuits et le type de documentation le mieux adapté aux clients de ces saunas.

En donnant en exemple ces six programmes, la publication souligne que l’élaboration de programmes à l’intention des HSH doit être soigneusement adaptée aux cultures et conditions locales. Plutôt que de dépendre d’approches basées sur les schémas de comportement sexuel entre hommes observés en Europe occidentale et en Amérique du Nord, les minorités sexuelles locales devraient être identifiées et impliquées dans l’élaboration des programmes. En Nouvelle-Zélande, la New Zealand AIDS Foundation encourage le recours aux ressources culturelles d’une communauté pour rendre sa documentation sur le sida utile et attractive. Les dessins, images, couleurs, langues et modèles utilisés sont immédiatement reconnaissables comme appartenant aux communautés Maori ou à celles des Iles du Pacifique.

Comme le soulignent les Meilleures Pratiques, l’ONUSIDA soutient un éventail de ripostes visant à réduire la vulnérabilité au VIH des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes ainsi que l’impact du virus. Cet éventail comprend : la promotion de préservatifs de haute qualité et de lubrifiants à base aqueuse ; la garantie de leur pérennité ; les campagnes pour une sexualité à moindre risque et le développement des compétences ; l’éducation par les pairs parmi les hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes et leurs partenaires féminines ; et le renforcement des organisations d’hommes qui s’identifient comme homosexuels, leur permettant de promouvoir et développer rapidement des programmes de prévention et de soutien dans le domaine du VIH à l’intention des HSH.

« Vingt cinq ans après le début de cette épidémie, la réalité est que seul un sur dix hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes a accès à des services de prévention du VIH. C’est un énorme échec et y remédier doit être une priorité pour une solide riposte mondiale au sida, si nous voulons parvenir à l’accès universel à la prévention, au traitement, aux soins et au soutien dans le domaine du VIH, y compris les HSH et les personnes transsexuelles », dit Purnima Mane, Directeur du département Politiques, Evidence et Partenariats de l’ONUSIDA.



Liens:

Télécharger le document des Meilleures Pratiques : Le VIH et les hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes en Asie et dans le Pacifique (pdf, 1,11 Mb) (en anglais)

Pour en savoir davantage sur la question des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH)

Télécharger le document de politique générale sur les HSH (frenesrupt(pdf, 232 Kb | 226 Kb | 237 Kb | 429 Kb | 130 Kb)


Autres rapports concernant les Meilleures Pratiques de l’ONUSIDA:

Tirer les leçons de l’expérience

Une riposte au VIH basée sur la foie en Afrique australe (en anglais)

Des guérisseurs traditionnels se joignent à la lutte contre le sida