Reportage

Utiliser des données probantes pour obtenir des résultats : comment élargir réellement l'accès au traitement contre le VIH ?

10 juin 2011

Agnès Binagwaho, ministre rwandaise de la Santé, lors de la table ronde ministérielle intitulée « Élargir les programmes pour élargir l'accès », siège des Nations unies, New York, 9 juin 2011.
Photo : ONUSIDA/B. Hamilton

La Réunion sur le sida de l'Assemblée générale des Nations unies qui a eu lieu cette semaine a connu un niveau de participation sans précédent, avec plus de trente chefs d'État et de gouvernement et vice-présidents et une centaine de ministres. Un événement parallèle spécial a été organisé à l'intention des ministres pour qu'ils puissent se rencontrer et échanger leurs expériences concernant la situation nouvelle et les perspectives en matière de traitement contre le VIH, y compris le traitement préventif. Des ministres issus d'un large spectre de secteurs, entre autres la santé, la justice, le développement social et le travail, se sont réunis avec des membres de la société civile pour partager des expériences nationales très diverses.

Parmi les participants à la réunion figuraient Aaron Motsoaledi, ministre de la Santé d'Afrique du Sud, José Ángel Córdova Villalobos, secrétaire d'État à la Santé du Mexique, Marijke Wijnroks, ambassadrice des Pays-Bas pour le sida, Ruben Pecchio, directeur du réseau REDLA+ (réseau latino-américain de personnes vivant avec le VIH), et Michel Sidibé, directeur exécutif de l'ONUSIDA.

Un traitement pour la prévention

Les participants ont attiré l'attention sur les récents résultats de l'étude HPTN 052, présentés par les Instituts nationaux de santé des États-Unis, qui ont démontré que si une personne séropositive au VIH se pliait à un traitement antirétroviral efficace, le risque de transmettre le virus à son partenaire sexuel non infecté pouvait être réduit de 96 %.

Nous devons considérer les investissements que nous réalisons aujourd'hui comme des acomptes qui permettront de réduire les coûts demain.

Michel Sidibé, directeur exécutif de l'ONUSIDA

La participation des personnes vivant avec le VIH est essentielle

Au cours de la discussion, animée par Riz Khan, présentateur de la chaîne de télévision Al Jazeera, les participants ont insisté sur la nécessité d'impliquer les personnes vivant avec le VIH dans les programmes de traitement et de prévention. « Le dépistage doit être accessible à tous : les personnes vivant avec le VIH doivent connaître leur état sérologique aussitôt que possible pour leur permettre de s'engager efficacement dans une démarche de prévention. La « prévention positive » doit être au cœur des efforts de prévention et le traitement préventif joue un rôle vital », a expliqué M. Pecchio. 

Combattre la stigmatisation dans le contexte du traitement

Selon le secrétaire d'État à la Santé du Mexique, José Ángel Córdova Villalobos, le Mexique a créé un support financier destiné à garantir un accès durable au traitement sur le long terme. « Mais nous devons également travailler pour renforcer l'éducation afin de combattre la stigmatisation, la discrimination et l'homophobie et d'accroître la volonté des individus de se faire dépister », a indiqué M. Córdova Villalobos. 

Avec le plus grand nombre de personnes vivant avec le VIH au monde, soit 5,6 millions, l'Afrique du Sud possède également le programme de traitement antirétroviral le plus étendu au monde. Le pays a également lancé récemment une campagne nationale de dépistage du VIH au cours de laquelle 12 millions de Sud-Africains se sont fait dépister entre avril 2010 et juin 2011.

Nous devons également travailler pour renforcer l'éducation afin de combattre la stigmatisation, la discrimination et l'homophobie et d'accroître la volonté des individus de se faire dépister.

José Ángel Córdova Villalobos, secrétaire d'État à la Santé du Mexique

« L'Afrique du Sud n'a pas d'autre choix que d'élargir l'accès au traitement. À mesure que le dépistage s'intensifie, davantage de personnes connaissent leur état sérologique, et compte tenu des données démontrant l'impact de cette connaissance sur la prévention, cette approche est fondamentale », a expliqué Aaron Motsoaledi, ministre de la Santé d'Afrique du Sud.

Les récentes évolutions dans la compréhension et les approches scientifiques ont été mises en avant et l'on a montré dans quelle mesure elles peuvent « changer la donne ». Les représentants nationaux ont discuté de la manière dont ils peuvent utiliser ces informations pour élargir davantage les programmes de traitement du VIH. Ces nouvelles informations concernant les bénéfices du traitement contre le VIH en matière de prévention offrent l'occasion d'accroître la collaboration dans le cadre de la riposte au VIH.

Des investissements sont nécessaires

D'après le nouveau modèle d'investissement de l'ONUSIDA publié dans la revue The Lancet à la veille de la Réunion de haut niveau sur le sida, un budget supplémentaire d'un montant relativement faible serait nécessaire pour parvenir aux 22 milliards de dollars requis pour l'accès universel au traitement contre le VIH d'ici 2015. Cependant, de nouvelles données indiquent que les investissements internationaux pour le sida semblent être en baisse pour la première fois depuis dix ans.

« Nous devons considérer les investissements que nous réalisons aujourd'hui comme des acomptes qui permettront de réduire les coûts demain », a souligné M. Sidibé. « Il est inadmissible que neuf millions de personnes vivant avec le VIH n'aient toujours pas accès à un traitement préventif alors que nous avons la preuve de son incroyable efficacité ».