Reportage

Réduction des risques en milieu carcéral à Maurice

22 avril 2014

En 2006, le gouvernement mauricien a lancé des programmes de réduction des risques (programmes d'échange d'aiguilles et de traitement substitutif aux opiacés (méthadone)) afin de limiter la transmission des infections par voie sanguine chez les consommateurs de drogues injectables en milieu carcéral et à l'extérieur. Les chiffres du gouvernement pour 2012 montrent que plus de 5 400 personnes ont pu suivre un traitement substitutif aux opiacés et le Rapport d'activité sur la riposte au sida dans le monde pour 2012 indique qu'à Maurice, la transmission du VIH par consommation de drogues injectables est passée de 73 % en 2010 à 68 % en 2011.

Lors d'une visite officielle à Maurice, le Directeur exécutif de l'ONUSIDA Michel Sidibé a visité la prison centrale de Beau-Bassin, le plus grand centre pénitentiaire de Maurice, afin d'en savoir plus sur son programme de traitement substitutif aux opiacés qui permet aux détenus de continuer à recevoir une dose quotidienne de méthadone pendant leur incarcération.

À cette occasion, M. Sidibé a félicité le gouvernement mauricien et les organisations non gouvernementales pour avoir mis en place un programme qui assure le bien-être des détenus. « La qualité du traitement des prisonniers est le reflet du niveau d'humanité à Maurice », a déclaré M. Sidibé. « La prison centrale de Beau-Bassin rétablit la dignité humaine dans toutes ses dimensions ».

Selon les chiffres du gouvernement, en mars 2014, environ 2 289 personnes condamnées et en détention préventive étaient incarcérées dans les neuf prisons de Maurice. Près de 40 % des hommes détenus dans le pays sont emprisonnés pour des crimes en lien avec la drogue et 30 % des détenus vivent avec le VIH. Le partage de matériel d'injection de contrebande est courant en prison, ce qui augmente le risque d'infection à VIH en cours de détention.

« L'île Maurice est fière de faire partie des quelques pays qui appliquent un programme de traitement à la méthadone en prison, couvrant plus de 200 détenus », a indiqué Jean Bruneau, Commissaire des Prisons de Maurice. « Grâce à ce programme, Maurice a pu réduire la transmission du VIH chez les détenus qui consomment des drogues ».

« Je remercie le gouvernement pour son soutien au programme de traitement à la méthadone et aux autres services importants fournis au centre médical de la prison », a expliqué un détenu à M. Sidibé. « Cela me permet de me préparer au retour à une vie normale et à devenir un membre estimé de ma communauté ».

Lors de sa visite à Maurice, M. Sidibé a également rencontré des représentants d'organisations de la société civile et des réseaux de personnes vivant avec le VIH pour évoquer les opportunités et les problèmes de la riposte nationale au sida.

« Ma discussion avec la société civile a été un moment de vérité, un échange qui a donné un visage à l'épidémie », a déclaré M. Sidibé. « En visant nos objectifs au-delà de 2015, nous devons veiller à ce que personne ne soit laissé de côté ».

La stigmatisation et la discrimination envers les personnes vivant avec le VIH restent un véritable problème pour la riposte nationale au sida. L'Indice de stigmatisation des personnes vivant avec le VIH montre qu'à Maurice, 30 % des personnes interrogées (des personnes vivant avec le VIH ou touchées par le virus) craignent d'être insultées ou menacées ou harcelées verbalement, tandis que 23 % ont peur d'être agressées physiquement. En outre, 28 % des personnes interrogées ont indiqué s'être vu refuser l'accès aux services de santé en raison du VIH, tandis que 40,5 % ont fait part de réactions discriminatoires ou très discriminatoires lors de la divulgation de leur état sérologique vis-à-vis du VIH aux professionnels de santé.

« Les gens sont victimes de stigmatisation et de discrimination en raison de leur séropositivité au VIH : on leur refuse en permanence l'accès aux services, ils sont exclus de leurs communautés et confrontés à la menace d'une expulsion. Telles sont les réalités rencontrées par les personnes vivant avec le VIH à Maurice », a déclaré Nicolas Ritter, Directeur exécutif de Prévention Information et Lutte contre le SIDA.