Reportage

Combattre les obstacles juridiques et politiques à la prévention du VIH : dialogue régional en Afrique subsaharienne sur le VIH et le droit

12 août 2011

En Afrique subsaharienne, la région la plus fortement touchée par le VIH, les obstacles juridiques, politiques et sociaux, notamment la stigmatisation, la discrimination, l'inégalité entre hommes et femmes et la criminalisation des principales populations exposées à un risque accru d'infection par le VIH, continuent de rendre les individus vulnérables au VIH et d'entraver leur capacité, ainsi que celle des communautés et des États, à lutter contre l'épidémie. Telle est la conclusion du dialogue régional pour l'Afrique subsaharienne, organisé par la Commission mondiale sur le VIH et le droit, qui s'est tenu au début du mois d'août à Pretoria, en Afrique du Sud.

Aucun tabou ne doit être ignoré

Une avancée significative est née de l'engagement des participants à mettre en lumière et à débattre de tous les aspects de l'environnement légal relatifs au VIH, notamment les lois et les pratiques en lien avec la stigmatisation et la discrimination, l'accès à un traitement abordable, les enfants et les adolescents, les droits des femmes et la violence sexiste.

« Ce dialogue régional est pour nous, Africains, une formidable opportunité de soulever des questions difficiles, en particulier les lois discriminatoires et punitives qui ciblent les professionnel(le)s du sexe et les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, ainsi que d'autres populations vulnérables au VIH », a expliqué Bience Gawanas, commissaire de l'Union africaine chargée des affaires sociales.

La criminalisation de la consommation de drogues, du commerce du sexe et des relations homosexuelles a également été évoquée par les participants, dans une invitation à s'attaquer à tous les tabous. Cette attitude est d'autant plus remarquable que des évolutions récentes en matière de lois et de politiques punitives ont été observées dans plusieurs pays d'Afrique subsaharienne en relation avec la situation des personnes issues des populations à risque, et que ces évolutions ont soulevé des doutes quant à la volonté des parties prenantes de la région de remédier à ces problèmes. Pas moins de 31 pays de la région considèrent le commerce du sexe comme un crime et les relations homosexuelles constituent une infraction pénale dans au moins une trentaine de pays.

Les obstacles juridiques et politiques entravent la riposte au VIH en Afrique

Ce dialogue régional fait partie d'une série de sept consultations organisées dans toutes les régions du monde, visant pour la Commission à recueillir des informations sur les lois, les politiques et les pratiques qui représentent des obstacles à des ripostes efficaces au VIH. La Commission mondiale sur le VIH et le droit, lancée par le PNUD et l'ONUSIDA en juin 2010, a été mise en place pour faire des recommandations concernant les moyens possibles de s'attaquer à ces obstacles.

Pour être efficace dans la riposte au sida, nous devons répondre aux besoins des millions d'Africains qui, en raison de peurs, de préjugés ou de valeurs et de normes légales, culturelles et sociales profondément enracinées, n'ont pas accès aux services anti-VIH ou ne peuvent vivre leur vie pleinement et dignement

Sheila Tlou, directrice de l'équipe ONUSIDA d'appui aux pays d'Afrique orientale et australe.

Conscients de l'opportunité offerte par la Commission d'examiner et d'étudier les solutions à ces problèmes, des représentants de la société civile et des gouvernements venus de tous les pays de la région se sont retrouvés à cette occasion. 

« Pour être efficace dans la riposte au sida, nous devons répondre aux besoins des millions d'Africains qui, en raison de peurs, de préjugés ou de valeurs et de normes légales, culturelles et sociales profondément enracinées, n'ont pas accès aux services anti-VIH ou ne peuvent vivre leur vie pleinement et dignement, », a expliqué Sheila Tlou, directrice de l'équipe ONUSIDA d'appui aux pays d'Afrique orientale et australe.

Demander des comptes aux gouvernements sur les engagements pris

Dans la Déclaration politique sur le VIH/sida, adoptée à l'unanimité lors de la Réunion de haut niveau de l'Assemblée générale des Nations Unies sur le sida, tous les États membres se sont engagés à « faire plus pour mettre en place un cadre juridique, social et politique facilitateur afin d’éliminer la stigmatisation, la discrimination et la violence liées au VIH ». Lors du dialogue, les représentants des personnes vivant avec le VIH, des professionnel(le)s du sexe et des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes ont appelé les parlementaires, les membres du pouvoir judiciaire et les autres responsables gouvernementaux compétents de la région à respecter cet engagement.

À ce jour, les dialogues de la Commission mondiale sur le VIH et le droit ont été organisés dans six régions, et la dernière session, qui sera consacrée aux pays à revenu élevé, devrait avoir lieu les 16 et 17 septembre 2011 aux États-Unis.

Dans la foulée de ce processus de consultation, la Commission mondiale sur le VIH et le droit rédigera des recommandations éclairées par des données probantes et fondées sur les droits humains, qui pourront donner lieu à des actions en justice, pour une riposte au sida efficace qui assure la promotion et la protection des droits des personnes vivant avec le VIH et de celles qui sont les plus vulnérables au virus. Les conclusions seront publiées en décembre 2011.