Reportage

Les organisations communautaires et les dirigeants des Nations unies discutent d'un financement durable pour la lutte contre le sida en Afrique

07 décembre 2011

De gauche à droite : As Sy, directeur régional de l'UNICEF pour l'Afrique, et Michel Sidibé, directeur exécutif de l'ONUSIDA, accompagnés de Gottfried Hirnschall, directeur du département VIH/sida de l'OMS, à l'espace de dialogue communautaire.
Photo : ONUSIDA/J. Ose

Dans le cadre de l'« Objectif zéro », les dirigeants des Nations unies et les représentants communautaires se sont engagés dans un échange passionné sur le financement durable pour la riposte au sida en Afrique. La discussion a été éclipsée par une inquiétude croissance sur l'annulation récente du 11ème tour par le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme (Fonds mondial).

Le directeur exécutif de l'ONUSIDA, Michel Sidibé, le directeur régional de l'UNICEF pour l'Afrique, As Sy, ainsi que le directeur du département VIH/sida de l'OMS, Gottfried Hirnschall, ont répondu aux questions du public qui s'était rassemblé à l'occasion d'un espace de dialogue communautaire lors de la 16ème Conférence internationale sur le sida et les IST en Afrique.

M. Sidibé a été invité à présenter brièvement la vision de l'ONUSIDA : zéro nouvelle infection au VIH, zéro discrimination et zéro décès dû au sida. « Selon moi, cette vision est une manière de riposter à l'injustice sociale. Chacun peut avoir accès des services anti-VIH dont il a besoin, si nous en faisons une priorité politique », a déclaré M. Sidibé.

Du point de vue du secteur de la santé, le Dr Hirnschall a affirmé : « Il est nécessaire de mettre en place des systèmes pour que les malades puissent avoir accès aux traitements et à des services de qualité et complets et surtout, pour faire valoir l'égalité entre tous. »

Compte tenu des contraintes de financement actuelles auxquelles est confrontée la riposte au sida, M. Sidibé a insisté sur le fait que de nouvelles méthodes de collaboration sont nécessaires : « L'atteinte de l'objectif zéro exige de nouveaux partenariats et une démocratisation des solutions innovantes en réponse aux problèmes rencontrés pour réduire le coût des médicaments. Enfin, “l'objectif zéro” consiste à riposter à l'épidémie de sida de façon plus rapide, plus intelligente et plus efficace. »

Jeanne Gappya, une représentante de la société civile du Burundi, a interpellé les dirigeants des Nations unies présents à la table ronde : « Quand je vais rentrer dans mon pays, on va me demander si les trois zéros arrivent », a-t-elle déclaré. « D'après moi, il y a un autre zéro, le zéro financement. Comment sommes-nous censés atteindre l'objectif zéro sans financement ? » a-t-elle demandé.

C'est à nous de travailler dur pour atteindre l'objectif des trois zéros. Le syndrome de dépendance peut être éliminé et les communautés doivent avoir la capacité de riposter d'elles-mêmes

Auxiria Mwanza de Zambie, lauréate du Prix Ruban Rouge 2010

M. As Sy a reconnu que l'annulation du 11ème tour du Fonds mondial était un inconvénient potentiel, et a reconnu l'angoisse générée à la fois chez les personnes vivant avec le VIH qui ont actuellement accès à un traitement et au sein des organisations et des gouvernements qui font pression pour augmenter les services de prévention, de traitement, de soins et d'appui en matière de VIH.

Néanmoins, M. As Sy a invité les pays destinataires des ressources du fonds mondial à entamer une discussion sur la diversification de leurs sources de financement : « Nous ne devons pas placer tous nos espoirs sur le Fonds mondial à lui seul. Nous devons trouver des sources de financement alternatives », a déclaré M. As Sy.

Faisant écho à ces inquiétudes, M. Sidibé a noté qu'un grand pourcentage de personnes vivant avec le VIH sur le continent africain reçoivent un traitement contre le VIH grâce au Fonds mondial. Il s'est positionné contre l'arrêt de ce financement, en particulier en cette période charnière où l'Afrique mène le monde en matière de réduction des infections au VIH et des décès dus au sida.

Rejoignant la discussion, Auxiria Mwanza de Zambie a déclaré que la nouvelle de l'annulation du 11ème tour du Fonds mondial permettait de donner une leçon aux organisations communautaires : « Nous ne pouvons plus nous fier au financement externe. C'est à nous de travailler dur pour atteindre l'objectif des trois zéros. Le syndrome de dépendance peut être éliminé et les communautés doivent avoir la capacité de riposter d'elles-mêmes », a déclaré Mlle Mwanza.

M. Sidibé a convenu de la nécessité pour les pays africains de réduire leur dépendance aux sources de financement externes et de rechercher de nouvelles sources de financement. Ceci pourrait inclure par exemple l'établissement d'une taxe sur les transactions financières et la création d'une agence de traitement africaine qui pourrait mettre à disposition un traitement anti-VIH à moindre coût sur le continent.