Reportage

L'importance capitale des programmes à base communautaire pour les progrès de la lutte contre le sida au Sri Lanka

18 juin 2013

Luiz Loures, Directeur exécutif adjoint de la branche Programme de l'ONUSIDA, a rencontré et dialogué avec des représentants de la société civile et des membres des communautés lors de sa visite au Sri Lanka.
Photo : ONUSIDA/Jayalal

Les communautés les plus exposées au risque d'infection à VIH doivent être placées au centre de la conception et de la mise en œuvre des programmes de lutte contre le sida au Sri Lanka. Tel était le message au cœur des discussions entre les représentants de la société civile et le Directeur exécutif adjoint de la branche Programme de l'ONUSIDA, Luiz Loures, lors d'une visite officielle dans le pays entre le 16 et le 18 juin.

Durant son séjour au Sri Lanka, M. Loures a visité plusieurs programmes à base communautaire et rencontré des représentants des populations les plus touchées, notamment les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes et les professionnel(le)s du sexe, ainsi que des femmes vivant avec le VIH. Lors de conversations approfondies, il a pris connaissance d'exemples de programmes nationaux ciblés qui ont permis de faciliter l'élargissement de l'accès à plusieurs services anti-VIH pour ces populations, ainsi que la création de réseaux à grande échelle.

La prévalence nationale du VIH, estimée à 0,1 %, reste relativement faible au Sri Lanka, mais ce pays est l'un des quatre de la région Asie Pacifique à avoir connu une augmentation allant jusqu'à 25 % des nouvelles infections à VIH sur la période 2001-2011. Les hauts niveaux d'infection à VIH se concentrent souvent autour de certaines localités et au sein de communautés très exposées au virus. Selon des études nationales, dans la ville de Kandy par exemple, la prévalence du VIH chez les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes est estimée à 4 %, soit plus de 40 fois la moyenne de la population générale.

Au Sri Lanka, et plus largement dans la région Asie Pacifique et dans le monde entier, nous constatons que l'impact le plus fort est visible là où les communautés sont à la tête et au centre de la riposte au sida

Luiz Loures, Directeur exécutif adjoint de la branche Programme de l'ONUSIDA

« Au Sri Lanka, et plus largement dans la région Asie Pacifique et dans le monde entier, nous constatons que l'impact le plus fort est visible là où les communautés sont à la tête et au centre de la riposte au sida », a expliqué le Dr Loures, en saluant les programmes présentés lors de sa visite. Il a insisté sur la réussite des programmes initiés auprès des populations les plus touchées au Sri Lanka, malgré un environnement juridique et politique difficile qui criminalise le commerce du sexe et les relations entre personnes de même sexe.

Évoquant l'urgente nécessité d'élargir davantage ces programmes dans le pays pour enrayer l'augmentation des taux d'infection à VIH, le Dr Loures a fait remarquer que « même dans les pays à faible prévalence, nous devons conserver le sens de l'urgence pour faire en sorte que les réponses et les financements soient ciblés là où les individus en ont le plus besoin et qu'ils soient développés pour les communautés par les communautés ».

Dans les pays qui ont fait état de leurs progrès sur le sida en 2012, on estime que seulement 19 % des dépenses consacrées à la prévention étaient destinés aux populations les plus exposées au virus. Dans cette région, bien que l'on estime que 25 % de toutes les nouvelles infections à VIH touchent les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, seulement 1 % des investissements sont utilisés pour les programmes concernant cette communauté.

Au Sri Lanka, les représentants des communautés demandent à ce que davantage d'attention et de ressources soient affectées à l'élargissement de la couverture et des services pour les personnes qui en ont le plus besoin.

« Nous avons créé un réseau très performant et nous savons ce qu'il faut faire, mais nous avons besoin d'engagement et de ressources pour pouvoir accroître l'échelle et l'ampleur des programmes, afin de pouvoir nous assurer réellement que personne n'est laissé de côté », a expliqué Lalith Dharmawardena, Directeur exécutif de l'organisation Heart to Heart, un réseau visité par le Dr Loures, mis en place dans le but de défendre la santé sexuelle et les autres droits des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes au Sri Lanka.

Luiz Loures, Directeur exécutif adjoint de la branche Programme de l'ONUSIDA, a rencontré et dialogué avec des membres des communautés lors de sa visite au Sri Lanka.
Photo : ONUSIDA/P.Wijayananda

L'environnement juridique et politique punitif et les niveaux élevés de stigmatisation et de discrimination qui en découlent envers les personnes vivant avec le VIH et les communautés les plus touchées ont également été mis en avant comme un obstacle majeur à la riposte au sida au Sri Lanka. Le commerce du sexe et les relations sexuelles entre hommes sont interdits par les lois, les codes et/ou les politiques du pays. Des études nationales laissent penser que de nombreuses personnes parmi les plus exposées au risque d'infection repoussent leurs tests de dépistage du VIH et donc la mise en route d'un traitement éventuel parce qu'elles s'inquiètent des implications de leur identification et d'une séropositivité au VIH, ainsi que de la confidentialité de leur état sérologique.

Princey Mangalika, Présidente du Réseau sri lankais des femmes séropositives au VIH, a souligné à quel point la normalisation du VIH et des communautés les plus touchées pouvait avoir un impact positif sur la réduction de la stigmatisation et de la discrimination. Elle a également invité les responsables du gouvernement et des autorités présents lors des rencontres avec les communautés à veiller à une plus forte participation des personnes vivant avec le VIH et des communautés les plus touchées dans les organes de décision et dans la riposte nationale. Mme Mangalika a également remercié le gouvernement et le Fonds mondial d'avoir mis gratuitement à disposition le traitement antirétroviral pour ceux qui en ont besoin au Sri Lanka.

« Nous observons des signes vraiment positifs au Sri Lanka et nous avons désormais besoin d'espaces permanents pour les femmes vivant avec le VIH et les autres communautés », a déclaré Mme Mangalika, dont les efforts, à la fois personnels et au niveau de son organisation, lui ont valu un Prix Ruban rouge en 2012 pour ses programmes remarquables de soins et d'appui à base communautaire. « Il faut que les autorités soient plus à l'écoute des besoins particuliers des communautés (femmes, hommes, personnes transsexuelles) et nous laissent gérer les choses. Nous savons comment atteindre le mieux ces personnes », a-t-elle ajouté.

La visite au Sri Lanka du Directeur exécutif adjoint de la branche Programme de l'ONUSIDA coïncide avec sa participation à la XXIXe réunion du Conseil d'administration du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, qui s'est tenue à Colombo les 18 et 19 juin 2013.