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Le CCP de l’ONUSIDA évoque la discrimination dans le secteur de la santé

15 décembre 2017

La discrimination dans le secteur de la santé représente l’un des obstacles majeurs à la fin de l’épidémie de sida comme menace de santé publique d’ici à 2030. Les données probantes montrent que la discrimination dans le secteur de la santé est largement répandue dans le monde, qu’elle nuit gravement à la qualité de vie des personnes qui en sont victimes et qu’elle entrave le recours aux services de santé, empêchant ainsi les personnes d’exercer leur droit à la santé.

Afin d’accélérer les actions visant à mettre fin à la discrimination dans le secteur de la santé, le Conseil de coordination du Programme de l’ONUSIDA, à l’occasion de sa 41e réunion qui s’est tenue à Genève, en Suisse, du 12 au 14 décembre, a passé en revue les données probantes disponibles concernant les effets de la discrimination dans le secteur de la santé sur les efforts destinés à atteindre les objectifs mondiaux en matière de prévention et de traitement du VIH, puis recensé les actions programmatiques à mener pour en finir avec cette discrimination.

La discrimination dans les structures de soins est souvent une conséquence de la stigmatisation et peut se manifester lorsqu’un individu ou un groupe se voir refuser l’accès à des services de santé qui sont disponibles pour les autres, ou lorsque les soins, les traitements et/ou les procédures médicales sont refusés ou différés pour des motifs discriminatoires.

Les preuves présentées lors de la réunion montrent que la discrimination dans les structures de soins mène à l’exclusion des personnes ou les dissuade de recourir aux services médicaux par crainte de la stigmatisation, du jugement ou de l’absence de confidentialité. Elle représente un obstacle à l’accomplissement des objectifs 90-90-90 et elle a des répercussions négatives sur la continuité du parcours de soins, qui englobe la prévention, le dépistage et le traitement du VIH, ainsi que la suppression durable de la charge virale.

Lorsque les personnes ne peuvent ou ne veulent pas s’adresser aux services de santé, elles sont moins susceptibles de se faire dépister, et encore moins de bénéficier d’un dépistage du VIH en temps opportun qui leur assure une mise sous traitement précoce. De la même façon, lorsque les personnes vivant avec le VIH entament effectivement un traitement, la discrimination peut nuire au suivi des soins et à l’observance du traitement.

Par ailleurs, les professionnels de santé sont aussi sensibles aux mêmes facteurs de discrimination que les autres, notamment en adoptant des attitudes négatives vis-à-vis des personnes vivant avec le VIH, des populations clés, des femmes et des filles. En Thaïlande, des enquêtes menées auprès de prestataires de santé révèlent que les attitudes au regard du VIH au sein des personnels des établissements de santé sont susceptibles de les empêcher de soigner correctement les personnes vivant avec le VIH ou touchées par le virus. Ces attitudes incluent l’idée que le VIH est une punition à cause d’un comportement immoral, que la plupart des personnes vivant avec le VIH ne se soucient guère d’infecter d’autres personnes et qu’il peut être approprié de stériliser une femme vivant avec le VIH, même sans son consentement. Dans certains cas, les agents de santé déclarent ouvertement qu’ils préfèreraient ne pas s’occuper des membres des populations clés.

Pour résoudre ces problèmes et éliminer la discrimination dans le secteur de la santé, il faut mettre en œuvre et intensifier des actions multisectorielles ciblées, coordonnées, assorties de délais et éclairées par des données probantes.

Les participants à la réunion se sont mis d’accord sur un ensemble d’approches programmatiques visant à réduire la discrimination dans le secteur de la santé, à savoir :

  • Les programmes et autres mesures visant à éliminer la discrimination dans les structures de soins doivent être fondés sur les données probantes. La discrimination doit donc être contrôlée, mesurée et pistée. Plus précisément, il est important d’évaluer aussi bien les expériences des usagers de ces services que les attitudes et les pratiques des prestataires, ainsi que d’assurer l’existence et la mise en œuvre de politiques non discriminatoires à l’échelon national, local et des établissements.
  • Dans le cadre d’une stratégie complète d’élimination de la discrimination dans les structures de soins, les pays devraient assurer la formation des agents du secteur de la santé avant et pendant leur temps de service. Cela permettra à ces travailleurs de développer des compétences en matière de droits de l’homme et d’égalité des sexes et de renforcer la compréhension de l’éthique médicale et des droits, du rôle et des responsabilités de ces travailleurs par rapport à la discrimination dans les structures de soins.
  • Les pays devraient revoir et renforcer les lois qui interdisent la discrimination dans la prestation et la distribution de services médicaux et prévoient des recours pour les individus dont les droits ont été violés, ainsi que des sanctions pour les auteurs de ces violations. Éliminer la discrimination formelle ancrée dans les lois et les politiques représente une partie de la solution. Cependant, les États doivent aussi mettre en place des mesures qui protègent les personnes vivant avec le VIH et les membres des populations clés à l’intérieur et à l’extérieur des structures de soins.

Les participants ont convenu que la lutte contre la stigmatisation et la discrimination, en particulier dans le secteur de la santé, est une nécessité fondamentale pour atteindre les objectifs de la stratégie d’accélération fixés pour 2020 et respecter la promesse de ne laisser personne pour compte, inscrite dans l’Agenda 2030 pour le développement durable.

Déclarations

« Les professionnels de santé doivent devenir des défenseurs des droits de l’homme. L’ONUSIDA est favorable à un pacte mondial pour en finir avec la stigmatisation et la discrimination et appelle à la désagrégation des données, à des interventions dans les structures de soins, notamment des formations, et une action rapide pour lutter contre toutes les formes de criminalisation du VIH et éliminer les autres obstacles juridiques et politiques à l’accès aux services. »

Luiz Loures Directeur exécutif adjoint de l’ONUSIDA

« Donner aux professionnels de santé des moyens, des connaissances et des compétences en matière de droits de l’homme va leur permettre de fournir de meilleurs services. »

Lilian Kyomuhagi Mworeko Coordonnatrice régionale, Communauté internationale des femmes vivant avec le VIH, Afrique orientale

« Les populations clés doivent se sentir en sécurité lorsqu’elles s’adressent aux services de santé. Dans notre clinique, nous apportons la confiance aux communautés, en assurant des services de soins de qualité, un espace de confidentialité et un accueil chaleureux. »

Camille Anoma Directeur de la Clinique de Confiance, Abidjan, Côte d’Ivoire

« En Inde, les personnes transgenres sont reconnues par la loi depuis 2003, mais le gouvernement met beaucoup trop de temps à voter une loi qui tienne compte des besoins sanitaires de la communauté et propose des services de santé sûrs et sécurisés aux personnes transgenres. »

Abhina Aher Directrice associée, Sexualité, Genre et Droits, Alliance indienne contre le VIH/sida

« Les professionnels de santé sont aussi confrontés à la discrimination. Ils doivent être soutenus non seulement pour assumer leur rôle et leurs responsabilités, mais aussi pour faire valoir leurs droits. Les professionnels de santé doivent être des champions du droit à la santé. »

James Campbell Directeur du Département de l’OMS Ressources humaines pour la santé