THA

Prévenir la transmission et lutter contre la stigmatisation : la puissance de la formule U=U

12 décembre 2022

U=U, qui signifie Undetectable = Untransmittable (indétectable = non transmissible), est un message de santé publique vital pour la riposte au VIH. Indétectable = Non transmissible signifie que les personnes vivant avec le VIH dont la charge virale est rendue indétectable grâce à un traitement antiviral et un suivi cohérents ne peuvent pas transmettre le VIH. Comme la Thaïlande l’a montré, la formule U=U contribue également à lutter contre la stigmatisation à laquelle les personnes séropositives peuvent être confrontées dans les établissements de santé et dans la société au sens large.

U=U est une action prioritaire de la Stratégie nationale pour mettre fin au sida 2017 – 2030 de la Thaïlande. Cette approche a déjà été testée dans la capitale, Bangkok. Un programme pour commencer le traitement directement le jour de l’annonce de la séropositivité a permis à plus de 95 % des personnes sous traitement de voir leur charge virale supprimée après seulement six mois de thérapie antirétrovirale. Cette initiative nationale réunit l’Institut thaïlandais pour la recherche et l’innovation en matière de VIH (IHRI), les ministères de la Santé publique, de l’Éducation et du Travail, l’Office national de sécurité sanitaire et la Sous-commission pour la promotion et la protection des droits liés au sida, avec le soutien de l’ONUSIDA.

Dans son ensemble, la riposte au VIH en Thaïlande enregistre de bons résultats, avec environ 94 % des personnes vivant avec le VIH qui connaissent leur état sérologique, 91 % des personnes diagnostiquées sous traitement et 97 % des personnes sous traitement ayant une charge virale indétectable. Mais malgré ces progrès, des barrières demeurent à cause de la stigmatisation. Les diagnostics tardifs sont encore trop nombreux et certaines personnes ont peur d’accéder aux services anti-VIH. Pour augmenter le recours aux services anti-VIH et atteindre U=U pour toutes les personnes séropositives, il est essentiel que le système de santé prenne en charge chaque personne dans le respect et la dignité.

La directrice exécutive de l’IHRI, Dr Nittaya Phanuphak, a souligné qu’il est essentiel de connaître son statut sérologique pour ensuite accéder à un traitement antirétroviral.

« Les personnes exposées au risque de contracter le VIH et les personnes vivant avec le VIH de tous les groupes en Thaïlande doivent avoir un accès égal et pratique au dépistage du VIH et, en cas de séropositivité avérée, au traitement antirétroviral dès que possible, ce qui conduira à U=U », a déclaré le vice-ministre de la Santé publique, Dr Sopon Makthon.

L’initiative thaïlandaise U=U adopte une démarche dirigée par les communautés qui permet aux personnes vivant avec le VIH d’aider les personnes nouvellement diagnostiquées à commencer un traitement antirétroviral et à le respecter. « Le leadership communautaire est essentiel pour communiquer efficacement sur U=U », a déclaré la directrice pays de l’ONUSIDA pour la Thaïlande, Patchara Benjarattanaporn. « Il contribuera à lutter contre la stigmatisation et l’autostigmatisation, et à encourager les bons comportements en matière d’accès à la santé. »

Apiwath Kwangkaew, président du Réseau thaïlandais de lutte contre le VIH/sida, a appelé l’ensemble du personnel de santé à relayer le message U=U : « Le personnel médical d’aujourd’hui doit pouvoir expliquer clairement la formule U=U pour sensibiliser la société. Les services de santé doivent faire preuve de courage et se faire entendre. Un changement de mentalité entraînera un changement plus large », a déclaré M. Kwangkaew.

« L’ONUSIDA salue la meilleure communication du message U=U. Cette formule est essentielle pour atteindre l’objectif de zéro nouvelle contamination au VIH, zéro discrimination et zéro décès dû au sida », a conclu le directeur régional de l’ONUSIDA, Taoufik Bakkali.

Mplus en Thaïlande : des services anti-VIH qui ont du style

13 décembre 2022

« Je ne risque pas de rencontrer ma mère ici ! », s’est exclamé un visiteur étonné.

Des bannières aux brochures, tous les supports donnent envie de les lire et débordent de joie de vivre. Les visages souriants et les torses musculeux sont omniprésents. Le violet se retrouve dans tout le bâtiment. Même les dossiers et les masques que porte le personnel sont dans cette couleur. Deux modérateurs sur Facebook Live ont le style et l’énergie de stars de la K-pop. Et le slogan de l’organisation est résolument optimiste : « Là où la communauté fait votre bonheur ».

En près de vingt ans, la Mplus Foundation a peaufiné son style unique pour fournir des services anti-VIH complets aux populations clés, y compris aux hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes et aux femmes transgenres.

Sa méthode va bien au-delà d’une identité de marque cool. Mplus s’est appuyée sur des partenariats nationaux et internationaux pour créer un service de santé axé sur les populations clés qui enregistre des résultats impressionnants. L’organisation distribue plus de la moitié de la PPrE dans la province thaïlandaise de Chiang Mai.

Cette année, elle a fait un dépistage pour 95 % des quelque 8 000 personnes qu’elle a rencontrées avec ses services en direct. Parmi les personnes testées positives, 91 % reçoivent maintenant une thérapie alors que le dossier des 9 % restants est en cours de traitement. Et 100 % des tests de charge virale de leur patientèle ont indiqué une charge virale indétectable.   

« Les organisations communautaires sont les mieux à même d’inviter les populations clés à avoir accès aux services. Nous constatons que les personnes qui ne veulent pas se faire dépister à l’hôpital sont à l’aise avec les gens qui ont vécu ce qu’elles vivent », explique le directeur de la Fondation Mplus, Pongpeera Patpeerapong.   

Depuis sa création en 2003, Mplus a évolué pour fournir une gamme complète de services. Elle dispose désormais de centres de santé dans quatre provinces, tandis que leurs unités de test mobiles vont sur le terrain dans cinq autres districts. Son personnel soutient un hôpital local dans chaque province pour relier les personnes aux soins et les aider à respecter leur traitement. Mplus fournit des tests rapides, une surveillance de la charge virale et de CD4, et est également autorisée à délivrer des médicaments. Une petite flotte de motos livre même la PPrE à des bénéficiaires vivant dans des zones reculées.

Les actions sur Internet et hors ligne de Mplus sont toutes ancrées dans une stratégie dirigée par des pairs. Sa présence sur les réseaux sociaux est impressionnante, que ce soit sur Twitter ou Tik Tok. Elle possède des groupes Facebook fermés et des applications spéciales pour que les personnes puissent se connecter à la communauté. Hors ligne, elle ne propose pas que des stands d’information, mais organise des soirées et des rencontres sportives. Il ne s’agit pas seulement de mesures pour créer des liens. Les personnes prennent rendez-vous en ligne et les interactions en face à face donnent souvent lieu à un dépistage.

Mplus fournit également une assistance technique à d’autres pays. Elle soutient une organisation au Laos en intervenant sur Internet et aide des groupes communautaires au Cambodge à développer des campagnes de promotion de la PPrE.

Elle a joué un rôle clé dans la lutte au niveau national en faveur de l’accréditation du personnel de santé communautaire. Toute l’équipe de Mplus est certifiée par le Département de contrôle des maladies à la suite d’un cursus rigoureux mêlant connaissances théoriques et pratiques à des évaluations.

Le programme continue de progresser.  Mplus renforce son offre de soutien psychologique et émotionnel en matière de santé et s’efforce d’obtenir la certification pour fournir un traitement contre le VIH et les infections sexuellement transmissibles (IST).

Alors que, par le passé, le Plan d’urgence du Président des États-Unis pour la lutte contre le sida finançait plus lourdement le programme par l’intermédiaire de l’United States Agency for International Development, la moitié de ses investissements proviennent aujourd’hui d’entités de l’Office national de sécurité sanitaire.

« Le financement national est très important pour développer nos systèmes », a déclaré M. Patpeerapong. « Les organisations communautaires doivent pouvoir accéder à des fonds nationaux pour s’attaquer à plus de problèmes, comme la stigmatisation et la discrimination. »

L’autonomisation des services de santé dirigés par les populations clés joue un rôle crucial pour que les programmes de lutte contre le VIH enregistrent de meilleurs résultats en Thaïlande. Dans le pays, une personne séropositive sur cinq a été identifiée et orientée par un service de santé dirigé par une population clé dans le cadre du programme de financement de la santé nationale. Quatre personnes sur cinq prenant une PPrE sont prises en charge par des organisations communautaires. Ces services jouent un rôle essentiel dans la stratégie thaïlandaise « Reach, Recruit, Test, Treat, Prevent, Retain » (Atteindre, Rencontrer, Dépister, Soigner, Prévenir, Fidéliser).

« La Thaïlande est bien positionnée pour montrer comment satisfaire les besoins d’une riposte durable dirigée par les communautés dans le cadre de l’infrastructure sanitaire », a déclaré la directrice pays de l’ONUSIDA pour la Thaïlande, Patchara Benjarattanaporn. « En créant un système favorisant les services de santé de proximité, nous pouvons lutter contre le diagnostic tardif et offrir de meilleurs services aux populations clés. »

La Thaïlande intègre les services anti-VIH dans sa politique de couverture sanitaire universelle et augmente les investissements dans les services de santé dirigés par les populations clés et les communautés. Les membres du Conseil de coordination du Programme de l’ONUSIDA (CCP) ont visité Mplus et d’autres services de santé dirigés par les communautés en amont de la 51e réunion du CCP organisée à Chiang Mai en Thaïlande.

Cette semaine, la Thaïlande accueille une rencontre mondiale sur le VIH centrée sur le leadership de la riposte au sida

11 décembre 2022

BANGKOK, le 11 décembre 2022—La 51e réunion du Conseil de coordination du Programme de l’ONUSIDA (CCP) se tient du 13 au 16 décembre à Chiang Mai en Thaïlande. La rencontre est organisée par le gouvernement thaïlandais qui assume la présidence du CCP en 2022. C’est la première fois en 14 ans que le conseil ne se réunit pas à Genève en Suisse, et c’est la deuxième fois qu’elle est organisée à Chiang Mai.

« Nous sommes reconnaissants à la Thaïlande pour son rôle de leader mondial dans la riposte au sida. Le pays a fait des progrès considérables pour mettre fin à son épidémie de VIH. Il montre bien à l’humanité qu’il est possible de transformer la volonté politique en action », a déclaré Taoufik Bakkali, directeur par intérim de l’équipe d’appui aux régions de l’ONUSIDA pour l’Asie et le Pacifique.

M. Bakkali a déclaré que l’organisation de cette rencontre en Thaïlande contribue à pérenniser la dynamique dans la région afin que l’Asie-Pacifique respecte les engagements pris par la communauté des nations dans la déclaration politique 2021 sur le VIH.

La réunion du Conseil de coordination du Programme de l’ONUSIDA adopte une approche inclusive. Des organisations de la société civile, y compris des associations de personnes vivant avec le VIH, seront présentes autour de la table avec les États membres et les organismes des Nations Unies. Les participants et participantes se rendront ensemble sur des programmes d’aide aux personnes touchées afin d’apprendre de ces initiatives. « Cette approche inclusive est essentielle pour assurer l’efficacité de la stratégie de l’ONUSIDA », a déclaré M. Bakkali. « Les gens scrutent de plus en plus les processus internationaux pour ce qui est du lieu, des personnes participantes et du lien entre les processus et les expériences des personnes les plus touchées. Cette rencontre a lieu dans un pays qui a tant de leçons à partager en puisant dans sa riposte au sida. »

Le Conseil de coordination du Programme de l’ONUSIDA supervise et donne une orientation stratégique au Programme commun des Nations Unies sur le VIH et le sida, qui à son tour guide et soutient la riposte au VIH dans le monde.

En 2008, la 22e réunion du CCP s’était également tenue à Chiang Mai sous l’égide de l’ancien ministre de la Santé publique, Chavarat Charnvirakul. La réunion à venir sera présidée par son fils, le vice-premier ministre et ministre de la Santé publique, Anutin Charnvirakul.

La riposte au VIH en Thaïlande

En 2021, 520 000 personnes environ vivaient avec le VIH dans le pays.

La Thaïlande a accompli des progrès considérables dans sa lutte contre le sida, en particulier en fournissant un dépistage et un traitement vitaux aux personnes séropositives. En 2016, elle a été le premier pays de la région à être reconnu comme ayant éliminé la transmission du VIH de la mère à l’enfant. Elle a également intégré le Partenariat mondial pour l’élimination de la stigmatisation et de la discrimination liées au VIH.

Depuis 2010, les décès dus au sida ont diminué de près de deux tiers (65 %) tandis que les nouvelles infections ont chuté de 58 %. L’année dernière, on estime que 94 % des personnes vivant avec le VIH en Thaïlande connaissaient leur état sérologique. 91 % des personnes diagnostiquées étaient sous traitement et 97 % des personnes sous traitement ont une charge virale indétectable.

En amont du CCP, les participants et participantes découvriront de grandes réussites de la riposte au VIH en Thaïlande. Le pays a été un pionnier dans l’intégration des services anti-VIH dans le programme de couverture sanitaire universelle. Ce dernier est désormais un moyen de financer durablement la riposte au VIH en augmentant considérablement les investissements dans les services de santé dirigés par les populations clés et les communautés.

La Thaïlande s’est appuyée sur plusieurs bonnes pratiques pour mettre fin au sida, notamment en légalisant la vente libre de kits d’auto-dépistage du VIH, en élargissant le démarrage du traitement le jour même du diagnostic et en déployant un programme de prophylaxie pré-exposition (PPrE). (La PPrE est un médicament qu’une personne séronégative au VIH prend tous les jours pour éviter de contracter le virus.) Ces progrès ont été rendus possibles, car la Thaïlande a mis l’accent sur la santé publique et la lutte contre la stigmatisation et la discrimination.

« La Thaïlande est sur la bonne voie pour atteindre et dépasser les objectifs de 95 % de dépistage et de traitement pour 2025. Pour ce faire, elle doit arriver jusqu’à ceux et celles qui n’ont toujours pas accès aux services de prévention, de dépistage, de traitement et de soins anti-VIH », a déclaré la directrice nationale de l’ONUSIDA pour la Thaïlande, Patchara Benjarattanaporn. Et de souligner que l’une des principales priorités aujourd’hui pour la Thaïlande est de diagnostiquer les personnes plus tôt et de réduire davantage les nouvelles infections. L’année dernière, on estime que 6 500 personnes ont été contaminées dans le pays. Il est important de noter que la moitié des nouvelles infections touchent des jeunes âgés de 15 à 24 ans, principalement parmi les populations clés.

« La Thaïlande fournit d’excellents services anti-VIH. Malheureusement, trop de jeunes n’obtiennent pas les informations, les services et l’assistance de prévention nécessaires. Et certaines personnes vivant avec le VIH ne prennent conscience que tardivement de leur statut sérologique, alors que leur état est déjà avancé. Alors que nous travaillons pour atteindre les personnes laissées pour compte, nous devons lutter contre les inégalités dans l’accès à l’information, aux services et au soutien et continuer à innover et à élargir les approches efficaces dirigées par les communautés », a déclaré Mme Benjarattanaporn. « Grâce à des actions audacieuses pour lutter contre les inégalités, nous pouvons mettre fin au sida d’ici 2030. »

ONUSIDA

Le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) guide et mobilise la communauté internationale en vue de concrétiser sa vision commune : « Zéro nouvelle infection à VIH. Zéro discrimination. Zéro décès lié au sida. » L’ONUSIDA conjugue les efforts de 11 institutions des Nations Unies – le HCR, l’UNICEF, le PAM, le PNUD, l’UNFPA, l’UNODC, ONU Femmes, l’OIT, l’UNESCO, l’OMS et la Banque mondiale. Il collabore étroitement avec des partenaires mondiaux et nationaux pour mettre un terme à l’épidémie de sida à l’horizon 2030 dans le cadre des Objectifs de développement durable. Pour en savoir plus, consultez le site unaids.org, et suivez-nous sur Facebook, Twitter, Instagram et YouTube.

51e réunion, Conseil de coordination du Programme, 13-16 décembre 2022

« Mon but dans la vie est de mettre fin à la stigmatisation et à la discrimination, et cela commence par I = I » : témoignage d’un militant anti-VIH en Thaïlande

01 mars 2022

C’était une journée comme les autres à Bangkok, en Thaïlande. Pete allait au travail et menait une vie assez normale. Il gérait avec sa sœur l’entreprise familiale d’import-export de légumes frais avec des pays voisins d’Asie du Sud-Est. Il était heureux et avait une relation sérieuse depuis longtemps avec son petit ami. Tout semblait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Ce jour-là, son partenaire et lui décident de faire un dépistage du VIH. Cette décision va brusquement bouleverser sa vie.

« J’ai découvert mon statut sérologique vis-à-vis du VIH en 2016 et peu après, j’ai quitté mon entreprise parce que je ne savais pas s’il allait me rester encore longtemps à vivre. Sans conseils ni assistance psychologique, j’avais beaucoup d’idées fausses sur le VIH et j’ai commencé à déprimer », explique-t-il.

« Je m’en voulais d’avoir contracté le VIH et je n’arrivais pas accepter cette idée. Je suis tombé dans la drogue, le chemsex [rapports sexuels accompagnés de consommation de drogues, ndt], j’ai rompu avec mon partenaire et j’ai fait plusieurs tentatives de suicide », poursuit-il. « Mais après avoir reçu le soutien d’organisations locales de personnes vivant avec le VIH, j’ai décidé de reprendre le contrôle de ma vie. J’ai commencé à parler ouvertement du VIH pour aider d’autres jeunes à vivre avec un statut sérologique positif. Même si je n’avais jamais prévu de faire cela, je savais que je devais le faire. C’est ainsi que je suis devenu militant de la cause du VIH », continue-t-il.

Aujourd’hui, Pete (dont le pseudonyme Pete Living with HIV est célèbre sur Internet) est un militant anti-VIH bien connu en Thaïlande. Il a fait beaucoup de chemin depuis son diagnostic. Il a passé ces dernières années à bâtir une communauté en ligne destinée aux personnes séropositives. Dans cet espace sécurisé, les internautes peuvent se connecter et partager librement leurs histoires et leurs expériences dans un environnement ouvert où la stigmatisation et la discrimination n’ont pas leur place. Son groupe Facebook, qui, pour des raisons évidentes, a des règles d’adhésion strictes, compte plus de 1 300 membres.

« J’ai créé cet espace parce que je n’avais pas d’endroit pour raconter mon histoire. Je voulais créer une plateforme où les personnes vivant avec le VIH peuvent être fières d’elles-mêmes et se rappeler qu’elles ne sont pas seules. Personne ne mérite d’être stigmatisé, harcelé, déshumanisé ou méprisé. Tout le monde mérite d’être aimé, respecté et accepté », explique-t-il.

En 2019, le pays a présenté le partenariat thaïlandais pour éradiquer la discrimination. Ce programme appelle le gouvernement et la société civile à intensifier leur collaboration sur la stigmatisation et la discrimination dans les environnements de santé et au-delà, y compris sur le lieu de travail, dans les systèmes éducatif, législatif et judiciaire. L’ONUSIDA a été impliquée dès les prémices de cette initiative. L’organisation a apporté une assistance technique pour élaborer une stratégie zéro discrimination et un plan quinquennal d’action, un plan de suivi et d’évaluation, mais aussi sa mise en œuvre grâce aux efforts communs du gouvernement et de la société civile.

Pete pense que cette initiative est un élément essentiel pour mettre fin à l’épidémie de sida, car la stigmatisation et la discrimination restent le principal obstacle aux services anti-VIH. « Bien que je remarque un net recul au fil des ans, je suis encore la cible de stigmatisation et de discrimination lorsque je me rends à des visites de contrôle pour les infections sexuellement transmissibles. Le personnel infirmier et les médecins continuent de me juger », indique-t-il.

Pete est également devenu un militant passionné et s’exprime sur l’importance de la stratégie I = I (indétectable = intransmissible) lors de conférences et de forums internationaux. « I = I a changé ma vie. Je lutte et je promeus sans cesse la stratégie I = I, car ses messages ont le pouvoir de changer la vie des personnes vivant avec le VIH et touchées par le virus. Mais, plus important encore, cela peut changer le comportement de la société et lutter contre la stigmatisation et la discrimination », poursuit-il.

Avec I = I, le traitement du VIH a transformé le paysage de la prévention du VIH. Le message est clair et change la vie : les personnes vivant avec le VIH qui suivent une thérapie antivirale et ont une charge virale indétectable ne peuvent pas transmettre le VIH à leur partenaire. Savoir qu’elles ne peuvent plus transmettre le VIH lors de rapports sexuels peut redonner confiance aux personnes séropositives et la réelle volonté de reprendre le contrôle de leur relation avec leur partenaire du moment ou à venir.

Pete a lancé en 2020 une campagne axée sur I = I et la sensibilisation à la santé mentale. « Grâce à mes publications sur les réseaux sociaux, je sensibilise à l'importance d’écouter et de respecter les gens et leurs expériences. I = I est la clé pour aider les personnes vivant avec le VIH à surmonter l’autostigmatisation et les sentiments négatifs comme la honte, qui les empêchent d’accéder à un traitement ou de le suivre durablement. La stratégie I = I est une source d’encouragements, qui rappelle aux personnes vivant avec le VIH qu’elles peuvent être fières d’elles », conclut-il.

Pete renforce aujourd’hui ses partenariats avec des acteurs et des alliés nationaux de la riposte au VIH afin de veiller à ce que les messages liés à I = I, à la prévention du VIH et à l’éradication de la discrimination soient relayés et atteignent différents publics. Il représente également un groupe de travail multisectoriel chargé de concevoir et de mettre en œuvre l’Indice de stigmatisation des personnes vivant avec le VIH en Thaïlande, une enquête qui sera menée cette année. Il a apporté son soutien aux Nations Unies en Thaïlande dans diverses campagnes, notamment la campagne Everybody Deserves Love Valentine’s Day et la campagne Zéro discrimination, dans laquelle il implique des jeunes originaires de toute la Thaïlande.

Journée zéro discrimination 2022

Bangkok : des populations clés fournissent des services de santé par le biais de leurs propres organisations

27 janvier 2020

Boy Somjai et Jam Chainukul (nous avons changé leurs noms) sont un jeune couple homosexuel de Bangkok en Thaïlande. Au début de leur relation, ils ont décidé de faire leur premier test du VIH. Alors que tous deux regardaient sur Internet, leurs amis leur ont conseillé la Rainbow Sky Association of Thailand (RSAT), une clinique spécialisée dans le VIH gérée par la communauté et située à proximité d’une rue animée de Bangkok.

Avec ses quatre cliniques et ses dix centres d’accueil implantés dans plusieurs villes de Thaïlande, la RSAT permet aux gays et autres hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, ainsi qu’aux personnes transgenres d’avoir accès à des services de prévention du VIH et de participer à des réunions d’information sur le sujet, le tout à la même adresse. Par ailleurs, la souplesse des horaires d’ouverture correspond au style de vie de nombreux membres des populations clés.

Danai Linjongrat, le directeur exécutif de la RSAT, explique : « L’accès des populations clés aux services du VIH est l’un des principaux défis de la riposte au VIH du pays. Il est extrêmement important que ces groupes puissent profiter de la prévention et du traitement du VIH sans avoir peur des discriminations. »

M. Boy et M. Jam reviennent à présent tous les trois mois à la RSAT pour effectuer un contrôle régulier. Pour eux, « lorsque nous sommes venus ici pour la première fois, nous étions vraiment stressés, car nous étions à la recherche d’un endroit qui respecte notre vie privée. Nous avons trouvé ici bien plus qu’un établissement spécialisé dans le VIH. Nous avons trouvé un lieu de confiance, un peu comme une famille. Le personnel de santé nous a aidés à parler de notre expérience. Il ne nous a pas jugés et il a accepté nos besoins en faisant preuve d’ouverture d’esprit. »

Le succès de la RSAT revient en partie au fait que son personnel appartient aux populations ciblées. La RSAT a adopté l’approche nationale consistant à permettre aux populations clés de fournir des services de santé. Ainsi, les membres de ces groupes sont en mesure d’identifier et de satisfaire les besoins d’autres personnes dans leur cas, notamment en matière de santé et de prise en charge du VIH. « Nous comprenons les besoins de notre public, ce qu’il veut, où il vit et ce qu’il ressent, car les membres de notre équipe font partie des mêmes communautés », explique M. Linjongrat.

Le personnel de santé fournit des services adaptés aux personnes et à leurs besoins, y compris la prophylaxie pré-exposition (PPrE), une assistance juridique, la réduction des risques, le dépistage d’infections sexuellement transmissibles, des conseils et le contrôle du niveau hormonal des personnes transgenres. Selon le résultat du test du VIH, la personne est invitée soit à suivre une thérapie antirétrovirale soit à un entretien détaillé sur la prise de la PPrE, le tout dans une atmosphère accueillante et dénuée de jugement.

La RSAT est l’une des sept organisations communautaires thaïlandaises à proposer gratuitement la PPrE par le biais de fournisseurs communautaires dans le cadre du Princess PrEP Project. À l’heure actuelle, 1 200 personnes ont accès à la PPrE dans les cliniques et les centres d’accueil de la RSAT. Le Thai Red Cross AIDS Research Centre qui jouit du soutien du Plan d’urgence du Président des États-Unis pour la lutte contre le sida par le biais du projet LINKAGES Thailand renforce sans relâche les compétences afin de garantir que le personnel communautaire de santé soit en mesure d’apporter des services liés au VIH en respectant les normes nationales.

La RSAT utilise différentes approches pour encourager la demande et la promotion de ses programmes, ainsi que pour effectuer un travail de proximité. Phubet Panpet, directeur adjoint de la RSAT, explique : « nous nous rendons dans des endroits différents comme des saunas, des complexes de loisirs, des écoles ou des universités, selon le groupe que nous ciblons pour sensibiliser à la prévention du VIH et pour inciter les personnes à se faire dépister. »

Kunpawee Isalam, membre transgenre de l’équipe de proximité de Bangkok, comprend la stigmatisation et la discrimination subies par la communauté transgenre. « Nous organisons des actions de proximité qui parlent véritablement aux personnes transgenres dans l’optique de renforcer leur confiance en elles. Beaucoup ont vraiment du mal à prendre conscience qu’elles peuvent obtenir de l’aide, elles ont peur de la discrimination. La RSAT est un lieu où elles sont en sécurité et où elles peuvent obtenir différentes options de prévention du VIH », indique-t-elle.

La RSAT utilise également les réseaux sociaux pour entrer en contact avec les jeunes gays et autres jeunes hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes. Des membres du personnel s’inscrivent sur les applications de rencontre et créent un profil afin de diffuser des informations sur le VIH. « Au début de la conversation, le membre du RSAT parle de notre clinique et invite son interlocuteur à échanger sur le thème de la prévention du VIH », explique Mongkol Jaidee qui travaille sur le terrain. « Je choisis un endroit, je regarde qui est connecté et j’envoie des messages personnels pour présenter les services fournis par notre clinique. Les réactions sont généralement positives. Il arrive souvent que les gens reviennent vers nous avec des questions et se rendent dans nos établissements les jours qui suivent. »

Et M. Linjongrat de conclure : « Par rapport à d’autres services, nous aidons les gens en cherchant ce dont ils ont besoin et ce que nous pouvons faire pour les aider. Les services dirigés par une communauté sont une stratégie qui a fait ses preuves. Ils sont un élément essentiel de la riposte au VIH en Thaïlande. »

Donner les moyens aux jeunes vivant avec le VIH de devenir acteurs et actrices de changement en Thaïlande

23 janvier 2020

24 000 jeunes environ entre 15 et 24 ans vivent avec le VIH en Thaïlande. En 2018, ces jeunes représentaient près de la moitié des 6 400 nouvelles infections au VIH dans le pays.

La Thaïlande a réalisé d’énormes progrès dans sa riposte au sida, notamment en intégrant la gratuité de la thérapie antirétrovirale à sa couverture sanitaire universelle. Toutefois, les ados et les jeunes vivant avec le VIH n’ont souvent pas accès aux soins ou manquent de soutien pour suivre leur traitement, notamment face aux difficultés comme l’autostigmatisation, la stigmatisation et la discrimination ou encore le passage entre les soins destinés aux enfants et ceux pour les adultes.

Il y a trois ans, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et d’autres partenaires nationaux sous l’égide du Thai Network of People Living with HIV ont créé le Thai Network of Youth Living with HIV afin d’apporter une solution à cette situation. L’objectif principal de ce réseau consiste à autonomiser les ados et les jeunes vivant avec le VIH afin d'en faire les acteurs et les actrices des changements souhaités dans leur vie. Ce programme a été conçu pour fournir des services d’informations, des formations portant sur des compétences de la vie courante, ainsi qu’une assistance par et pour les ados et les jeunes vivant avec le VIH.

Kritthanan Ditthabanjong, un de ses premiers membres actifs, est à présent le responsable de la communication institutionnelle du réseau. Cet étudiant en journalisme travaille également en tant qu’éditeur de contenu pour des sites Internet et des magazines en Thaïlande. Il est devenu une figure emblématique de la jeunesse et représente le réseau lors d’évènements publics et dans les médias. Il se fait ainsi le relais des besoins des jeunes vivant avec le VIH.

« J’ai révélé publiquement mon statut sérologique, car je souhaitais que mon expérience profite à d’autres, mais je voulais aussi apporter aux jeunes les informations nécessaires pour mener dignement une vie en bonne santé. Je n’ai pas peur de m’exposer, car je sais que mes proches et ma communauté me soutiennent », déclare-t-il.

Grâce à l’aide technique et financière de l’UNICEF et d’autres partenaires, mais aussi par le biais de nombreuses plateformes et stratégies, le réseau apporte un soutien psychologique en cas de diagnostic positif et des informations contre l’autostigmatisation. Il réfléchit également à des compétences d’adaptation et crée un réseau de soutien pour lutter contre la stigmatisation et la discrimination. « Les jeunes vivant avec le VIH ont besoin d’un soutien psychologique et d’une communauté en qui ils peuvent avoir confiance », continue M. Ditthabanjong.

Le réseau forme des jeunes responsables pour conseiller des personnes de leur âge vivant avec le VIH et les mettre en contact avec les établissements de santé, les hôpitaux et les services dirigés par les communautés afin de leur fournir un traitement et des soins contre le VIH. Ces jeunes responsables accompagnent aussi les jeunes vivant avec le VIH à leurs rendez-vous médicaux et vont les voir ensuite à leur domicile afin de faciliter le suivi de leur traitement.

Par ailleurs, le réseau utilise les médias sociaux pour entrer en contact avec les jeunes, leur apporter des informations sur le VIH et les aider à s’accepter. Des initiatives comme la campagne en ligne Growing UP with HIV créent des espaces où les jeunes peuvent poser librement leurs questions sur différents thèmes tels que la prévention du VIH ou les rapports sexuels sans risque et dire ce qu'ils pensent.

« Growing Up with HIV permet aux jeunes de faire partie de notre communauté et de leur faire sentir que nous sommes à leurs côtés », poursuit M. Ditthabanjong.

M. Ditthabanjong s’engage également avec l’UNICEF dans d’autres campagnes et actions menées sur les réseaux sociaux à destination de la jeunesse thaïlandaise. Elles lui permettent aussi de faire entendre la voix et le point de vue des jeunes vivant avec le VIH. Il a récemment fait partie de Dare to Dream, une campagne publique créée par l’UNICEF en Thaïlande dont l’objectif était de permettre aux jeunes d'exprimer leur opinion sur l’éducation et sur leurs besoins pour réussir le passage à l’âge adulte. « Avec nous, M. Ditthabanjong s’est transformé en quelques années d’un adolescent timide qui n’osait pas parler et cherchait toujours du regard l’approbation de son conseiller en un exemple pour les jeunes de son pays lorsqu’il est devenu l’un des neuf visages de la campagne Dare to Dream », indique un membre de l’UNICEF.

Et M. Ditthabanjong de conclure : « Un jour, j’ai donné une interview sur les réseaux sociaux. J’en étais à peine sorti que je recevais déjà un message d’un jeune qui venait d’être diagnostiqué avec le VIH. « Ma mère et mon père me rejettent et j’ai envie de mettre fin à mes jours », écrivait-il. Je lui ai téléphoné, nous nous sommes rencontrés et je l’ai convaincu de rejoindre notre réseau. Aujourd’hui, il va bien. Notre réseau change la vie des gens. »

Soutenir l’engagement des communautés dans la riposte au sida en Thaïlande

20 janvier 2020

Le bureau de l’ONUSIDA en Thaïlande rassemble une petite équipe de trois personnes à Bangkok. Orawan Bettenhausen, assistante administrative, fait partie de cette équipe depuis près de 20 ans. « Intégrer la famille de l’ONUSIDA a favorisé mon émancipation et a fait de moi la personne que je suis aujourd’hui. J’ai eu beaucoup de chance d’avoir eu des directeurs pays qui m’ont formée, ainsi que de formidables collègues et partenaires, aussi bien au sein de l’ONUSIDA qu’en dehors, qui m’ont offert leur aide et leur soutien, et qui ont été une source d’inspiration », explique-t-elle.

Mme Bettenhausen se souvient avoir rencontré un représentant séropositif du Thai Network of People Living with HIV dès ses premières semaines au sein de l’ONUSIDA. « Je lui ai posé des questions sur sa vie. Quand il a fini de me raconter, il était en larmes », explique-t-elle. « Contre toute attente, il m’a dit que ni lui ni aucune autre personne vivant avec le VIH ne souhaitait que j’éprouve de la compassion pour eux. Ils voulaient juste être acceptés pour eux-mêmes. Il m’a appris ce jour-là quelque chose de fondamental. J’ai ensuite fait la promesse de travailler pour les personnes vivant avec le VIH et affectées par le virus. »

Année après année, elle se tient aux côtés des différents directeurs pays et de l’équipe. Elle soutient leurs efforts pour amener les communautés, les organisations de la société civile et les personnes vivant avec le VIH à s’impliquer et à s’engager efficacement dans la riposte au sida. « J’ai vraiment l’impression que mon rôle d’assistante administrative me permet d’aider de différentes manières nos partenaires dans les communautés. Je peux par exemple contribuer à la concrétisation de projets communs, apporter une aide logistique afin de garantir que les organisations communautaires puissent participer à des évènements régionaux et nationaux, mais aussi servir d’interprète du thaï vers l’anglais et vice-versa. J’ai l’impression de permettre aux membres des organisations communautaires de surmonter la barrière de la langue, d’être présents là où sont prises les décisions et d’y faire entendre leurs besoins, mais aussi de présenter leur action hors de Thaïlande », explique-t-elle.

Mme Bettenhausen a été témoin des changements importants apportés à la riposte au sida du royaume. Elle se souvient entre autres que l’ONUSIDA a mis en place des projets en collaboration avec des organisations de la société civile. L’ONUSIDA a encouragé le dialogue entre les législateurs, les personnes mettant en place les programmes liés au VIH et des représentants des communautés à une époque où la stigmatisation et la discrimination envers les personnes séropositives et les populations clés étaient extrêmement problématiques dans le pays.

Depuis 2015, la Thaïlande a mis en place le 3-by-4-Package for Stigma-Free Health Facilities qui inclut des programmes complets visant à lutter contre les barrières à l’accès aux services de santé et à supprimer ces obstacles. En 2019, le pays a dévoilé le Thailand Partnership for Zero Discrimination. Il s’agit d’une stratégie qui va au-delà des situations de santé et qui s’applique à des domaines comme le lieu de travail et le système éducatif. L’ONUSIDA a été impliquée dès les prémices de cette initiative. L’organisation a apporté une assistance technique pour ce qui est de l’élaboration d’une stratégie zéro discrimination, ainsi que d’un plan de suivi et d’évaluation, mais aussi de sa réalisation concrète dans un effort commun avec le gouvernement thaï et la société civile.

« J’ai contribué à la réussite de ce projet en apportant un soutien indéfectible à ma directrice pays. Elle a en effet joué un rôle essentiel pour établir le lien entre les acteurs de différents secteurs et les rassembler, mais aussi en s’assurant que les organisations communautaires étaient toujours impliquées et avaient voix au chapitre. Aujourd’hui, nos homologues dans le gouvernement travaillent main dans la main avec les organisations de la société civile. Tous les acteurs incontournables sont sur un pied d’égalité et se retrouvent pour prendre des décisions allant dans une même direction. C’est un bel exemple de partenariat ! », s’exclame Mme Bettenhausen.

Mme Bettenhausen a grandi dans le nord de la Thaïlande. Très jeune, elle s’est découvert une passion pour le secteur public en regardant son père améliorer la vie de paysans et de leurs familles. Il travaillait en effet en tant que conseiller pour le gouvernement allemand et pour des donateurs dans le développement rural. Plus tard, au cours de son master en management, elle se rend compte qu’elle n’est pas faite pour le monde des affaires et elle prend la décision d’écrire son mémoire sur le Human Development Centre, une organisation non gouvernementale œuvrant dans le bidonville de Klong Toey à Bangkok. Au cours des deux mois qu’elle passe dans ce quartier à recueillir des données pour son travail de fin d’études, elle découvre la pauvreté en milieu urbain, la toxicomanie, la maltraitance des enfants et le VIH. « Après avoir décroché mon diplôme, j’ai travaillé dans le milieu des affaires, mais j’ai compris que ma vocation était de suivre les pas de mon père et de m’engager pour les autres. Le destin a bien fait les choses et j’ai obtenu un poste auprès de l’ONUSIDA », raconte-t-elle.

La plus grande difficulté à laquelle est confrontée Mme Bettenhausen dans le bureau de Thaïlande est de ne pas se laisser submerger par ses tâches diverses et variées, car le travail administratif est bien souvent chronophage. Elle est néanmoins persuadée qu’être consciencieuse permet de faire une différence. Son travail est non seulement indispensable pour garantir que le bureau de l’ONUSIDA en Thaïlande puisse remplir sa mission, mais il est également essentiel pour parvenir à l’objectif de mettre un terme au sida à l’horizon 2030.

Inverser la tendance de l’épidémie de VIH en Thaïlande

17 janvier 2020

C’est un matin comme les autres au Thai Red Cross AIDS Research Centre, une organisation de la société civile sous l’égide de la Société de la Croix-Rouge thaïlandaise. Dans un bâtiment situé au cœur de Bangkok, du personnel infirmier et médical, des conseillers et des éducateurs affectés par le VIH vaquent à leurs occupations quotidiennes. L’équipe apporte des services liés au virus aux 200 personnes qui se rendent chaque jour à la Thai Red Cross Anonymous Clinic, que ce soit pour une visite médicale, un test du VIH ou obtenir des services de prévention du VIH, y compris des préservatifs et la prophylaxie pré-exposition (PPrE).

Praphan Phanuphak, directeur et cofondateur du centre en 1989, se souvient avoir découvert le premier cas de VIH en Thaïlande alors qu’il avait 35 ans. « C’est arrivé par hasard. Quelqu’un a conseillé à un patient de me consulter afin de connaître la raison de sa mycose récurrente », se souvient-il. « En février 1985, ce patient était admis avec une pneumocystose. Le même mois, un autre homme était transféré vers notre hôpital avec une cryptococcose généralisée. Tous deux étaient diagnostiqués avec le VIH. Depuis lors, je dédie ma vie au traitement des personnes vivant avec le VIH et au développement de solutions pour élargir l’accès aux services dans le pays. »

M. Praphan se souvient qu’au début de l’épidémie, la riposte en Thaïlande était confrontée à plusieurs problèmes. À cette époque, la législation thaïe exigeait que les hôpitaux fournissent au ministère de la Santé publique le nom des personnes diagnostiquées avec le VIH, ce qui a contribué à renforcer la stigmatisation et la discrimination de cette population. En réponse, la Croix-Rouge thaïlandaise a fondé la Thai Red Cross Anonymous Clinic, la première clinique anonyme d’Asie, et a demandé au gouvernement thaï de supprimer cette loi relative au signalement des personnes séropositives. L’Anonymous Clinic demeure le centre de dépistage volontaire le plus connu du pays.

« Jusqu’au début de l’année 2000, les antirétroviraux n’étaient pas disponibles dans les établissements de santé publique de Thaïlande et beaucoup de séropositifs ne pouvaient pas se permettre de les acheter », explique M. Praphan. Il indique que, en 1996, le Thai Red Cross AIDS Research Centre a été le premier établissement à fournir gratuitement des antirétroviraux dans le cadre des essais cliniques de la HIV Netherlands–Australia–Thailand Research Collaboration.

« Une lueur d’espoir est enfin apparue après beaucoup d’années de revers amers. Pour cela, je remercie Son Altesse Royale, Princesse Soamsawali, qui a été à nos côtés en 1996 pour créer un fonds destiné à la prévention de la transmission de la mère à l’enfant du VIH. Cela a vu le jour plusieurs années avant que le gouvernement thaï ne lance avec succès son programme de prévention », continue M. Praphan.

Au cours des ans, la riposte au sida en Thaïlande a changé du tout au tout. En 2006, le royaume a intégré à sa stratégie de couverture sanitaire universelle les services liés au VIH, notamment la thérapie antirétrovirale. Depuis 2014, la Thaïlande fournit une thérapie antirétrovirale à tous, peu importe le taux de CD4. Toute personne séropositive peut avoir accès gratuitement à un traitement qui lui est proposé directement après le diagnostic.

Toutefois, beaucoup ne commencent une thérapie antirétrovirale que sur le tard. « Nous avons les médicaments, mais beaucoup de cas ne sont pas diagnostiqués suffisamment rapidement », regrette M. Praphan. Malgré des progrès sensationnels, l’épidémie de VIH n’est pas jugulée en Thaïlande. Le VIH continue de toucher durement les populations clés : en 2018, près de 50 % des nouvelles infections concernaient les gays et autres hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes. Le faible taux de dépistage du VIH parmi les populations clés est lié à l’acceptabilité des services ainsi qu’à la stigmatisation et à la discrimination qui entravent l’accès au diagnostic, à la prévention et aux soins associés au VIH.

« D’expérience, le meilleur moyen de détecter et de diagnostiquer suffisamment tôt les personnes séropositives consiste à aider les populations clés à entrer en contact avec leurs membres afin que ces derniers viennent se faire dépister dans les centres d’accueil pour le VIH », explique M. Praphan. Sa lutte en faveur d’un amendement de la loi thaïlandaise autorisant aux prestataires communautaires certifiés issus de populations clés de fournir un certain nombre de services liés au VIH a porté ses fruits.

La stratégie du Thai Red Cross AIDS Research Centre consiste à réaliser des projets pilotes afin de fournir des preuves aux planificateurs et aux législateurs au niveau national. Ces données jettent la base à l’acceptation et au déploiement d’innovations au niveau national.

Au titre de pionnier auprès des populations clés, le centre offre depuis 2014 la PPrE aux personnes exposées à un risque élevé de VIH par le biais de projets comme le Princess PrEP Programme. En octobre 2019, la Thaïlande a intégré la PPrE au sein de son catalogue de prestations fournies par la couverture sanitaire universelle dans le cadre d’une phase pilote visant à élargir cette méthode à tout le pays.

M. Praphan est persuadé que les législateurs et les personnes mettant en place les programmes doivent comprendre que « nous ne pouvons pas continuer à faire comme avant. En Asie et dans la zone pacifique, plusieurs pays ont toujours une attitude sceptique ou conservatrice vis-à-vis de la promotion de stratégies nécessaires pour inverser la tendance de l’épidémie du VIH. » Il pense qu’au rythme actuel la région n’atteindra pas les objectifs 90–90–90 d’ici 2020. « Nous devons trouver de nouvelles approches et nous inspirer de l’action d’autres pays. Ainsi, nous arriverons plus rapidement à notre objectif de mettre un terme au sida en tant que menace pour la santé publique. »

Reconnaissance des résultats obtenus par le Centre de recherche sur le sida de la Croix-Rouge thaïlandaise

02 mai 2019

Le Centre de recherche sur le sida de la Croix-Rouge thaïlandaise (TRC-ARC) est à l’avant-garde de la riposte au VIH depuis le début de l’épidémie, lorsque son directeur, Praphan Phanuphak, diagnostique en 1985 le premier cas de VIH du pays. Depuis lors, il n’a cessé de développer et de promouvoir des approches de prévention et de traitement innovantes, notamment la prophylaxie pré-exposition (PPrE), le traitement antirétroviral précoce et les services de santé dirigés par les populations clés.

Situé à Bangkok, capitale de la Thaïlande, le TRC-ARC est une organisation fonctionnant sous l’égide de la Croix-Rouge thaïlandaise. La Croix-Rouge thaïlandaise est l’un des chefs de file de la riposte au VIH dans le pays, grâce à des projets mis en œuvre en collaboration avec des partenaires et financés par l’intermédiaire du Plan présidentiel américain d’aide d’urgence à la lutte contre le sida (PEPFAR).

Depuis fin 2014, le TRC-ARC propose la PPrE aux personnes davantage exposées au risque d’infection à VIH, à travers des projets tels que le programme de PPrE de la Princesse, qui bénéficie d’un fort soutien de la part de Sa Majesté royale la Princesse Soamsawali. Ce programme fournit des services de PPrE gratuits par l’intermédiaire d’organisations communautaires telles que la Fondation SWING (Service Workers in Group), l’association Rainbow Sky Association of Thailand, Mplus, CAREMAT et SISTERS. Le TRC-ARC propose également aux membres de ces groupes communautaires une formation complète sur la prestation de soins de santé, le financement durable, l’évaluation et le contrôle de la qualité.

Depuis 2017, le TRC-ARC propose aussi le traitement antirétroviral précoce afin d’améliorer le maintien des soins et l’observance du traitement. Les personnes diagnostiquées séropositives au VIH se voient prescrire deux semaines de médicaments pour commencer, puis elles sont redirigées vers d’autres établissements de santé pour la poursuite de leur traitement.

Autre résultat très important, la création de la Tangerine Clinic, premier dispensaire du pays à proposer des soins de santé et des conseils adaptés aux personnes transgenres. Cette clinique est gérée par des personnes transgenres, avec un personnel composé de professionnels de santé sensibilisés à la dimension de genre. Elle fournit des services de santé sexuelle et reproductive, des conseils psychosociaux, des traitements hormonaux et des conseils sur ces traitements, ainsi que des services de dépistage du VIH et de prise en charge pour le traitement.

Lors de sa récente visite en Thaïlande, le Directeur exécutif de l’ONUSIDA, Michel Sidibé, a rendu hommage au travail de M. Praphan et du TRC-ARC à l’occasion d’une manifestation organisée par l’ONUSIDA, à laquelle ont participé des représentants du Ministère thaïlandais de la Santé publique, du Ministère thaïlandais des Affaires étrangères, du PEPFAR, d’USAID, des partenaires de développement des Nations Unies et des organisations de la société civile.

« Depuis plus de 30 ans, le Centre de recherche sur le sida de la Croix-Rouge thaïlandaise joue un rôle clé dans le développement et la promotion d’approches de prévention et de traitement du VIH innovantes et efficaces », a déclaré M. Sidibé. « Sa contribution va au-delà des frontières de la Thaïlande, car elle sert de catalyseur du changement dans toute la région Asie-Pacifique ».

M. Praphan a remercié l’ONUSIDA pour sa reconnaissance des résultats obtenus par le TRC-ARC et déclaré que le travail de ce dernier ne cesserait pas jusqu’à la fin de l’épidémie de sida. « J’accepte cette reconnaissance au nom de toutes les personnes qui travaillent avec moi à la Croix-Rouge thaïlandaise et au sein de la communauté pour faire en sorte que personne ne soit laissé pour compte. Nous avons démontré comment la science, intégrée au niveau communautaire, peut étendre l’accès à la santé aux groupes de personnes les plus marginalisés ».

La Thaïlande lance une nouvelle stratégie nationale pour mettre fin à l’épidémie de sida d’ici à 2030

15 septembre 2017

Le Ministère de la Santé publique thaïlandais a présenté sa nouvelle stratégie nationale de lutte contre le sida 2017-2030, qui contient une feuille de route pour en finir avec l’épidémie de sida comme menace de santé publique en Thaïlande d’ici à 2030. Narong Pipatanasai, Vice-Premier Ministre et Président du Comité national de lutte contre le sida, a animé le lancement dans les locaux du complexe gouvernemental à Bangkok, en Thaïlande, le 13 septembre.

Ce plan sur 13 ans est la traduction pour la Thaïlande des derniers engagements internationaux et vise à assurer une riposte efficace et rentable à fort impact contre le VIH. Un rapport récent de l’ONUSIDA sur l’épidémie mondiale de sida indique que le nombre annuel de nouvelles infections à VIH a chuté de 50 % en Thaïlande entre 2010 et 2016, la plus forte baisse de tous les pays de la région Asie-Pacifique.

À l’occasion de ce lancement, 19 représentants de ministères et agences gouvernementales ont signé un engagement en faveur de la fin du sida. Deirdre Boyd, Coordinatrice résidente des Nations Unies en Thaïlande, a félicité le gouvernement pour cette stratégie et Apiwat Kwangkaew, Vice-président du Réseau thaïlandais des personnes vivant avec le VIH, a insisté sur la nécessité de veiller à l’absence de stigmatisation envers les personnes vivant avec le VIH, de manière à ce qu’elles puissent accéder aux services essentiels. Le Vice-Premier Ministre a admis que les agences gouvernementales étaient incapables d’atteindre efficacement les populations clés sans l’appui des groupes communautaires. Il a expliqué que malgré l’absence de collaboration importante entre les principaux partenaires dans la lutte contre d’autres maladies, la collaboration était une des marques de fabrique de la riposte au VIH.

L’objectif de la stratégie est de poursuivre la baisse des nouvelles infections à VIH de 6 500 à moins de 1 000, la diminution des décès dus au sida de près de 13 000 à moins de 4 000 et la réduction de la discrimination liée au VIH dans les structures de santé de 90 % d’ici à 2030.

Cette nouvelle stratégie s’engage dans une phase d’accélération en faveur d’un effort généralisé pour atteindre les objectifs mondiaux 90-90-90 d’ici à 2020, à savoir 90 % des personnes vivant avec le VIH qui connaissent leur état sérologique vis-à-vis du VIH, 90 % de ces personnes sous traitement antirétroviral et 90 % des personnes sous traitement avec une charge virale indétectable. La Thaïlande a déjà atteint le premier objectif 90.

L’épidémie du pays se concentre au sein des populations clés, en particulier les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, les personnes transgenres, les consommateurs de drogues injectables et les professionnel(le)s du sexe. Avec ce nouveau plan, le gouvernement s’engage à soutenir les programmes de prévention combinée pour les populations clés et à travailler en partenariat avec les organisations communautaires pour atteindre les personnes les plus exposées au risque dans les lieux où elles vivent et travaillent. La stratégie vise le niveau sous-national, en adaptant les programmes à des populations spécifiques dans des endroits spécifiques. Elle prévoit également d’augmenter l’intégration des services de santé anti-VIH dans les services consacrés à l’hépatite C, à la tuberculose et aux autres maladies infectieuses. 

Déclarations

« Le gouvernement s’engage à allouer un budget suffisant pour une riposte au VIH efficace. Je souhaite également souligner que des partenariats solides entre le gouvernement, la société civile, le secteur privé et les partenaires de développement permettront à la Thaïlande de devenir le premier pays d’Asie à mettre fin à l’épidémie de sida. »

Narong Pipatanasai Vice-Premier Ministre et Président du Comité national de lutte contre le sida

« Nous ne ferons pas baisser les nouvelles infections à VIH si nous n’aidons pas les populations clés à comprendre qu’elles sont exposées au risque. Nous devons veiller à ce que les personnes puissent accéder aux services essentiels tels que le dépistage du VIH, des aiguilles et des seringues stériles et la prophylaxie préexposition. »

Apiwat Kwangkaew Vice-président du Réseau thaïlandais des personnes vivant avec le VIH

« Quand la Thaïlande réussit, elle incite les autres pays de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est à atteindre de nouveaux sommets. La Thaïlande dispose aujourd’hui d’une fenêtre d’opportunité qui va lui permettre d’atteindre la fin de l’épidémie de sida et d’encourager d’autres pays à suivre son exemple. »

Deirdre Boyd Coordinatrice résidente des Nations Unies en Thaïlande

« Au sein de la région Asie-Pacifique, la Thaïlande se distingue par ses accomplissements dans la lutte contre le sida. En l’espace d’une seule génération, le pays est passé de l’épidémie à la propagation la plus rapide d’Asie à l’épidémie la plus lente. Ce n’est pas un hasard. C’est grâce à l’engagement, aux ressources et à l’innovation qui sont les marques de fabrique des efforts de la Thaïlande dans la lutte contre le VIH. »

Patchara Benjarattanaporn Directrice nationale de l’ONUSIDA en Thaïlande

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