Reportage

Bombay met un coup d’accélérateur à sa riposte au sida en prenant la tête des innovations pour en finir avec l’épidémie d’ici à 2030

19 avril 2018

La croissance démographique et l’urbanisation galopante, alimentées par une immigration soutenue et une mobilité qui s’accélère, provoquent des changements rapides dans les schémas socioéconomiques et comportementaux des habitants des grandes métropoles.

Bombay, qui compte 12 millions d’habitants, a été l’une des premières villes à se lancer dans l’initiative Les villes s’engagent, présentée à Paris lors de l’édition 2014 de la Journée mondiale de lutte contre le sida. Depuis, elle a très vite adopté des mesures pour faire avancer les progrès vers les objectifs de traitement 90-90-90 de la stratégie Accélérer. Pourtant, aujourd’hui, le défi à relever va au-delà d’une intensification des efforts pour atteindre les objectifs 90-90-90. Les actions visant à mettre fin à l’épidémie de sida doivent aussi cibler une utilisation efficace de la combinaison entre prévention du VIH et élimination de la stigmatisation et de la discrimination qui font obstacle à l’accès universel aux services de santé.

Les 10 et 11 avril, l’organisation AIDS Control Society du district de Bombay et l’ONUSIDA ont réuni plus de soixante participants issus du gouvernement, de la communauté internationale et d’organisations de la société civile, dans le but de définir des stratégies innovantes pour étendre la couverture des services de prévention et de traitement du VIH au sein de la mégapole.

Les participants ont noté que les inégalités croissantes en milieu urbain obligeaient les gens à prendre des risques pour survivre. Les professionnel(le)s du sexe, les consommateurs de drogues injectables, les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes et les personnes transgenres (Hijras), qui sont déjà davantage exposés au risque d’infection à VIH, sont touchés de façon particulièrement négative par ces tendances.

La gentrification urbaine pousse les populations clés hors des quartiers où elles se retrouvaient auparavant, rendant la tâche des services anti-VIH plus ardue. Étant donné que ces populations sont désormais plus dispersées et cachées, les approches de prévention de proximité faisant appel à des pairs ont perdu de leur efficacité.

En réfléchissant à ces problèmes, les participants ont constaté que le changement apportait aussi ses opportunités. Une compilation plus systématique des données et une analyse détaillée ont permis d’identifier les lieux et les populations où le risque et la vulnérabilité étaient les plus importants. Selon les dirigeants de la ville, ces données et une meilleure compréhension permettent d’affiner leur approche des actions en matière de prévention du VIH. De nouveaux ensembles de services conçus à partir des profils des nouveaux comportements à risque émergents sont en cours de planification.

Pour accélérer encore davantage la riposte au sida, plusieurs nouvelles approches sont en cours de mise en place. Le dépistage du VIH à base communautaire permet d’accélérer le diagnostic et le traitement des personnes vivant avec le VIH. De même, dans les quartiers pauvres de plus en plus étendus, des camions mobiles proposent des services de dépistage du VIH et offrent à un plus grand nombre de personnes la possibilité de connaître leur statut vis-à-vis du VIH.

Alors que les plates-formes des réseaux sociaux s’avèrent être un moyen rentable d’améliorer la sensibilisation au VIH et de mettre les gens en relation avec les services de prévention et de traitement, les autorités de Bombay sont convaincues que des stratégies de communication plus innovantes sont également nécessaires. Elles prévoient de se servir des réseaux sociaux et des médias de masse pour mobiliser les appuis afin de « normaliser » le sida en tant que maladie chronique et de prévenir les nouvelles infections à VIH. Des « champions » du VIH cibleront tout un éventail de publics différents, notamment les adolescents et les jeunes, afin d’amplifier les messages de prévention du VIH.

Tous les participants ont admis que les efforts visant à élargir l’accès aux services anti-VIH doivent être menés à un rythme plus rapide car « il n’y a pas de temps à perdre » pour en finir avec le sida d’ici à 2030.