CIV

La réduction des risques pour les toxicomanes continue en Côte d’Ivoire au cours de la COVID-19

26 juin 2020

Il est 10h du matin à Abidjan en Côte d’Ivoire.

Comme chaque jour, Arouna Bakari (nous avons changé son nom), masque sur le visage, se lave les mains avant d’entrer dans ce que les toxicomanes appellent un fumoir, un de ces lieux de consommation ouverte de drogues à Abidjan. Il vérifie que le lavabo placé en face du fumoir fonctionne correctement. Après, il commence à travailler et à distribuer des équipements de prévention contre la COVID-19 aux personnes présentes.

M. Bakari travaille pour Parole Autour de la Santé (PAS), une organisation communautaire composée d'(ex)toxicomanes, de leurs proches et de spécialistes des sciences sociales. La PAS gère la première « communauté thérapeutique » d’Afrique de l’Ouest, un programme d’hébergement mixte destiné aux consommateurs et consommatrices de drogues.

Depuis sa création en Côte d’Ivoire en 2016, la PAS s’occupe de la santé des toxicomanes par le biais de la réduction des risques et des services liés à la lutte contre le VIH, la tuberculose, les infections sexuellement transmissibles et l’hépatite. Depuis octobre 2019, grâce à un financement de l’OSIWA (l’Open Society for West Africa), la PAS a consolidé ses activités en mettant l’accent sur le respect des droits humains des toxicomanes qui forment une communauté encore extrêmement stigmatisée et discriminée, ainsi que sur leur accès aux services de santé. C’est ce qui explique pourquoi M. Bakari organise aussi des formations pour le personnel de santé et de sécurité, ainsi que pour les journalistes en plus de travailler dans les fumoirs.

Des programmes de réduction des risques existent déjà depuis plusieurs années en Côte d’Ivoire. Des organisations communautaires ont vu le jour et collaborent avec le programme national contre le sida, les institutions nationales responsables de la législation sur les drogues et l’organisation non gouvernementale internationale Médecins du Monde.

La pandémie de COVID-19 et les restrictions de déplacement imposées pour la juguler ont tout d’abord paralysé l’action de la PAS, mais l’organisation a très vite retrouvé ses marques pour continuer à fournir ses services.

« Les toxicomanes ont remarqué l’absence sur le terrain d’associations ou d’organisations non gouvernementales malgré le fait que la consommation de drogues se concentre à certains endroits et que les toxicomanes continuent de partager leur matériel (pipes à crack, joints, cigarettes, seringues, aiguilles) avec le risque d’infection au VIH, à l’hépatite et à la tuberculose qui s’ensuit. Avec l’arrivée de la COVID-19, les usagers et usagères de drogues ont aussi perdu tout accès aux informations et à un équipement de prévention fiables pour lutter contre ce nouveau défi sanitaire, » explique Jérôme Evanno, l'un des membres fondateurs de la PAS.

Ainsi, la PAS a décidé d’aller chercher et de distribuer du matériel de prévention à la COVID-19 et de poursuivre son travail de réduction des risques. Le personnel de l’association a suivi une formation sur la prévention de la COVID-19. De plus,  la PAS a produit un vidéoclip en nouchi sur l’importance de bien se laver les mains. Le nouchi est l’argot ivoirien utilisé comme langue vernaculaire dans les fumoirs.

Une étude au sein de la communauté a été menée afin de connaître le point de vue des toxicomanes à l’heure de la COVID-19 et de comprendre leurs peurs et besoins spécifiques face au nouveau coronavirus. Les conclusions et les recommandations tirées de l’enquête ont été communiquées aux partenaires pour militer et adapter leurs programmes en prenant en compte les attentes et les besoins des consommateurs et consommatrices de drogues.

Afin de réduire le risque d’épidémie de COVID-19 en prison, la PAS demande également la libération de personnes incarcérées et la distribution de matériaux de prévention du coronavirus aux personnes détenues dans l’infirmerie de la prison d’Abidjan.

Notre action

COVID-19 et VIH

Investir dans les communautés pour faire la différence en Afrique occidentale et centrale

09 octobre 2019

Plus de 5 millions de personnes vivent avec le VIH en Afrique occidentale et centrale, la région accuse un retard pour parvenir à l’objectif de mettre fin au sida d’ici 2030. Chaque jour, on y recense plus de 760 nouvelles contaminations et seulement 2,6 millions des 5 millions de personnes porteuses du virus suivent un traitement.

Un désintéressement de la classe politique, des systèmes de santé fragiles et un faible soutien accordé aux organisations citoyennes, auxquels viennent s’ajouter des barrières telles que la pénalisation liée au VIH, sont les principaux obstacles à toute amélioration. Un plan de rattrapage régional vise à aider la région à combler son retard pour atteindre son objectif de tripler le nombre de personnes suivant une thérapie antirétrovirale d’ici 2020 et de contrôler l’épidémie. Même si des progrès sont faits, leur rythme reste trop lent. La situation des enfants est particulièrement préoccupante dans cette région : seulement 28 % des moins de 15 ans vivant avec le VIH ont accès à une thérapie antirétrovirale.

« Nous avons besoin de réglementations et de programmes qui mettent l’accent sur les personnes et non les maladies. Cela permettra d’impliquer totalement les communautés dès les premières phases de conception, d’élaboration et de réalisation des stratégies de santé », a expliqué Gunilla Carlsson, Directrice exécutive par intérim de l’ONUSIDA, lors de son allocution au cours de la 6e Conférence de reconstitution des ressources du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme organisée en France à Lyon les 9 et 10 octobre.

En effet, les exemples d’investissements réussis dans les communautés ne manquent pas. « La riposte est plus rapide et efficace lorsqu’elle est menée par les personnes qui en ont le plus besoin », a indiqué Jeanne Gapiya qui vit avec le VIH depuis de nombreuses années et est à la tête de l’organisation non gouvernementale ANSS au Burundi.

Le dépistage et la prévention du VIH sont plus efficaces, en particulier parmi les groupes marginalisés, lorsqu’ils sont offerts par les communautés. « La plupart des personnes dépistées par les communautés le faisaient pour la première fois, ce qui illustre bien l’importance unique et cruciale des organisations citoyennes », a expliqué Aliou Sylla, directeur de Coalition Plus Afrique.

L’un des défis fondamentaux de la région consiste à réduire le nombre de nouvelles infections parmi les enfants et de garantir que les femmes accèdent aux services dont elles ont besoin. Les réseaux de mères séropositives qui s’entraident pour rester en bonne santé et pour éviter la transmission du VIH de la mère à l’enfant constituent un moyen efficace d’améliorer la santé aussi bien des mères que des enfants.

« Notre stratégie reposant sur les communautés fonctionne. Les endroits où nous sommes présents ont atteint l’objectif de zéro nouvelle infection au VIH parmi les enfants et tous les enfants qui viennent chez nous suivent un traitement », a indiqué Rejane Zio de Sidaction.

Le financement reste toutefois un problème. Même si les ressources totales allouées à la riposte au sida ont augmenté et que le VIH reste le thème prioritaire du développement de l’aide sanitaire, les investissements nationaux ne représentent toujours que 38 % des ressources disponibles pour lutter contre le VIH en Afrique occidentale et centrale, contre 57 % dans le monde entier. L’accélération de la riposte régionale nécessite d’intensifier les investissements nationaux et de renforcer simultanément l’aide apportée par les donateurs internationaux. Bintou Dembele, directrice exécutive d’ARCAD-Sida au Mali, a expliqué : « Les communautés disposent de l’expertise, mais les fonds nous manquent pour satisfaire les besoins. »

Les stratégies impliquant la base de la société dans la région jouissent d’un support croissant. Reconnaissant l’importance des efforts menés par les communautés, Expertise France et l’Institut de la Société Civile pour la Santé et le VIH en Afrique de l’Ouest et du Centre ont annoncé un nouveau partenariat, le 9 octobre. « L’institut réunit 81 organisations de 19 pays. Sa mission consiste à améliorer l’influence politique au niveau national et international, ainsi qu’à galvaniser l’expertise de la société civile dans la réalisation des programmes. Ce partenariat attire l’attention sur notre contribution essentielle », a déclaré Daouda Diouf, directeur d’Enda Santé et président du comité de direction de l’institut. « La situation en Afrique de l’Ouest et centrale reste une priorité. Il est indiscutable que les stratégies impliquant les communautés offrent plus de souplesse et sont mieux adaptées pour apporter une réponse aux pandémies », a ajouté Jérémie Pellet d’Expertise France.

L'adoption d'une approche mettant en avant les individus figure au cœur des réformes régionales. On assiste à un renforcement de la volonté régionale d’accélérer la riposte et de renforcer les stratégies communautaires éprouvées. Cela donne espoir en l’avenir pour ce qui est de la lutte contre l’épidémie du VIH en Afrique occidentale et centrale.

La Côte d’Ivoire fait part d’une nouvelle volonté de s’attaquer au problème des frais pour les usagers des services anti-VIH

16 avril 2019

Le gouvernement ivoirien a fait part de son engagement visant à faire cesser la facturation de l’accès aux services de dépistage et de traitement du VIH pour les usagers, en déclarant qu’il allait appliquer rigoureusement les décisions annoncées précédemment visant à éviter que les personnes vivant avec le VIH ou touchées par le virus soient obligées de payer des frais.

Une note diffusée par le Ministère de la Santé a rappelé à tous les prestataires de services que les frais liés aux services de dépistage et de traitement du VIH ne devaient pas être facturés aux personnes qui accèdent à ces services. Cette directive s’applique à tous les services destinés aux femmes enceintes et allaitantes, à tous les services de dépistage du VIH, aux tests de détection de la charge virale et à la prescription de médicaments antirétroviraux pour les personnes vivant avec le VIH.

Cette directive rappelle également aux prestataires de services que les enfants de moins de 15 ans doivent avoir librement accès aux services de santé et que les jeunes femmes âgées de 15 à 24 ans doivent avoir librement accès aux soins de santé primaires, au dépistage du VIH et aux services de planification familiale.

Dans plusieurs pays, le problème des frais facturés aux usagers a été décrit comme un obstacle majeur au dépistage du VIH, au traitement des personnes vivant avec le VIH et au maintien des personnes dans le parcours de soins et de traitement. 

L’engagement renouvelé de la Côte d’Ivoire dans la résolution du problème de ces frais est le résultat de discussions entre le Président de la Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara, et l’ancien Président du Botswana, Festus Mogae, qui a visité le pays au mois de mars en sa qualité de Président des Champions for an AIDS-free generation en Afrique.

Suite à ces entretiens, le gouvernement a aussi annoncé son intention d’augmenter les financements nationaux consacrés à la riposte au sida de 10 millions de dollars dans le cadre du prochain budget.

Lors de sa rencontre avec le Président, M. Mogae a félicité M. Ouattara et la Première dame, Dominique Ouattara, pour leur engagement personnel de mettre fin à l’épidémie de sida comme menace de santé publique d’ici 2030. Mme Ouattara est Ambassadrice spéciale de l’ONUSIDA pour l’élimination de la transmission de la mère à l’enfant et la promotion du traitement pédiatrique contre le VIH.

En conclusion de sa mission, M. Mogae a souligné l’importance d’accélérer la riposte à l’épidémie. « Nous ne pouvons pas nous permettre de nous reposer sur nos lauriers et laisser se perdre les immenses progrès accomplis jusqu’ici. Si nous nous arrêtons maintenant, nous perdrons tout ce que nous avons déjà investi et obtenu. La nation toute entière doit être mobilisée pour faire en sorte de ne laisser personne pour compte », a-t-il déclaré.

En 2017, on dénombrait 500 000 personnes vivant avec le VIH en Côte d’Ivoire, dont environ 46 % ayant accès au traitement anti-VIH.

L’ONUSIDA salue les nouvelles données probantes transmises par le Cameroun, la Côte d’Ivoire et l’Afrique du Sud concernant les progrès vers les objectifs pour 2020

22 juillet 2018

Les résultats des enquêtes en population d’évaluation de l’impact du VIH donnent un aperçu des endroits où les investissements sont nécessaires

AMSTERDAM/GENÈVE, 22 juillet 2018 — Le Cameroun, la Côte d’Ivoire et l’Afrique du Sud ont publié de nouvelles données d’enquête sur les progrès vers les objectifs pour 2020. Les enquêtes en population d’évaluation de l’impact du VIH (PHIA) réalisées par le Cameroun et la Côte d’Ivoire, de même que l’étude menée par l’Afrique du Sud, ont toutes porté sur la connaissance de l’état sérologique vis-à-vis du VIH, les nouvelles infections à VIH, l’usage du préservatif, la circoncision masculine médicale volontaire, la couverture du traitement antirétroviral, la suppression de la charge virale et d’autres indicateurs. 

En Afrique du Sud, qui présente l’épidémie de VIH la plus importante au monde avec plus de 7 millions de personnes vivant avec le VIH et le plus large programme de traitement du monde dénombrant 4,4 millions de personnes sous traitement antirétroviral, les nouvelles données associées à des données similaires provenant d’une précédente étude indiquent que le taux de nouvelles infections à VIH chez les adultes a baissé de 40 % entre 2010 et 2017.

« Ces enquêtes sont extrêmement importantes et jouent un rôle vital pour aider les pays à faire le point sur leurs programmes de lutte contre le VIH et à les réajuster afin de s’assurer que les bons services atteignent les personnes touchées par le VIH », a déclaré Michel Sidibé, Directeur exécutif de l’ONUSIDA.

Les données des enquêtes confirment les estimations de l’ONUSIDA, qui indiquent que l’Afrique du Sud a également connu une amélioration de la couverture de traitement et qu’elle est tout près d’atteindre les objectifs de traitement 90-90-90*. Selon ces données, 85 % des personnes vivant avec le VIH connaissent leur état sérologique vis-à-vis du VIH, 71 % de ces personnes ont accès au traitement antirétroviral et 86 % des personnes sous traitement ont une charge virale indétectable.

En revanche, au Cameroun et en Côte d’Ivoire, la suppression de la charge virale chez l’ensemble des personnes vivant avec le VIH est inférieure à 50 %, en raison de la faible couverture de traitement. Ces deux pays sont loin d’atteindre les objectifs 90-90-90, avec des chiffres de 47 %, 91 % et 80 % et de 37 %, 88 % et 76 % respectivement.

La plus grande différence entre le pays d’Afrique australe et les deux pays d’Afrique centrale et occidentale est observée dans la connaissance de l’état sérologique vis-à-vis du VIH, ce qui indique que les services de dépistage du VIH doivent être massivement élargis en Afrique centrale et occidentale.

Les enquêtes PHIA délivrent des informations clés qui permettent d’identifier les caractéristiques des populations qui ne bénéficient pas des services. Au Cameroun, la suppression de la charge virale varie d’une région à l’autre de 28 à 63 %. En Afrique du Sud, moins de 50 % des enfants et des jeunes hommes (âgés de 15 à 34 ans) vivant avec le VIH présentent une charge virale indétectable (contre 67 % des femmes âgées de 15 à 49 ans). Ces données fournissent des informations critiques pour permettre aux responsables des programmes d’orienter leur riposte sur les populations et les zones géographiques qui ont le plus besoin de services.

Les enquêtes PHIA sont pilotées par l’Université de Columbia, en collaboration avec les gouvernements nationaux et avec le soutien du Plan présidentiel américain d’aide d’urgence à la lutte contre le sida. L’étude menée en Afrique du Sud a été réalisée par le Human Sciences Research Council.

90 % des personnes vivant avec le VIH qui connaissent leur état sérologique vis-à-vis du VIH, 90 % de ces personnes sous traitement antirétroviral et 90 % des personnes sous traitement ayant une charge virale indétectable.

ONUSIDA

Le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) guide et mobilise la communauté internationale en vue de concrétiser sa vision commune : « Zéro nouvelle infection à VIH. Zéro discrimination. Zéro décès lié au sida. » L’ONUSIDA conjugue les efforts de 11 institutions des Nations Unies – le HCR, l’UNICEF, le PAM, le PNUD, l’UNFPA, l’UNODC, ONU Femmes, l’OIT, l’UNESCO, l’OMS et la Banque mondiale. Il collabore étroitement avec des partenaires mondiaux et nationaux pour mettre un terme à l’épidémie de sida à l’horizon 2030 dans le cadre des Objectifs de développement durable. Pour en savoir plus, consultez le site unaids.org, et suivez-nous sur Facebook, Twitter, Instagram et YouTube.

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Lancement de la cellule de surveillance sur le VIH en Côte d’Ivoire

27 mars 2018

La Côte d’Ivoire est devenu le premier pays francophone, et le premier d’Afrique centrale et occidentale, à lancer une cellule de surveillance sur le VIH, sous la forme d’une plate-forme logicielle conçue pour appuyer une prise de décision éclairée.

Cet outil innovant vient renforcer les systèmes d’information nationaux au moyen d’une visualisation en temps réel d’informations provenant de multiples ensembles de données. Il va permettre aux dirigeants et aux responsables de programmes de prendre des décisions opportunes pour améliorer les programmes de santé et atteindre les objectifs 90-90-90, à savoir, d’ici à 2020, 90 % des personnes vivant avec le VIH devant connaître leur état sérologique vis-à-vis du VIH, 90 % de ces personnes sous traitement antirétroviral et 90 % des personnes sous traitement présentant une charge virale indétectable.

Cette cellule de surveillance est le fruit d’une collaboration entre le Ministère de la Santé et de l’Hygiène publique de Côte d’Ivoire, le Plan présidentiel américain d’aide d’urgence à la lutte contre le sida (par l’intermédiaire des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies) et l’ONUSIDA. Elle a été inaugurée par Raymonde Goudou Coffie, Ministre de la Santé et de l’Hygiène publique de Côte d’Ivoire, et Michel Sidibé, Directeur exécutif de l’ONUSIDA, le 26 mars à Abidjan.

Déclarations

« La cellule de surveillance va permettre l’utilisation en temps réel de données épidémiologiques, d’informations stratégiques et de données à base communautaire pour aider à la prise de décision. »

Raymonde Goudou Coffie Ministre de la Santé et de l’Hygiène publique de Côte d’Ivoire

« C’est uniquement grâce à un système d’information en temps réel qu’il a été possible de mettre un terme à l’épidémie d’Ebola en Côte d’Ivoire. Le développement futur de la santé dépendra de notre capacité à mettre à disposition des informations en temps réel et au niveau local. »

Michel Sidibé Directeur exécutif de l’ONUSIDA

« Je félicite l’ONUSIDA pour cette cellule de surveillance, qui va permettre d’améliorer la riposte pour pouvoir atteindre les objectifs 90-90-90. »

Laissa Ouedraogo Directrice nationale, Centres pour le contrôle et la prévention des maladies des États-Unis

La défense des droits des professionnel(le)s du sexe en Côte d’Ivoire

01 mars 2018

Chantant « akouaba » (bienvenue), un groupe de jeunes femmes se presse autour de Josiane Téty, la Directrice de Bléty, une organisation de Côte d’Ivoire dirigée par des professionnelles du sexe.

Basée à Yopougon, une banlieue d’Abidjan, Mme Téty explique que dans son centre, l’une des premières choses que font les filles entre elles, c’est de se donner des surnoms, par exemple Joie, Espoir ou Chance, car les femmes, selon elle, ont souvent besoin d’un élan de confiance et d’un sentiment de nouveau départ.

« Ici, nous prenons le temps de travailler sur l’estime de soi, pour que les filles croient en elles », explique-t-elle.

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À Bléty, la plupart des femmes sont d’actuelles ou d’anciennes professionnelles du sexe qui assurent des services de proximité, allant de la sensibilisation au VIH et à l’éducation en matière de prévention du VIH, en passant par la défense des droits des professionnel(le)s du sexe et la formation professionnelle.

« Notre objectif est de donner aux jeunes femmes des opportunités et des alternatives, de manière à ce qu’elles soient moins vulnérables », explique Mme Téty. Désignant l’une des jeunes femmes présentes, elle déclare que Bonheur s’est lancée dans des cours de comptabilité pour débutants. 

Mme Téty et les autres professionnelles du sexe ont créé Bléty en 2007, lorsqu’elles se sont rendu compte qu’elles disposaient de peu d’informations concernant leur santé ou leurs droits et qu’elles détestaient se sentir stigmatisées.

« Passer un test de dépistage du VIH ne veut pas dire que l’on vit avec le VIH, mais c’est comme ça que nous sommes perçues lorsqu’on nous voit sortir d’un dispensaire », explique-t-elle.

Elles se sont engagées à y remédier et se sont implantées au sein de la communauté. 

Marie-Louise Sery s’est installée à Abidjan pour travailler après le décès de ses parents. Peu instruite, elle a du mal à trouver du travail, et s’engage alors dans le commerce du sexe. La jeune trentenaire, coiffée de tresses, reconnaît n’avoir eu aucune idée des risques qu’elle prenait.

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« Bléty m’a sortie de cette situation », raconte Mme Sery. L’an dernier, elle est devenue l’une des pairs-éducatrices de Bléty.

La plupart du temps, explique-t-elle, les pairs-éducateurs ciblent les coins de rue animés pour parler aux professionnel(le)s du sexe, dont on estime le nombre à plus de 9 000 dans le pays. Outre la distribution de préservatifs, ils proposent également des tests de dépistage du VIH rapides et distribuent des cartes de visite avec les coordonnées des différentes antennes de Bléty, qui peuvent être contactées nuit et jour en cas d’urgence.

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« Mon travail implique d’offrir beaucoup de soutien et de main tendue », explique Mme Sery.

Le commerce du sexe n’est pas illégal en Côte d’Ivoire, mais la législation dans ce domaine est floue. Il en résulte des cas d’abus et les professionnel(le)s du sexe se retrouvent vulnérables à la violence. « Nous insistons vraiment auprès de nos amis en leur disant que ce n’est pas parce qu’ils ou elles pratiquent le commerce du sexe que cela signifie que les gens peuvent profiter d’eux », déclare Mme Téty. En cas d’abus, les personnes concernées peuvent appeler un pair-éducateur de Bléty et elles sont accompagnées au commissariat ou à l’hôpital.

Mme Téty raconte que l’une de leurs récentes victoires a été la négociation avec les médecins et les prestataires de soins de santé en vue de la délivrance gratuite de certificats médicaux, sans avoir à débourser 35 dollars de frais. La loi nationale impose la présentation d’un certificat médical pour lancer des poursuites pénales.

En 10 années d’existence, Bléty a fait son affaire des pressions de la police et des habitants en vue de changer leur attitude vis-à-vis du commerce du sexe. Bléty a éduqué les forces de police et les professionnel(le)s du sexe afin de briser le climat de méfiance entre ces deux groupes.

« Nous avons établi de bonnes relations avec la police en uniforme, mais les effectifs changent souvent, et cela peut donc devenir frustrant de devoir tout recommencer sans cesse », explique Mme Téty.

Dans l’ensemble, elle reste optimiste. Le dépistage du VIH et des infections sexuellement transmissibles chez les professionnel(le)s du sexe est en route, les avocats se sont engagés à fournir des conseils juridiques et elle voit son centre poursuivre son développement.

Devenir activiste pour en finir avec la discrimination

28 février 2018

Mis à la porte par ses parents lorsqu’ils découvrent qu’il est gay, Ezechiel Koffi n’a jamais baissé les bras.

« Mes parents m’ont dit que je leur faisais honte et que je vivais la vie d’un pécheur », raconte le jeune homme originaire de Côte d’Ivoire. Ce qui lui fait le plus de mal, ce sont les insultes de sa mère, qui lui dit qu’il n’a aucun respect pour leurs valeurs religieuses. Il les supplie de comprendre qu’il est leur fils et qu’ils devraient l’accepter tel qu’il est.

M. Koffi, âgé à l’époque de 24 ans, séjourne quelque temps auprès d’Alternative, une organisation non gouvernementale lesbienne, gay, bisexuelle, transgenre et intersexe (LGBTI) située à Abidjan, en Côte d’Ivoire, où il est alors bénévole depuis trois ans. Il continue de suivre des cours, tout en admettant qu’il lui arrive alors souvent d’avoir le ventre vide. Psychologiquement, il se sent anéanti. « C’était difficile, mais je ne pouvais plus me cacher », explique-t-il.

Grâce à l’appui de sa sœur aînée, ses parents le laissent finalement rentrer à la maison au bout de six mois. Bien qu’il ait à nouveau un toit permanent au-dessus de la tête et mange correctement, Alternative est devenu son second foyer. Depuis ce temps-là, il est entièrement engagé dans l’organisation. Devenu éducateur VIH et agent de santé communautaire, il brandit fièrement ses certificats sur son téléphone mobile.

Philippe Njaboué, le coordonnateur de projet d’Alternative, décrit l’inépuisable énergie de M. Koffi. « On peut l’appeler à toute heure de la journée ou de la nuit, il est toujours prêt à donner un coup de main et il va souvent au-delà de son rôle en intégrant des gens qui ont été rejetés ». Quand on lui demande s’il est une sorte de famille de substitution pour beaucoup de personnes LGBTI, M. Koffi sourit timidement.

Les nombreux groupes de discussion et de soutien lui ont permis, selon lui, de partager son expérience et d’aider d’autres personnes. Le garçon réservé s’est émancipé. Il n’hésite plus à révéler sa séropositivité au VIH. « Ça fait 10 ans que je vis avec le VIH », explique-t-il.

Il se souvient qu’à l’époque il ne pouvait pas toujours négocier l’utilisation d’un préservatif. Aujourd’hui, il met un point d’honneur à dire à tout le monde que le VIH est une réalité. « Utilisez des préservatifs, on peut vous aider, vous n’êtes pas seuls », s’exclame-t-il.

Il dit se sentir pleinement vivant au sein de la communauté LGBTI très soudée de la ville. « Je suis à l’aise, je peux m’exprimer et c’est épanouissant », ajoute-t-il. Mais il fronce les sourcils quand il évoque la discrimination constante que ses pairs et lui-même rencontrent au quotidien. En plus des moqueries et des doigts accusateurs, M. Koffi déclare que les commentaires homophobes sont omniprésents sur les réseaux sociaux.

« Nous méritons les mêmes droits que les autres et c’est ce qui me motive », explique M. Koffi.

M. Njaboué fait remarquer que la société, la religion et l’État jouent tous un énorme rôle dans le tabou qui entoure l’homosexualité en Côte d’Ivoire. « Un discours récent du directeur d’Alternative a été qualifié par un site web de « Discours du Roi des homosexuels », avec à la clé d’innombrables menaces de mort », raconte-t-il.

Ajoutant que ce cas n’est qu’un exemple parmi d’autres, il estime que la situation ne peut changer que si le gouvernement prend à bras-le-corps la question des droits de l’homme.

« La plupart des gens ne connaissent pas leurs droits, ni la loi, y compris un grand nombre de personnes chargées de la sécurité publique », explique M. Njaboué. « Non seulement le gouvernement doit éduquer les gens, mais il doit aussi condamner les comportements illégaux », ajoute-t-il.

Pour M. Koffi, sa visibilité lui fait prendre des risques, mais il va de l’avant. « Je veux vivre dans un monde sans discrimination fondée sur la race, la religion ou la sexualité ».

Côte d’Ivoire : imams et chefs religieux s’engagent dans la sensibilisation au VIH

19 décembre 2017

Malgré la chaleur caniculaire régnant sur Abidjan, la mosquée Salam du Plateau est restée bien fraîche lorsque les imams, les pasteurs, les curés et d’autres membres de différents groupes religieux, ainsi que des femmes, ont accueilli la délégation de l’ONUSIDA.

L’imam Djiguiba Cissé a présenté sa mosquée et déclaré que lui-même et tous les chefs religieux réunis souhaitaient se joindre à l’ONUSIDA pour promouvoir la sensibilisation au VIH.

Quarante années de recherches scientifiques et de traitement ont permis de grands progrès dans la riposte au sida, mais il est temps désormais de s’attaquer à la stigmatisation et à la discrimination, a expliqué le Directeur exécutif adjoint de l’ONUSIDA, Luiz Loures. M. Loures a rappelé qu’il avait besoin de l’aide des chefs religieux pour veiller à ce que les violences à l’encontre des femmes ne soient plus tolérées et que les hommes soient mieux informés sur le VIH.

L’imam a indiqué que la compassion était l’un des principes fondamentaux de toutes les religions et qu’il devait s’appliquer aux chefs religieux lorsqu’ils s’occupent de personnes vivant avec le VIH ou interagissent avec elles. Il a également déclaré que l’un de leurs objectifs était de promouvoir les femmes. Ce sont elles qui supportent le plus lourd fardeau vis-à-vis du VIH dans le monde et les inégalités entre les sexes en sont largement responsables. M. Cissé a souligné qu’il était indispensable de mettre un terme aux violences à l’égard des femmes et aux mutilations génitales féminines.  Les pratiques de mutilations génitales féminines sont prévalentes dans les régions du nord, du nord-est et de l’ouest de l’Afrique. Non seulement elles ne présentent aucun bénéfice sanitaire, mais elles sont douloureuses et traumatisantes et peuvent avoir des conséquences immédiates et à long terme sur la santé des filles et des femmes. L’imam a conclu son intervention devant l’assemblée sur l’implication des hommes dans la résolution de certains de ces problèmes et le fait de donner une chance aux jeunes hommes. Il a expliqué que plus de 60 % de la population de Côte d’Ivoire a moins de 25 ans et que davantage de garçons se tournent vers l’émigration ou le terrorisme parce qu’ils se sentent exclus.

En janvier 2018, sous la houlette de M. Cissé et avec l’appui de l’ONUSIDA, les chefs religieux suivront une formation de sensibilisation au VIH englobant les questions de la stigmatisation, du statut et de l’autonomisation. 

Déclarations

« Nous pouvons être des décideurs parce qu’en tant que chefs religieux, nous pouvons favoriser le changement. »

Imam Djiguiba Cissé Mosquée Salam du Plateau

« J’ai besoin de vous. Vous avez pour vous la proximité et le savoir-faire au sein de vos communautés, ce qui permettra de réduire la stigmatisation et la discrimination dans la riposte au sida. »

Luiz Loures Directeur exécutif adjoint de l’ONUSIDA

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