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Hommage au militant des droits humains Yves Yomb

17 juin 2020

Le militant camerounais des droits humains, Yves Yomb, est décédé le 15 juin 2020.

Son parcours de militant commence en 2006 dans son pays d’origine pendant une campagne médiatique virulente, qui prend pour cible les gays et autres hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes. M. Yomb décide alors de fonder avec d’autres personnes Alternative Cameroun, une des premières organisations défendant les droits humains en Afrique occidentale et centrale et plaidant pour la tolérance et l’inclusion sociale. « Nous nous sommes dit que si nous n’agissions pas, personne ne le ferait », a-t-il déclaré un jour.

Pendant plus de dix ans, M. Yomb est en première ligne de la lutte pour les droits des minorités sexuelles et des droits humains en Afrique et partout où son action le mène. En 2018, il s’exprime calmement et avec détermination lors de la présentation du rapport mondial de l’ONUSIDA en amont de la Conférence internationale sur le sida organisée en France à Paris. Il rappelle à cette occasion que la riposte au VIH est une lutte en faveur des droits humains et de la solidarité internationale qui ne souffre aucun compromis.

M. Yomb était le porte-parole d’Africagay contre le sida, le premier réseau destiné aux personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres en Afrique francophone qui œuvre pour faciliter leur accès à leurs droits et à de l’aide. Ce réseau est devenu en 2019 l’Alliance globale des communautés pour la santé et les droits (AGCS PLUS), un membre de Coalition Plus. Toujours en première ligne de la lutte, M. Yomb demande à l’ONUSIDA de renouveler son engagement envers la société civile, une initiative qui débouchera sur la création du Civil Society Institute for West and Central Africa. 

« Sans droits, les personnes les plus touchées par l’épidémie de sida ne peuvent pas avoir accès aux services de santé : c’est ce qui nourrit l’épidémie cachée contre laquelle nous nous battons. C’est ce qui alimente l’épidémie cachée contre laquelle nous nous battons », a-t-il déclaré.

« Yves Yomb était une figure emblématique. Il savait trouver des arguments qui ne laissaient personne dans l'indifférence. Je me souviens de son intervention en 2018 dans la salle Kofi A. Annan au siège suisse de l’ONUSIDA à Genève face à un parterre composé entre autres de membres de la direction et de représentant-es du coparrainage de l’ONUSIDA. Il avait plaidé pour le respect des droits humains en faisant preuve de la même ténacité que chez lui au Cameroun. Il avançait argument sur argument pour augmenter l’aide apportée à la société civile. Repose en paix, mon frère. Nous poursuivons la lutte qui nous unissait », a dit Hélène Badini, conseillère senior de soutien aux communautés régionales de l'ONUSIDA.

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République islamique d’Iran : des jeux en ligne pour lutter contre la stigmatisation et la discrimination liées au VIH

16 juin 2020

Depuis 2013, le bureau pays de l’ONUSIDA pour la République islamique d’Iran et la branche locale de l’International Federation of Medical Students’ Associations travaillent ensemble sur des solutions innovantes pouvant avoir un impact sur la riposte nationale au sida.

Par le passé, leurs collaborations ont pris la forme de campagnes de sensibilisation du public, d’ateliers pédagogiques, de visites sur le terrain et de cours d’été d’une semaine destinés aux jeunes qui se forment aux métiers de la santé.

« Les cours d’été nous ont beaucoup inspirés pour identifier avec précision notre nouvelle problématique : la lutte contre la stigmatisation et la discrimination liées au VIH », explique Aidin Parnia, l'un des fondateurs des cours d’été et d’Avecene Consultancy.

Fondée par d'ex-stagiaires des cours d’été, Avecene Consultancy a vu le jour avec pour objectif de mobiliser les connaissances et les expériences accumulées pendant les universités d’été et de les combiner avec des moyens pédagogiques modernes et innovants. La plateforme éducative en ligne REDXIR est le fruit de ce travail. Elle utilise des jeux pour changer l’attitude et le comportement des jeunes qui se forment aux métiers de la santé afin de voir émerger une génération de personnel de santé qui ne discrimine personne.

REDXIR est un univers imaginaire où les joueurs et les joueuses forment un groupe de lutte contre un mystérieux ennemi, qui symbolise la stigmatisation et la discrimination liées au VIH. L’objectif du jeu est de se battre contre la stigmatisation et la discrimination afin d’y mettre fin.

Les 10 niveaux du jeu sont conçus pour tester les connaissances des jeunes sur le VIH, ainsi que leur attitude et leur comportement envers les personnes vivant avec le virus. Par exemple, dans le niveau de la Pression sanguine, les jeunes doivent prendre la tension d’une personne séropositive afin de prouver leur capacité à le faire sans discriminer. Dans les niveaux supérieurs du jeu, les joueurs et les joueuses doivent être capables de faire un test de glycémie et une prise de sang pour un test de routine en laboratoire.

Certains niveaux ont lieu uniquement dans cet univers virtuel, alors que d’autres nécessitent d’agir dans le monde réel. Par exemple, dans le niveau Ne pas se taire, les jeunes doivent identifier des publications discriminatoires sur les réseaux sociaux, poster #Zerodiscrimination sous au moins une des contributions vues et commenter en expliquant pourquoi ce contenu est discriminant. Dans le niveau Campagne, les jeunes deviennent formateurs et formatrices dans une campagne de sensibilisation au VIH.

« Les nouvelles générations ont besoin de nouvelles plateformes. L’approche conviviale de REDXIR permet aux jeunes d’être en contact direct avec les populations cibles. Cela s’est révélé être une solution efficace pour réduire la stigmatisation et la discrimination liées au VIH dans les situations de santé », explique Parvin Kazerouni, directrice du Service de contrôle du VIH au sein du Centre de contrôle des maladies transmissibles du ministère iranien de la Santé et de l’Éducation médicale et responsable nationale pour le sida.

« REDXIR montre bien que des approches créatives et innovantes peuvent intégrer et soutenir les idées nouvelles des jeunes afin de lutter contre des problèmes comme la stigmatisation et la discrimination », conclut Fardad Doroudi, directeur pays de l’ONUSIDA pour la République islamique d’Iran.

Le bureau pays de l’ONUSIDA a fourni une aide technique et financière au projet REDXIR. 

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L’ONUSIDA met en avant six actions essentielles en vue de placer l’égalité des sexes au centre de la riposte à la COVID-19

15 juin 2020

Si le monde a bien appris une chose de la riposte au sida, c’est que lutter contre une maladie ne se fait pas sans protéger les droits humains et promouvoir l’égalité des sexes. Et la COVID-19 renforce ce constat.

Depuis le début de la pandémie de COVID-19, l’ONUSIDA ne cesse de demander aux gouvernements de respecter les droits humains, de prévenir la violence basée sur le genre et de lutter contre elle. Ce problème est d’autant plus crucial aujourd’hui, que les mesures de confinement exposent les femmes et les filles à un risque encore plus élevé de violences sexuelles et exercées par un partenaire intime. Par ailleurs, l’ONUSIDA adopte une position sans ambiguïté concernant les services de santé de la reproduction et sexuelle : il s’agit de services essentiels qui doivent être reconnus en tant que tels. 

Un nouveau rapport de l’ONUSIDA montre comment les gouvernements peuvent lutter contre les répercussions négatives, discriminantes et sexistes, de la COVID-19 et vise à intégrer ce thème dans les tables rondes de décision et les priorités de la riposte. Il présente six domaines nécessitant impérativement des actions pour satisfaire les besoins et protéger les droits des femmes et des filles au cours de la pandémie. Le rapport met en avant les besoins des femmes et des filles dans toute leur diversité, en particulier les plus marginalisées, et l’importance de leur fournir un accès aux services de santé essentiels. Il aborde par ailleurs les thèmes suivants : invisibilisation de la vague de violences basées sur le genre, recours abusif au droit pénal et à des mesures punitives, importance de l’éducation, de la santé et du bien-être, valorisation du travail des femmes et nécessité de faire que les activités non rémunérées de soins aux personnes soient l’affaire de tout le monde.

« La pandémie de COVID-19 lève le voile sur les discriminations contre lesquelles les femmes et les filles luttent tous les jours de leur vie, de la même manière que le VIH a révélé avant lui des inégalités et des injustices », a déclaré la Directrice exécutive de l’ONUSIDA, Winnie Byanyima. « Nous retrouvons de nombreux facteurs d’inégalité connus de l’épidémie de VIH dans les sources d’inégalité et d’injustice de la pandémie de COVID-19. La seule manière de lutter efficacement contre ces deux épidémies consiste à mettre l’égalité des sexes au cœur de la riposte. » 

Le rapport souligne que les droits et la santé de la reproduction et sexuelle sont souvent les premières victimes d’une épidémie et qu’il est nécessaire de protéger les avancées réalisées au cours des dix dernières années. Il indique aussi clairement que les rares ressources doivent être investies en priorité au profit des femmes et des filles les plus marginalisées, y compris les professionnelles du sexe, les femmes incarcérées et migrantes, ainsi que toutes celles dépourvues de justificatif d’emploi ou de résidence.

Le rapport présente une série de mesures pratiques que l’ONUSIDA prend actuellement avec des partenaires dans des pays afin de préserver les services de santé essentiels, de mobiliser une protection légale d’urgence et d’aider les populations victimes de violation de leurs droits fondamentaux au cours de l’épidémie de COVID-19.

Par exemple, au Nigeria et en Côte d’Ivoire, l’ONUSIDA et l’International Community of Women Living with HIV s’allient pour aider les femmes vivant avec le VIH à travailler en tant que pharmaciennes au sein de leurs communautés. Ces dernières collectent et effectuent des livraisons à domicile de thérapie antirétrovirale et d’autres médicaments aux personnes que les restrictions imposées à cause de la COVID-19 empêcheraient d’accéder à leur traitement.

En Amérique latine, le Fonds des Nations Unies pour la population et l’ONUSIDA proposent des moyens de contraception et un dépistage du VIH, ainsi que des kits de produits d’hygiène et des informations sur la violence basée sur le genre et le VIH aux femmes qui se trouvent en quarantaine obligatoire après avoir fui la République bolivarienne du Venezuela à cause de la COVID-19. 

Au Maroc, l’ONUSIDA en partenariat avec le ministère de la Santé, le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme et la société civile est en train de mobiliser des groupes d’entraide, des services d’assistance médicale et psychosociale, ainsi que des services de médiation familiale à destination des populations les plus exposées au risque d’infection au VIH. Les collaborations entre le gouvernement et la société civile permettent de garantir un accès ininterrompu à la thérapie antirétrovirale, au traitement de substitution aux opiacés et à une aide alimentaire au cours de la pandémie. 

Mais le message qu’envoie avant tout ce rapport, c’est que la santé, la sécurité, la dignité et les droits, en particulier pour les femmes et les filles dans toute leur diversité, ne doivent pas être mis en danger et que les femmes doivent mener les revendications en faveur du changement. 

« Sortez de chez vous et battez-vous, faites entendre vos revendications et agissez pour vos communautés », a ajouté Mme Byanyima.

Six concrete measures to support women and girls in all their diversity in the context of the COVID-19 pandemic

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Un nouveau groupe issu de la communauté du VIH lutte contre la COVID-19 en Guinée

12 juin 2020

Les communautés continuent de jouer un rôle important pour lutter contre les épidémies en Afrique. Dans le cadre de la riposte au VIH, leur engagement suit un principe fondamental : ne faites rien pour nous sans nous impliquer. Depuis le début de la riposte au sida, la société civile a été en première ligne en exigeant l’accès au traitement et le respect des droits humains, ainsi qu’en apportant son soutien aux services liés au VIH fournis par des communautés.

En Guinée, l’engagement des communautés se traduit par une amélioration continue des programmes du VIH et par des progrès considérables en matière de dépistage, de prévention, d’adhésion au traitement et d’assistance psychosociale. La promotion et la défense des droits humains sont également des thèmes essentiels pour les communautés. Leur implication permet de s’attaquer à la stigmatisation et à la discrimination, ainsi que de contrôler la qualité des services et d’affronter les défis.

Les leçons tirées de l’épidémie d’Ebola qui a touché le pays de 2013 à 2016 indiquent clairement que les communautés et le public doivent participer pleinement à la riposte à la COVID-19. Ce constat a motivé la création de la National Platform of Civil Society Organizations on HIV and TB (PNOSC-HIV/TB). Cette plateforme regroupant 28 associations a vu le jour avec le soutien technique et financier de l’ONUSIDA. Elle joue un rôle central dans l’élaboration du plan d’accès d’urgence du ministère de la Santé qui vise à réduire l’impact de la COVID-19 sur les services de santé, en particulier ceux liés au VIH.

La PNOSC-HIV/TB concentre son action sur les populations y compris les personnes incarcérées, vivant dans des camps de réfugiés ou des villes solidaires (des lieux où vivent des personnes ayant un handicap). Elle appuie activement la prévention contre la COVID-19 en sensibilisant sur le thème de l’éloignement physique que ce soit par le biais de médiateurs et de médiatrices issus des communautés, d’artistes locaux, des médias et d’activités de porte-à-porte.

Une ligne téléphonique gérée par deux réseaux de personnes vivant avec le VIH, dont un spécialisé dans les populations clés, apporte par ailleurs une assistance psychosociale. La PNOSC-HIV/TB promeut également la délivrance de plusieurs mois de thérapie antirétrovirale et son élargissement à tout le pays.

« La PNOSC-HIV/TB nous permettra de parler d’une voix, de nous affirmer encore plus, d’organiser et de renforcer notre contribution pour vaincre la COVID-19 et éliminer le sida en Guinée d’ici 2030 », a déclaré Mahawa Diallo Sylla, présidente de la PNOSC-HIV/TB.

La PNOSC-HIV/TB participe également à l’Observatoire des traitements communautaires qui surveille le respect des droits humains à l’heure de la COVID-19 et qui signale les violations au gouvernement et à l’Institution nationale des droits de l’homme.

« Je suis impressionnée par la volonté affichée par la PNOSC-HIV/TB pour combler le retard par le biais de sa participation à la riposte nationale au VIH. Je suis persuadée que le dynamisme et l’énergie générés depuis sa création marqueront durablement les ripostes du VIH et de la COVID-19 en Guinée », a souligné Dado Sy Kagnassy, directrice pays de l’ONUSIDA pour la Guinée.

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Cinq directeurs et directrices pays de l’ONUSIDA à la tête de la riposte à la COVID-19

11 juin 2020

L’expérience de Celina Miranda, médecin et directrice pays de l’ONUSIDA au Salvador, s’est révélée très précieuse à l’heure de l’épidémie de COVID-19. Elle s’est sentie très honorée lorsque la coordonnatrice résidente des Nations Unies l’a nommée à la tête de l’équipe nationale de riposte à la COVID-19 au sein des Nations Unies.

« J’ai accepté ce défi, car j'ai acquis les compétences nécessaires pour gérer ce type de situations grâce à mon expérience professionnelle avec l’ONUSIDA sur le VIH », explique-t-elle.

À l’heure actuelle, elle s’est occupée de six cas confirmés de COVID-19 au sein du personnel de différentes agences des Nations Unies. « Quelques malades ont dû passer par l’hôpital, d’autres par la quarantaine volontaire, mais la phase critique de l’infection est dépassée pour tout le monde », ajoute Mme Miranda.

Le travail de coordination de la lutte contre la COVID-19 consiste en particulier à déterminer la capacité des hôpitaux locaux à recevoir et à soigner le personnel des Nations Unies et leurs proches. Le Salvador n’était pas prêt à affronter la pandémie, indique-t-elle, ce qui a compliqué la tâche.

Les équipes pays des Nations Unies ont nommé Mme Miranda et quatre de ses collègues responsables de la coordination de la lutte contre la COVID-19 dans leur pays respectif.

Pour Vladanka Andreeva au Cambodge, Yafflo Ouattara au Tchad, Job Sagbohan au Burkina Faso et Medhin Tsehaiu au Kenya, endosser une telle responsabilité est également un grand honneur.

Mme Andreeva explique comment les Nations Unies au Cambodge ont créé début mars une équipe interne de préparation et de riposte à la COVID-19. On s’est ensuite tourné vers elle pour diriger les efforts afin de garantir que les quelque 2 500 membres du personnel des Nations Unies et leurs proches ont accès aux informations, traitement, soins et soutien les plus à jour pour la COVID-19. Elle a élaboré un plan d’accès d’urgence destiné à la famille des Nations Unies et a encouragé la mise en place d’une procédure d’évacuation médicale, ainsi que des services d’assistance psychologique destinés au personnel.

M. Sagbohan est épidémiologiste et a travaillé pour l’Organisation mondiale de la Santé au cours des épidémies d’Ebola et de fièvre jaune. Il raconte avoir passé beaucoup de temps à rassurer le personnel pour qu'il surmonte le stress et la peur. « Les membres du personnel avaient peur. Ainsi, au cours du confinement, j’ai reçu jusqu’à 300 appels par semaine malgré les comptes rendus des assemblées générales virtuelles régulières qui leur étaient destinés dans tout le Burkina Faso. »

Et d’expliquer que malgré l’équipe restreinte et le manque de ressources de l’ONUSIDA par rapport à d’autres agences, les connaissances sur les maladies infectieuses ont été d’une grande aide. Il a rapidement demandé à avoir des contacts dans différentes organisations et a organisé un groupe de travail des Nations Unies contre la COVID-19. « J’ai pu m'appuyer sur le relais de personnes fiables et motivées pour m’aider et cela a fait toute la différence. »

Selon Yafflo Ouattara, la fonction de coordination de la lutte contre la COVID-19 convient parfaitement aux directeurs et directrices pays de l’ONUSIDA. « Nous avons l’habitude d’obtenir l’adhésion de nos cosponsors, nous avons donc le travail d’équipe dans la peau », dit-il. Au Tchad, son travail consiste principalement à étendre la couverture des unités de soins intensifs et d’établir un système de référence solide pour gérer les cas graves. Près de 7 000 personnes, membres du personnel des Nations Unies et leurs proches, vivent dans le pays, parfois à des endroits où les établissements de santé sont fermés la nuit.

À l’instar d'autres collègues, il a également apporté son aide au plan national d’urgence contre la COVID-19 afin de garantir que les personnes vivant avec le VIH accèdent à leur traitement et aux soins.

Il déclare que la pandémie a révélé au grand jour des lacunes importantes du système de santé du pays. « Non seulement des investissements essentiels dans les soins intensifs n’ont pas été faits, mais certains produits de première nécessité comme les gants, les masques ou le savon manquent tout simplement. »

Vivre dans un monde marqué par la COVID-19 ne se fait pas sans un certain nombre de changements. « [La crise] nous donne une chance d’intervenir et de nous faire entendre pour réformer les systèmes », déclare M. Ouattara.

Medhin Tsehaiu est d’accord avec lui. Elle est fière de l’implication de l’ONUSIDA dans des problématiques plus larges.

« Nous sommes bien là et nous contribuons activement et volontiers à notre part du travail », indique-t-elle. Mais elle est persuadée que la COVID-19 a changé pour toujours la manière de travailler.

Elle explique qu’avec toutes les réunions en ligne et l’arrêt des déplacements, le personnel était beaucoup plus disponible et qu’il n’y avait ainsi pas de temps mort dans la communication, mais que cela était très chronophage. « La crise nous rassemble, que cela nous plaise ou non, et cela nécessite une collaboration intense », continue Mme Tsehaiu.

Outre sa longue liste de tâches liées à sa fonction de coordinatrice pour la COVID-19, elle a lancé avec quelques autres personnes le fonds de solidarité des Nations Unies pour le Kenya. Après avoir pesé le pour et le contre, un compte en banque a été ouvert où le personnel peut choisir de faire des dons pendant trois mois afin que l’argent récolté soit distribué à des personnes dans le besoin.

« C’est une manière pour le personnel de montrer son empathie et son soutien à la population kényane en ces temps difficiles », indique-t-elle.

Pour ce qui est de la solidarité, Mme Andreeva explique que la pandémie a été véritablement un test pour la réforme des Nations Unies au niveau des pays, pas uniquement à propos de la riposte à la pandémie, mais aussi en ce qui concerne les aspects du devoir de diligence. Selon une étude menée en mai, 90 % du personnel au Cambodge indique que la direction des Nations Unies au niveau du pays prend les bonnes décisions pour gérer la crise.

Récemment, au cours d’une assemblée générale virtuelle rassemblant 300 membres du personnel des Nations Unies au Salvador, les retours étaient aussi positifs. Mme Miranda déclare ne pas chercher les éloges ni les remerciements supplémentaires. « Tout ce que j’aime, c’est aider les gens et les voir guérir, croquer la vie à pleines dents. »

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Prendre les professionnelles du sexe pour cible n’est pas la solution

08 juin 2020

Lorsque le gouvernement du Cameroun a demandé à toute la population de rester chez elle dans le cadre de la riposte à la COVID-19, Marie-Jeanne Oumarou (nous avons changé son nom) s’est dépêchée de faire des courses, d’aller chercher ses trois enfants et de les envoyer à la campagne.

Elle espérait ainsi pouvoir continuer à travailler en les sachant entre de bonnes mains.

« Je n’avais pas conscience de l’ampleur des difficultés qui découleraient du confinement », explique-t-elle. « Il est totalement inadapté pour nous, les professionnelles du sexe. »

Au cours des 10 dernières années, Mme Oumarou a appris à connaître comme sa poche les couloirs, ces avenues bordées de petits hôtels où exercent les professionnel-les du sexe dans la capitale du Cameroun, Yaoundé. Elle s’est lancée dans cette profession en 2010 après avoir été abandonnée avec ses jeunes enfants. Elle a appris à connaître les différentes femmes plus âgées, elles-mêmes d’anciennes professionnel-les du sexe, à qui elle paye un accès à des lieux où elle peut travailler en toute sécurité. La COVID-19 a toutefois chamboulé sa vie du jour au lendemain. 

« Les hôtels étaient fermés, les clients se faisaient rares et la police était omniprésente. Je ne pouvais plus survivre », se souvient-elle.

Denise Ngatchou, directrice d’Horizons Femmes, une organisation non gouvernementale qui vient en aide aux femmes vulnérables, explique avoir été choquée de constater la manière dont les professionnelles du sexe ont été soudainement prises pour cible.

« La police a arrêté et détenu des femmes sans fournir aucune information », indique-t-elle. « Nous nous sentions démunies, car le gouvernement était en position de force avec la batterie de mesures contre la COVID-19. »

Rosalie Pasma, responsable d’un centre de santé d’Horizons Femmes, hausse les épaules en signe d’assentiment au cours d’une interview sur Skype.

« La COVID-19 a compliqué beaucoup de choses », indique-t-elle. « Les effets du confinement se font sentir de différentes manières qu’il s’agisse des femmes qui ne peuvent plus venir à leur rendez-vous de suivi à cause de problèmes de transport ou de nos juristes qui n’ont pas accès aux commissariats pour défendre les professionnelles du sexe arrêtées. »

Et Mme Ngatchou d’intervenir en déclarant qu’il n’y avait aucune raison de baisser les bras. Horizons Femmes s’est jurée de rester ouverte. Une équipe réduite à peau de chagrin a continué d’assurer une permanence avec des horaires restreints et de fournir un dépistage du VIH ainsi que d’autres services tout en respectant les mesures de prévention. 

« Les gens nous ont dit d’arrêter toutes nos visites de sensibilisation sur le terrain, mais nous avons tenu autant que possible en apportant aux femmes des conseils sur le coronavirus afin qu’elles soient conscientes des dangers potentiels », explique-t-elle.

L’association distribue également des masques et a lancé un projet de financement participatif afin de pouvoir acheter davantage d’équipement de protection. Mme Ngatchou est très préoccupée d’avoir assisté à tant de choses et de pouvoir faire si peu.

« Assouplir la législation contre le commerce du sexe et mettre un terme aux arrestations arbitraires envers les professionnelles du sexe aurait déjà un impact », indique-t-elle.

En fait, elle est persuadée que les punir ne fait qu’empirer la situation.

« N’êtes-vous pas d’avis que si elles se cachent, elles seront plus susceptibles de travailler et de se faire contaminer que si des structures d’assistance les aidaient ? », demande-t-elle.

En réfléchissant à ce qu’elle vient de dire, elle ajoute que cela s’applique aussi bien à la COVID-19 qu’au VIH.

Début avril, l’ONUSIDA et le Réseau mondial des projets sur le travail du sexe ont tiré la sonnette d’alarme concernant les difficultés et les préoccupations spécifiques aux professionnel-les du sexe dans le monde. Les deux organisations ont appelé les gouvernements à garantir le respect, la protection et l’application des droits humains des professionnel-les du sexe.

« Les autorités doivent comprendre que nous n’encourageons pas le commerce du sexe, mais que nous encourageons la santé », conclut Mme Ngatchou. « Voilà la priorité. »

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De l’intérêt d’intégrer les services de prévention du VIH et de contraception

05 juin 2020

En 2019, l’essai ECHO a rappelé au monde que les femmes vivant dans certaines parties de l’Afrique australe sont exposées à une incidence considérable du VIH. Ces taux élevés de VIH et d’infections sexuellement transmissibles ont été détectés chez des femmes ayant recours régulièrement à des services de contraception.

Un nouveau rapport commun de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et de l’ONUSIDA définit les étapes nécessaires pour améliorer et intégrer les services de prévention du VIH et de contraception en vue de réduire les nouvelles infections au VIH chez les femmes.

« Nous avons besoin de réfléchir sur les différents besoins des femmes, y compris des adolescentes, de celles n’ayant reçu qu’une faible éducation et des populations clés qui sont souvent négligées dans les programmes de contraception, de santé et de droits de la reproduction et sexuelle au sens large. Cette nouvelle stratégie se traduit par une gamme élargie d’options de contraception, par des choix supplémentaires de prévention du VIH et par des activités communautaires venant compléter celles fournies par les établissements », a expliqué la coordinatrice de la Global HIV Prevention Coalition auprès de l’ONUSIDA, Paula Munderi. 

Le rapport indique clairement que les femmes exposées à un risque extrême de VIH et d’infections sexuellement transmissibles en Afrique australe et celles appartenant aux populations clés devraient être au cœur des mesures prises de toute urgence.

Il propose plusieurs stratégies dans des zones n’ayant pas toutes le même niveau d’exposition au VIH. Par exemple, dans les situations où l’incidence du VIH et des infections sexuellement transmissibles est élevée, les options de prévention du VIH, y compris les préservatifs masculins et féminins, ainsi que les activités de conseil concernant la prévention doivent figurer parmi les éléments fondamentaux offerts par les services de contraception et être activement encouragées. Dans des situations en Afrique australe où l’incidence du VIH est extrêmement élevée, le rapport invite à prendre en compte l’introduction rapide de la prophylaxie pré-exposition (PPrE) au sein des services de contraception.

« La santé et les droits de la reproduction et sexuels, ainsi que l’intégration des services de lutte contre le VIH sont encouragés depuis plus de dix ans, avec un succès toutefois limité. Il est primordial d’aider les femmes séropositives à accéder à la contraception dans les cliniques de traitement du VIH et de fournir des prestations liées au VIH au sein des services de contraception. Cela passe par la garantie de financements d'actions concrètes », a déclaré Rachel Baggaley, responsable de l’unité Dépistage, prévention et population des programmes mondiaux pour le VIH, l’hépatite et les IST au sein de l’OMS.

Le rapport propose de mettre les femmes au cœur du processus décisionnel afin de comprendre leurs besoins et leurs attentes. « La prévention du VIH et les choix de contraception pour les femmes et les filles ne sont toujours pas accessibles à un large public. Nous devons promouvoir la liberté d’action et de choix des femmes et des filles en proposant une vaste palette de produits de prévention du VIH, depuis la PPrE et les microbicides jusqu’aux préservatifs faciles à utiliser. Les femmes et les filles s’épanouissent lorsqu’on leur donne la possibilité de choisir », a expliqué Nyasha Sithole, militante zimbabwéenne des droits des filles et des femmes.

Même si les personnes séropositives sous antirétroviraux dont la charge virale est indétectable ne peuvent plus transmettre sexuellement le VIH à leurs partenaires, des millions de femmes ayant accès à une forme de contraception continuent d’avoir des rapports sexuels non protégés avec des hommes qui ne connaissent pas leur statut sérologique. Comme l’a démontré l’essai PopART, l’incidence élevée du VIH chez les jeunes femmes est ainsi imputable aux hommes qui ne cherchent pas à se soigner. Le rapport propose des mesures concrètes pour renforcer la prévention, le dépistage et le traitement des partenaires, y compris l’autodépistage pour les hommes, allié à des actions de proximité et de prévention pour changer les rapports entre les genres au sein des communautés.

« Une intégration efficace nécessite plusieurs niveaux de prévention. Elle peut, et doit, comprendre des services aussi bien de la santé de la reproduction et sexuels que ceux du VIH, y compris des technologies de prévention polyvalentes. La compartimentation des services de soins, les ruptures de stock et la faible implication des femmes elles-mêmes entravent depuis longtemps les soins de santé des femmes. Et la COVID-19 exacerbe ces difficultés », a indiqué le directeur exécutif de l’AVAC, Mitchell Warren.

Alors qu’aujourd’hui l’éloignement physique nécessaire à cause de la pandémie de COVID-19 réduit les contacts avec les services de santé, il sera primordial d’optimiser les interactions avec les prestataires de santé en intégrant les services. « La prévention du VIH et des infections sexuellement transmissibles devrait faire partie des informations et des services de contraception essentiels destinés aux femmes exposées à un risque élevé d’infection à VIH », a ajouté James Kiarie, responsable de l’unité Contraception et soin de la fertilité au sein du service de santé de la reproduction et sexuelle de l’OMS.

Ressources

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Limiter l’impact de la COVID-19 auprès des populations clés

04 juin 2020

La pandémie de COVID-19 touche tout le monde, y compris les populations clés exposées à un risque élevé de contamination au VIH. Les perturbations occasionnées par la COVID-19 menacent d’anéantir les progrès réalisés contre d’autres maladies infectieuses, dont le VIH. C’est dans ce contexte que s’inscrit un nouveau rapport publié par FHI 360 en collaboration avec l’ONUSIDA. Ce document fournit des conseils sur la manière de limiter l’impact de la COVID-19 auprès des populations clés.

« Ces lignes directrices mettent l’accent sur les populations clés. Elles viennent ainsi s’ajouter aux efforts en cours pour protéger l’accès aux services et aux produits de prévention du VIH, aux services de santé sexuelle et de planification familiale, à la prévention de la violence basée sur le genre et aux activités de conseil, de dépistage et de traitement du VIH au cours de la pandémie de COVID-19 », a déclaré la coordinatrice de la Global HIV Prevention Coalition auprès de l’ONUSIDA, Paula Munderi. « Il est vital de préserver les services essentiels du VIH à destination des populations clés et de promouvoir la santé et le bien-être du personnel et des membres des communautés au cours de la pandémie de COVID-19 afin de ne pas perdre les progrès chèrement acquis pendant la riposte au sida. »

Le rapport fournit des conseils pratiques sur la manière d’éviter une interruption des services apportés aux personnes séropositives et aux populations clés. Son objectif est ainsi d’aider les acteurs mettant en place les programmes à poursuivre leur travail.

« Les populations clés sont particulièrement vulnérables aux interruptions de services du VIH et à d’autres dangers au cours de la pandémie de COVID-19. Nous demandons instamment des solutions reposant sur les droits qui préservent ou améliorent l’accès des populations clés aux services de lutte contre le VIH tout en minimisant l’exposition potentielle à la COVID-19 et en promouvant la sécurité des personnes. Ces solutions doivent encourager l’éloignement physique et la décongestion des établissements de santé, tout en prenant en compte la situation réelle des populations clés », a indiqué Rose Wilcher du FHI 360.

Ce rapport propose des solutions pratiques dans trois grands domaines.

Le premier concerne la protection des prestataires et des membres des communautés face à la COVID-19. Les services du VIH ne pourront continuer d’être assurés au cours de la pandémie de COVID-19 que si des mesures sont prises pour empêcher toute contamination au coronavirus du personnel, des prestataires et des bénéficiaires des programmes. Ces services peuvent comprendre un renvoi vers un dépistage et des soins pour la COVID-19, ainsi que vers des solutions de protection de la santé mentale des prestataires et des bénéficiaires.

Le second domaine consiste à assurer un accès sans danger et pérenne aux services et aux produits liés au VIH. Les programmes du VIH peuvent ainsi intégrer des mesures d’éloignement physique, proposer des consultations en ligne et fournir des ordonnances pour plusieurs mois de traitement. Quant au travail de proximité auprès des communautés, il devrait continuer en personne lorsque c’est possible.

Le troisième et dernier domaine abordé par ce rapport porte sur le suivi de la continuité des services et sur l’amélioration des résultats. Des perturbations étant inévitables, les programmes du VIH devront ajuster leurs systèmes de suivi et d’évaluation afin de permettre des analyses régulières de la continuité des services du VIH et de l’impact de la COVID-19 sur les programmes du VIH et sur leurs bénéficiaires. Pourquoi ne pas établir des systèmes d’information stratégique conformes aux mesures d’éloignement physique, par exemple en virtualisant la collecte de données et les outils de reporting.

« La pandémie de COVID-19 ne devrait pas être utilisée comme excuse pour ralentir les efforts de la riposte mondiale au VIH auprès des populations clés. Au contraire ! Cette pandémie est le moment de tirer des leçons de notre action pour mettre fin au sida. C’est aussi l’occasion de délester les systèmes de santé mis à rude épreuve par la COVID-19 en apportant un financement complet aux organisations communautaires dirigées par des hommes gays et bisexuels, des toxicomanes, des professionnel-les du sexe et des personnes transgenres en vue de garantir un meilleur accès aux services du VIH pour les populations clés », a indiqué le directeur de MPact, George Ayala.

Le rapport a été rédigé par FHI 360 dans le cadre du projet Meeting Targets and Maintaining Epidemic Control (EpiC) qui jouit du soutien de l’USAID et du Plan d’urgence du président des États-Unis pour la lutte contre le sida. L’ONUSIDA et ses partenaires ont fourni des informations et des conseils.

RESSOURCES ANNEXES

 

Strategic Considerations for Mitigating the Impact of COVID-19 on Key-Population-Focused HIV Programs (Analyse stratégique en vue de limiter l’impact de la COVID-19 sur les programmes du VIH destinés aux populations clés, en anglais)

 

FHI 360: Five strategies for preserving key population-focused HIV programmes in the era of COVID-19 (FHI 360 : cinq stratégies pour préserver les programmes du VIH destinés aux populations clés à l’heure de la COVID-19, en anglais)

 

Global HIV Prevention Coalition

 

Les droits humains aux temps du COVID-19 — Les leçons du VIH pour une réponse efficace, et dirigée par la communauté

 

Lessons from HIV prevention for preventing COVID-19 in low- and middle-income countries (Enseignements tirés de la prévention du VIH permettant d’empêcher la propagation de la COVID-19 dans les pays à revenu faible et intermédiaire)

 

Condoms and lubricants in the time of COVID-19 (Préservatifs et lubrifiants à l’heure de la COVID-19, en anglais)

 

Maintaining and prioritizing HIV prevention services in the time of COVID-19 (Maintenir les services de prévention du VIH et leur donner la priorité à l’heure de la COVID-19, en anglais)

Notre action

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Leçons tirées du VIH applicables à la COVID-19 au Sénégal

03 juin 2020

Quatre décennies de riposte à l’épidémie de VIH ont fourni une expérience considérable venant étayer l’importance d’une approche basée sur les droits de l’homme à chaque épidémie. L’ONUSIDA s’est entretenue avec Abdoulaye Ka, responsable des questions relatives aux droits humains au sein du Conseil national de lutte contre le sida (aussi connu sous l’acronyme CNLS au Sénégal), au sujet des leçons que le CNLS a tirées de la riposte au VIH et qui peuvent s’appliquer à la lutte contre la COVID-19.

Comment le Sénégal lutte-t-il contre la stigmatisation et la discrimination au cours de la pandémie de COVID-19 ?

L’expérience de lutte contre la stigmatisation et la discrimination liées aux services du VIH a permis au CNLS d’attirer l’attention du comité national de gestion de la COVID-19 et de l’opinion publique sur l’importance de mettre en place des supports de communication adaptés aux différentes communautés. Impliquer les communautés touchées dans la définition, la mise en place et le suivi des programmes de la COVID-19 contribue à réduire la stigmatisation gravitant autour de la maladie.

Le Secrétaire exécutif du CNLS s’est exprimé plusieurs fois pour expliquer combien nous devons simplifier les messages destinés aux communautés, y compris en les aidant à proposer leur propre riposte.

L’unité de soin psychosocial de Dakar jouit également du soutien du CNLS pour tirer des leçons des expériences liées au VIH, ainsi qu’à la stigmatisation et à la discrimination dans son travail contre la COVID-19.

Quelles mesures sont prises pour lutter contre les conséquences socioéconomiques de la COVID-19 au Sénégal ?

Dans sa volonté de contrer l’impact socioéconomique de la COVID-19 pour les personnes et les foyers, le Sénégal a mis en place un programme de résilience économique et social et a réservé un budget de 1 000 milliards de francs CFA (env. 1,5 milliard d’euros) afin de venir en aide aux secteurs économiques les plus touchés par la crise et d'apporter une aide alimentaire aux plus vulnérables. Au total, 59 milliards de francs CFA (env. 90 millions d’euros) ont été assignés à l’achat de vivres pour un million de foyers éligibles.

Le CNLS coopère en particulier avec l’ONU Femmes en vue d’augmenter la résilience des femmes vivant avec le VIH en leur distribuant de la nourriture et des kits d’hygiène.

De quelle manière la riposte à la COVID-19 du Sénégal répond-elle aux besoins spécifiques des personnes vivant avec le VIH ?

Le pays est en train de passer à la délivrance d’ordonnances correspondant à plusieurs mois de thérapie antirétrovirale, conformément à la ligne directrice de l’Organisation mondiale de la Santé, afin de répondre aux besoins identifiés par le réseau national de personnes vivant avec le VIH. Nous collaborons avec des prestataires de services et des communautés pour évaluer les besoins et éviter les ruptures de stock.  

Par ailleurs, le CNLS a mis en place un numéro vert pour les personnes vivant avec le VIH au Centre de traitement ambulatoire de Dakar. Il anime aussi un réseau sur WhatsApp regroupant l'ensemble des responsables de centres de soin de thérapie antirétrovirale et leur apporte des recommandations sur la manière d’adapter la fourniture de soins aux personnes vivant avec le VIH, y compris pour ce qui est de la délivrance de médicaments pour au moins trois mois de traitement contre le VIH.

Quel est le rôle des organisations communautaires ?

Les organisations et les réseaux communautaires sont depuis longtemps un pivot de la riposte au sida. Ils sont essentiels pour sensibiliser, informer, balayer les idées reçues et lutter contre les fausses informations, mais aussi pour fournir des services aux populations marginalisées et vulnérables.

Aujourd’hui plus que jamais, il faut soutenir les acteurs communautaires dans leurs efforts pour innover et pour être reconnus en tant que prestataires de services essentiels pour le VIH comme pour la COVID-19.

Les prestataires communautaires ont innové rapidement dans le contexte de la COVID-19 au Sénégal en adoptant un système de prise de rendez-vous qui limite le nombre de personnes présentes en même temps dans un établissement et en proposant des sessions de formation en ligne.

Le CNLS apporte à l’heure actuelle un soutien logistique aux personnes vivant avec le VIH pour la distribution d’antirétroviraux assurée par les communautés.

Le droit à l’information est inscrit dans la constitution du Sénégal. Quel est son rôle dans la prévention et la protection des épidémies ?

Le CNLS a rédigé et diffusé très rapidement des messages, des communiqués de presse et des bannières sur les réseaux sociaux afin d’attirer l’attention sur les mesures préventives à prendre contre la COVID-19, en particulier pour les personnes vivant avec le VIH. Nous avons également informé en temps réel les personnes séropositives concernant les nouvelles connaissances sur le VIH et la COVID-19.

Les informations ont été énoncées dans des termes simples et servent aussi à lutter contre les fausses informations/la désinformation qui peuvent entraver l’accès aux services de santé, y compris de vaccination, qui sont utiles pour préserver la santé des personnes, notamment des enfants vivant avec le VIH.

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Venir en aide aux professionnel-les du sexe transgenres au Guyana et au Suriname à l’heure de la COVID-19

02 juin 2020

Twinkle Paule, militante transgenre du Guyana, a émigré aux États-Unis d’Amérique il y a deux ans. Alors que la crise de la COVID-19 s’aggravait, elle a pensé à ses « sœurs » restées au pays ainsi qu’au Suriname voisin. Pour beaucoup d’entre elles, le seul moyen de subsistance est le commerce du sexe,  mais Twinkle Paule savait que le couvre-feu allait leur couper les vivres. Elle craignait également que certaines aient des problèmes avec la loi si elles se sentaient contraintes à travailler la nuit.

Ses peurs ont été confirmées après avoir pris contact avec des personnes sur place. Elle a fait personnellement un don, mais elle était consciente que c’était loin de suffire.

« Ayant arpenté les mêmes rues, je savais que nous devions créer une mobilisation pour venir en aide à notre communauté. Je sais ce que c’est que d’être enfermée chez soi et de devoir de l’argent à un propriétaire... que d’être mise à la rue parce que l’on ne peut pas payer son loyer », déclare Mme Paule.

Elle a collaboré alors avec deux militantes new-yorkaises, Cora Colt et Ceyenne Doroshow, les fondatrices de la Gays and Lesbians in a Transgender Society (GLITS Inc), afin de lancer une campagne d’appel aux dons sur GoFundMe. Depuis son lancement le 12 mai, elles ont déjà reçu suffisamment de dons pour payer un mois de loyer à six professionnelles du sexe transgenres. L’argent a été envoyé à Guyana Trans United (GTU), l’organisation pour laquelle Mme Paule a travaillé en tant qu’éducatrice lorsqu’elle a arrêté le commerce du sexe en 2015.

Le fait que Mme Paule puisse aujourd’hui s'appuyer sur sa notoriété pour mobiliser une aide d’urgence constitue en soi une réussite phénoménale. Au moment où elle a émigré, elle pensait sérieusement au suicide. La charge émotionnelle liée à l’exclusion et à l’injustice pesait lourdement sur ses épaules.

Depuis que sa demande d’asile a été acceptée, elle étudie à plein temps la communication au Borough of Manhattan Community College. Elle a terminé ses études secondaires l’année dernière, ce qu’elle n’avait pas pu faire au Guyana. En parallèle de ses études, elle a travaillé sur le terrain pour le GMHC (Gay Men’s Health Crisis).

Et c’est tout naturellement qu’elle s’est glissée dans la peau d’une militante pour demander l’année dernière à la mairie de supprimer la loi § 240.37 du Code pénal de l’État de New York relative au racolage qui est utilisée pour cibler les femmes transgenres. Elle a immédiatement reconnu que ce paragraphe est issu de la même tradition que les lois sur le vagabondage dont elle a souffert au début au Guyana avant de lutter contre elles.

Mme Paule est tout à fait consciente que son émigration a changé ses perspectives du tout au tout.

« Mon expérience illustre combien le fait de donner à quelqu’un les possibilités et les bons outils fait la différence pour prendre d’autres décisions dans sa vie. J’ai pris conscience que ce qui me manquait, c’était des ressources adaptées et l'accès à un environnement sans craindre la discrimination et la violence. Je ne dis pas que tout est parfait ici, mais mon quotidien n’est plus marqué par le même niveau d’injustice. J’ai pu accéder à un traitement hormonal. Et pour moi, le plus important est d’avoir pu retourner à l’école », raconte-t-elle.

Sa mère est morte lorsqu’elle était encore enfant, puis son père a fondé une nouvelle famille. Des proches se sont alors occupés de l’élever. L’argent manquait parfois pour assurer son éducation. Certains week-ends, elle nettoyait une église pour gagner un peu d’argent.

Mais la pauvreté n’était pas le seul problème. Elle se souvient s’être sentie très tôt différente. Elle n’avait pas de mot pour qualifier ce qu’elle ressentait, mais elle a su d’instinct que ce ne serait pas accepté. À l’école, elle a tout fait pour ne pas se faire remarquer. Un jour, son cœur s’est arrêté lorsqu’un camarade de classe lui a dit qu’elle s’exprimait comme un « antiman », un terme péjoratif utilisé au Guyana pour les personnes gays.

Pendant des années, elle a entendu à plusieurs reprises des adultes de son entourage être d’accord pour dire qu’il faudrait la mettre à la porte si jamais elle était gay. C’est ce qui arrive alors qu’elle a 16 ans, lorsqu’un membre de sa famille la voit « danser comme une fille » à une fête. La voilà sans domicile.

Mme Paule se réfugie auprès d’autres femmes transgenres et, comme elles, a recours au commerce du sexe pour survivre. L’émergence d’un mouvement régional s’intéressant aux besoins des communautés vulnérables et marginalisées change alors sa vie. La nouvelle association Guyana Sex Work Coalition lui apporte des informations sur les rapports sexuels à moindre risque et lui permet d’accéder à des solutions en ce sens. Lorsque certaines femmes dans sa situation commencent à se rendre à des conférences, elles découvrent qu’il existe un mot pour décrire leur expérience. Elles n’étaient pas « antimen ». Elles étaient transgenres.

Mais la vie sur le trottoir était brutale. Si l’une d’entre elles se faisait dévaliser ou violer, elle n’avait pas la possibilité de le signaler à la police.

« La police vous dit en face : « Qu’est-ce que tu fais ici alors que tu sais que la prostitution et la sodomie vont à l’encontre de la loi » », se souvient-elle.

Elle explique que, parfois, des officiers de police véreux les menaçaient de poursuites pour pouvoir leur extorquer de l’argent.

Une fois, dans un commissariat, la police l’a incarcérée avec d’autres femmes transgenres au milieu d'hommes et a lancé des préservatifs dans la cellule, donnant ainsi le feu vert aux autres détenus. Elle était adolescente à cette époque.

Un autre jour, elle a accompagné une amie au commissariat pour déposer plainte pour violence intrafamiliale. Un policier a renversé la situation en lui déclarant : « Vous pratiquez la sodomie. Je vous boucle. »

En 2014, un groupe d’entre elles a été arrêté pour commerce du sexe au Suriname. Parmi les exactions subies, un gardien de prison les a forcées à se déshabiller et à s’accroupir devant leur cellule en présence d’autres détenus.

Il y a sept ans, une de ses amies a été assassinée, et son corps jeté derrière une église. Le crime n’a donné lieu à aucune enquête.

Un enchaînement de traumatismes qui laisse des cicatrices.

La peur est toujours présente, même lorsque tout est calme. Est-ce que je vais me faire jeter du taxi ? Des gens vont-ils m’insulter dans la rue ? Vais-je avoir des problèmes à cause de ce que je porte ?

« Les filles ont l’impression que c’est leur faute », explique Mme Paule. « Même en ce qui me concerne, j’avais l’impression que les gens avaient le droit de me maltraiter, car mon comportement ne respectait pas les conventions sociales. »

Lorsqu’elle a commencé à militer, elle ne sentait toujours pas complètement elle-même. Elle tente de se suicider et commence à boire ou à fumer un joint avant d’aller travailler. Il y a deux ans, elle était à la dérive. Aujourd’hui, elle est une force vive au service de sa communauté.

Mme Paule attribue au travail d’organisations comme la Society against Sexual Orientation Discrimination et GTU le mérite de faire avancer le débat concernant l’inclusion au Guyana.

« La sécurité et l’égalité sont deux choses qui manquent encore à ma communauté », insiste-t-elle. « Nous avons besoin que le gouvernement affirme : « Nous devons protéger ces personnes ». La communauté transgenre n’a pas de travail, nous arrêtons notre scolarité à cause du harcèlement et nous sommes victimes de brutalités policières. Tout cela ne va pas. Nous avons besoin que nos élu-es s’engagent vraiment. »

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