Feature Story

Première rencontre en personne entre la Directrice exécutive de l’ONUSIDA et des donateurs clés

13 novembre 2019

En amont de l’ouverture du Sommet de Nairobi sur la CIPD25, Winnie Byanyima, Directrice exécutive de l’ONUSIDA, et Peter Eriksson, ministre suédois de la Coopération internationale pour le développement, ont présidé ensemble un petit-déjeuner ministériel rassemblant des pays donateurs et des partenaires clés. Leur objectif était de souligner les besoins de l’ONUSIDA afin que l’organisation soit un moteur de la riposte mondiale au VIH.

Depuis sa prise de fonction au poste de Directrice exécutive de l’ONUSIDA, Mme Byanyima a rencontré pour la première fois plusieurs donateurs et partenaires clés de l’ONUSIDA. Elle en a profité pour promettre d’adopter une approche féministe dans le développement de l’ONUSIDA.

« L’ONUSIDA telle qu’elle émerge des défis des deux à trois dernières années se trouve à la croisée des chemins et mes priorités vont tout d’abord à notre personnel. Nous devons guérir les blessures, renforcer la confiance et clore le chapitre du passé. Je veux que le travail fantastique de l’ONUSIDA soit à nouveau synonyme de joie », a déclaré Mme Byanyima.

Katherine Zappone, ministre irlandaise de l’Enfance et de la Jeunesse, Christopher MacLennan, sous-ministre adjoint du Canada aux Enjeux mondiaux et du développement, ainsi que d’autres chefs de délégation ont applaudi l’intention de l’ONUSIDA de faire prendre un tournant à la culture de l’organisation.

« Depuis des années, l’ONUSIDA est en première ligne de la riposte au sida. Le Canada a toujours offert son soutien indéfectible et nous sommes extrêmement heureux de l’arrivée de Winnie », a déclaré M. MacLennan.

Les ministres et porte-parole de l’Allemagne, de l’Australie, de la Belgique, du Canada, de la Finlande, de l’Irlande, du Luxembourg, de la Norvège, des Pays-Bas, de la Suède et de la Suisse ont encouragé l’ONUSIDA à poursuivre son rôle de pionnière dans la promotion de solutions et de ripostes dirigées par les communautés. Toutes et tous ont également mis en avant le besoin de tirer profit des capacités uniques de l’organisation et d’exploiter son expertise des droits humains afin d’affronter les barrières sociales et politiques qui entravent les progrès liés au VIH.

« Nous devons améliorer l’intégration des droits et de la santé de la reproduction et sexuelle au sein de la riposte au VIH si nous voulons atteindre nos objectifs », a expliqué M. Eriksson. « Le Programme commun est un acteur très important pour faire progresser la santé de la reproduction et sexuelle. »

Cette rencontre a également rassemblé une délégation de plusieurs organismes coparrainants de l’ONUSIDA : le Fonds des Nations Unies pour la population et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). « Le PNUD s’engage à travailler avec l’ONUSIDA pour aider les gouvernements à créer un environnement légal, politique et réglementaire favorisant des ripostes au VIH efficaces et fondées sur le droit », a indiqué Achim Steiner, l’Administrateur du PNUD.

L’ONUSIDA, les pays donateurs et partenaires ont reconnu le besoin d’établir un partenariat avec le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme afin d’assurer la pérennité de la riposte au VIH.

Cette rencontre était la première d’une série de rendez-vous programmés en vue d’intensifier l’engagement collectif et de renforcer la collaboration alors que l’ONUSIDA se lance dans l’élaboration d’un nouveau plan stratégique sur le VIH.

Sommet de Nairobi sur la CIPD25

Feature Story

Intervention passionnée de Gareth Thomas, ancien capitaine de l’équipe de rugby du Pays de Galles, à propos de la lutte contre les stigmatisations liées au VIH

11 novembre 2019

Au cours d’une rencontre en marge de la 17e conférence européenne sur le sida organisée à Bâle du 6 au 9 novembre 2019, Gareth Thomas a indiqué qu’il était urgent d’affronter ouvertement les stigmatisations liées au VIH. La star du rugby a affiché sa volonté d’aider à instaurer un environnement, qui mettrait fin à la stigmatisation, permettrait de prendre des décisions éclairées et de parler sans détour du VIH.

L’ancien capitaine de l’équipe galloise de rugby reprenait la parole pour la première fois en public depuis l'annonce de son statut sérologique. Il a évoqué les réactions bouleversantes et le soutien populaire qui ont suivi cette nouvelle, ainsi que la diffusion du documentaire de la BBC relatant sa vie avec le VIH. Ce dernier inclut notamment une séquence sur sa participation au triathlon International Iron Man au Pays de Galles.

Il a également parlé de sa volonté de montrer au grand public que le virus n’empêche pas de vivre sainement et en pleine forme pendant de nombreuses années. Pour le champion, trop peu de personnes savent que, grâce aux progrès actuels de la médecine, les personnes vivant avec le VIH, qui suivent un traitement efficace ne peuvent plus transmettre le VIH.

« J’avais envie de remettre délibérément la stigmatisation en question », a déclaré M. Thomas. « Je voulais montrer à tout le monde que j’étais capable de nager 4 km dans la mer, de faire 180 km en vélo et de courir un marathon avec le VIH. Si j’en suis capable, alors nous pouvons tout faire. Depuis lors, je n’ai reçu que des messages de soutien et de sympathie. »

Animée par le Directeur de l’équipe de l’ONUSIDA d’appui aux régions pour l’Europe de l’Est et l’Asie centrale, Vinay Saldanha, cette rencontre a mis en lumière le potentiel des partenariats visant à mettre fin au sida. Y participait un panel de spécialistes du monde entier travaillant dans le domaine des organisations dirigées par les communautés, du financement et des partenariats internationaux, ainsi que des activistes vivant avec le VIH.

Bruce Richman est militant, fondateur et directeur exécutif de la campagne Indétectable = Intransmissible (I = I). Il a d'abord évoqué l’importance de la campagne I = I pour surmonter les stigmatisations des personnes vivant avec le VIH et affectées par le virus. Il a ensuite expliqué comment la campagne s’est transformée en mouvement populaire visant à réduire la peur et l’incompréhension entourant le VIH.

« I = I libère les personnes vivant avec le VIH de la crainte de transmettre le virus », a expliqué M. Richman. « Cela fait plus de 35 ans que les stigmatisations liées aux VIH nous accompagnent et nous tuent. I = I jette les bases de notre partenariat pour mettre un terme à la stigmatisation. »

Marion Wadibia, responsable de NAZ Project, une organisation caritative londonienne dédiée à la santé sexuelle, a quant à elle abordé la manière dont les partenariats peuvent apporter aux personnes oubliées des services de santé sexuelle adaptés aux différentes cultures. « Nous devons intégrer l’aspect ethnique dans notre travail », a-t-elle indiqué.

Elle a été rejointe par d’autres spécialistes qui ont évoqué l’importance d’utiliser des approches plus audacieuses sortant des sentiers battus en vue de mettre fin au sida dans toutes les communautés et auprès de toutes les populations. Rageshri Dhairyawan du Barts Health NHS Trust à Londres a pris comme exemple le programme Soul Sisters. Ce dernier apporte un soutien, des services de santé sexuelle et une prévention du VIH aux femmes victimes de violences conjugales. « Les violences à l’égard des femmes et des filles sont un vecteur essentiel de la transmission du VIH », a indiqué M. Dhairyawan.

Organisée par Gilead Sciences, la conférence « Together We Can » a rassemblé un aréopage de spécialistes, de scientifiques, de chercheurs et chercheuses, d'activistes de la cause du VIH, ainsi que des organisations communautaires de personnes vivant avec le VIH afin d’échanger sur les dernières avancées en vue de mettre fin au sida en Europe.

Une attention toute particulière a été accordée aux épidémies de VIH, qui s’intensifie en Europe de l’Est et en Asie centrale. Les progrès pour atteindre les objectifs 90–90–90 ont été examinés à la loupe, et une place d'honneur a été réservée aux villes et agglomérations qui ont rejoint le réseau Les villes s’engagent. Les spécialistes ont également abordé les modèles de soin destinés à la population vieillissante vivant avec le VIH ainsi que l’élimination des stigmatisations et discriminations liées au virus.

Des webcasts, des présentations et des ePosters de la 17e conférence européenne sur le sida sont disponibles pendant trois mois dans la Resource Library de l’European AIDS Clinical Society.

Feature Story

Promouvoir pas à pas l’égalité des sexes au Brésil

30 octobre 2019

Daniela de Barros, assistante aux finances au sein du bureau de pays de l’ONUSIDA au Brésil, est également un point focal de l’ONUSIDA pour le genre en Amérique latine et aux Caraïbes.

Lorsqu’on lui demande d’où vient son envie d’aider les autres et de défendre l’égalité, elle se souvient d’un geste de générosité dans son enfance. « C’était un de ces moments où un rêve devient soudainement réalité. Quand ma sœur et moi étions petites, nos parents ne pouvaient pas nous payer de cours de danse classique. Mais la sœur de leur meilleur ami avait une école de danse et, un jour, elle nous a invitées à participer gratuitement à ses cours. Depuis, je n’ai jamais cessé de danser. » Madame de Barros explique que la danse lui a appris la discipline, l’organisation, la concentration et à faire le lien entre le « corps et l’esprit » aussi bien dans sa vie privée que professionnelle.

« Outre ces compétences fondamentales que j’utilise constamment dans mon travail et avec mes deux ados, j’ai tiré un autre enseignement essentiel de mes années de danse classique : j’ai appris à créer un lien avec moi-même et à révéler mon potentiel et ma force intérieure », déclare-t-elle. « Et n’est-ce que ce que nous attendons d’une initiative aussi importante que le Plan d’action pour l’égalité des sexes de l’ONUSIDA ? Autonomiser, émanciper et faire évoluer toutes les femmes au sein et en dehors de notre organisation ? »

À son poste de surveillance des aspects financiers, administratifs et opérationnels au sein du bureau de pays de l’ONUSIDA, madame de Barros a constaté que la gestion du changement est primordiale pour préserver la motivation du personnel. « Même si un changement est source d’insécurité, en définitive, il peut insuffler une bouffée d’air frais. J’ai appris à reconnaître que cela est important pour les organisations. »

Madame de Barros est persuadée qu’il est temps d’encourager les femmes à croire à la faisabilité de leurs objectifs. « Le Plan d’action pour l’égalité des sexes au sein de l’ONUSIDA renforce non seulement la confiance que nous avons en nous et notre courage, mais il invite aussi les hommes à apporter leur soutien à leurs collègues femmes », continue-t-elle.

Madame de Barros est certaine que « l’ONUSIDA l’a choisie », plutôt que l’inverse. « J’ai étudié les relations internationales et j’ai toujours voulu travailler pour les Nations Unies, mais j’avoue n’avoir jamais entendu parler de l’ONUSIDA jusqu’à ce qu’un ami me dise de postuler à mon poste actuel », se souvient-elle. « J’ai beaucoup évolué et appris de l’organisation. »

Elle raconte que passer le cap de la quarantaine a été source de changements considérables chez elle. Elle veut à présent s’engager dans des projets qui transforment la vie des gens. Elle donne ainsi depuis six mois des cours de danse classique à des femmes et elle va bientôt concrétiser ce qu’elle décrit comme « la renaissance d’un vieux rêve » : enseigner la danse à des enfants et des ados vivant dans des communautés déshéritées de Brasília où elle réside.

« J’aime me dire que la danse classique correspond au principe suivant du bouddhisme : nous percevons notre monde extérieur de l’intérieur. En travaillant sur notre monde intérieur, nous pouvons changer notre environnement. Là est la force de la danse, et c’est la voie qu’elle nous montre. C’est exactement ce que je souhaite transmettre aux enfants et aux femmes dans mon projet. »

Region/country

Feature Story

À la recherche d’un remède contre le VIH : un laboratoire belge étudie l’augmentation de la charge virale

17 octobre 2019

Linos Vandekerckhove a fait ses études dans une école de médecine, décision logique pour quelqu’un féru de biologie dans sa jeunesse. En 2001, après avoir travaillé deux ans dans le domaine de la médecine interne, il a eu la chance de passer une année entière en Afrique du Sud.

« Je me suis retrouvé au cœur de la tempête. Chaque jour ou presque, une personne venait dans la clinique pour mourir dans les 48 heures d’une maladie liée au sida », se souvient-il.

Il revient transformé dans sa Belgique natale. « Cette expérience m’a ébranlé, car, en Europe, le traitement était disponible immédiatement, et d’un coup, j’ai eu l’impression que certaines personnes payaient très cher. »

Ne souhaitant pas retourner en milieu hospitalier, il choisit de travailler quelques jours par semaine dans un laboratoire de virologie spécialisé dans le VIH. Après son doctorat, il souhaite rester dans la recherche sur le VIH et intègre l’hôpital universitaire de Gant en Belgique. Après plusieurs années à travailler auprès des patientes et patients, il finit par dégager plus de temps à consacrer à la recherche. En 2009, il ouvre son propre laboratoire, le HIV Cure Research Center Ghent, et un an plus tard, il passe cinq mois aux États-Unis à San Francisco pour se familiariser avec les recherches sur un remède.

« Mon congé sabbatique m’a permis de prendre de l'élan », explique-t-il. Son laboratoire de recherche emploie aujourd’hui 20 personnes. 

Son équipe vient de terminer une étude auprès de 11 personnes vivant avec le VIH. Il s’agissait d’interrompre leur thérapie antirétrovirale afin de permettre aux scientifiques d’observer l’augmentation de la charge virale. 

« Un comité d’éthique a dû valider notre protocole et nous avons bien entendu prévu des échanges avec les patientes et patients afin d’analyser les facteurs de stress liés à l’arrêt de leur traitement et aux essais consécutifs », indique M. Vandekerckhove. Son équipe a fait en sorte que les huit à neuf procédures soient faiblement invasives et durent une seule journée, afin que les volontaires puissent retourner travailler au bout de deux jours. Une équipe technique se rendait régulièrement chez les volontaires pour prélever des échantillons de sang afin de réduire les inconvénients. 

« Nous souhaitions impliquer les volontaires au maximum et leur montrer notre soutien du début à la fin », explique-t-il. 

Deux conclusions émergent de l'étude : 15 à 36 jours sont nécessaires à l’augmentation de la charge virale et cette dernière se produit de manière aléatoire. L’équipe a en effet découvert plus de 200 évènements distincts à l’origine de l’augmentation, que ce soit dans les intestins, les nœuds lymphatiques ou « à peu près partout où des cellules immunitaires sont présentes. »

L’équipe autour de M. Vandekerckhove a également découvert que le virus développe une forme propre, similaire à un code-barres ou à une empreinte digitale, selon l’endroit du corps où il se multiplie. L'équipe de recherche a identifié plusieurs virus, ce qui indique qu’il ne s’agit pas d’un seul et même virus qui surgit d’un réservoir, mais que l’augmentation repose sur de nombreux évènements.

« Nous avons analysé 30 codes-barres par type de cellules et près de 400 codes-barres par personne », indique-t-il. 

Face à ce volume, l'équipe a demandé l’aide de virologues et de spécialistes en statistique. 

« Notre étude révèle que c’est une erreur d’utiliser un médicament qui ne vise que les nœuds lymphatiques. Elle prouve au contraire qu’il faut se concentrer sur plusieurs organes et non pas se limiter à un seul en particulier », continue M. Vandekerckhove.

Peter Godfrey-Faussett, conseiller scientifique auprès de l’ONUSIDA, a félicité le HIV Cure Research Center Ghent. « Un travail aussi détaillé améliore notre compréhension des réservoirs où le VIH « se cache » au cours d’un traitement réduisant la présence du virus dans le sang », explique-t-il.

Selon lui, cette étude met en avant les nombreux défis présentés par le virus, car le VIH peut se multiplier à partir de réservoirs multiples et variés. « Voilà pourquoi il est si important de comprendre parfaitement la nature des réservoirs pour trouver un remède. »

M. Vandekerckhove reste optimiste et rappelle que la thérapie génique a relevé pendant longtemps de la science-fiction et qu’elle est aujourd’hui une réalité. 

« Nous devons mettre la recherche à la portée des patientes et patients », précise-t-il. Pour lui, un remède est un aspect du VIH parmi beaucoup d’autres à ne pas oublier.

Son compatriote, Jonathan Bossaer, partage entièrement cet avis. Il y a dix ans, il est tombé très malade en Afrique du Sud et il a découvert peu après son statut sérologique positif. Après plusieurs années d’errance et la mort d’un ami, il s’est rendu compte qu’il était temps de changer.

« J’ai pu me défaire de la frustration et de la honte qui m’ont accompagné pendant près de huit ans. Cela m’a libéré », se souvient M. Bossaer. Il crée par la suite une association visant à sensibiliser sur la stigmatisation liée au VIH. « Positively Alive s’est fixé trois missions principales : informer les personnes sur le VIH, faire taire les craintes vis-à-vis du VIH et aider à mettre un terme au VIH en récoltant de l’argent » explique-t-il.

La moitié des fonds collectés est envoyée à un orphelinat en Afrique du Sud et l’autre est versée au centre de recherche de M. Vandekerckhove. « Mettre un terme à l’épidémie de VIH et de sida est un véritable défi. La recherche sur un remède et un vaccin ont besoin de notre soutien inconditionnel », poursuit M. Bossaer. 

Après un bref silence, il continue : « La bataille est loin d’être gagnée, mais nous sommes en bonne voie. »

Feature Story

Ramener la prévention du VIH sur le devant de la scène lors la Marche des fiertés au Brésil

17 octobre 2019

En juin 2019, plus de 3 millions de personnes sont descendues dans les rues de São Paulo pour fêter ensemble la Marche des fiertés lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexuelles (LGBTI), ainsi que le 50e anniversaire des émeutes de Stonewall qui ont marqué un tournant dans la lutte pour les droits LGBTI. Pour Almir Nascimento, chef d’entreprise gay, 2019 a été l’année de son retour dans l’organisation de cette manifestation après 20 ans d’absence.

Sa décision est la conséquence d’un constat alarmant : au Brésil, le nombre de nouvelles infections au VIH ne cesse d’augmenter chez les jeunes, en particulier les jeunes gays et les femmes transgenres. Pendant longtemps, M. Nascimento avait pourtant cru que la mobilisation des années 1990 et l’arrivée de la thérapie antirétrovirale suffiraient à mettre un terme à l’épidémie du VIH.

« L’épidémie avait atteint son point culminant lorsque j’ai participé pour la première fois à l’organisation de la Marche en 1999 et 2000. À l’époque, j’avais l’impression que nous avions fait des progrès majeurs et j’étais persuadé que cela suffirait pour arrêter le VIH », se souvient-il. « Mais, il y a quatre ou cinq ans, j’ai commencé à remarquer une recrudescence des nouvelles contaminations parmi les personnes gays, bisexuelles et transgenres et, pire encore, qu’elles décédaient très jeunes des suites du sida. Cette situation m’a poussé à revenir. J’ai aidé à l'organisation du défilé en mettant en place une discussion publique sur le VIH et le sida au sein de notre communauté. »

En 2018, 900 000 personnes environ vivaient avec le VIH au Brésil et les nouvelles infections avaient augmenté de plus de 20 % par rapport à 2010. La prévalence du VIH parmi la population adulte est estimée à 0,5 %, mais elle atteint 30 % environ chez les personnes transgenres et près de 18,3 % chez les gays et autres hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes.

M. Nascimento est le propriétaire d’un sauna gay à São Paulo. Il déclare qu’il s’efforce de s’assurer que ses clients savent se protéger correctement du VIH et d’autres infections sexuellement transmissibles. Il fait également équipe avec les services de santé de São Paulo, par exemple pour distribuer gratuitement des préservatifs. Plus récemment, une équipe de recherche dans le domaine de la santé a été invitée dans son sauna pour recruter des volontaires dans le cadre de projets pilotes sur la PPrE (prophylaxie pré-exposition), un comprimé qui empêche la contamination au VIH.

« Il est indéniable que les gays et les personnes transgenres sont les populations les plus touchées au Brésil. J’ai toutefois remarqué que les associations organisatrices de rassemblements lesbiens, gays, bisexuels et transgenres, dont la Marche de São Paulo, ne proposaient plus de programmes efficaces contre le VIH », explique-t-il. « C’est la raison pour laquelle nous avons décidé d’inviter des délégations des Prides organisées dans les 27 capitales fédérales du Brésil, ainsi que dans une douzaine des plus grandes villes de l’État de São Paulo. Nous estimons en effet que ces évènements rassemblent au total plus de 18 millions de personnes par an. »

Un tel public représente pour M. Nascimento non seulement une chance, mais aussi une responsabilité d’envoyer des messages de prévention du VIH et de non-discrimination à l’attention de la communauté LGBTI.

« Certaines équipes d'organisation de ces marches rechignent toujours à intégrer des discussions sur le sida à leur manifestation par peur de la stigmatisation et de la discrimination. Au contraire, ces évènements soudent tout le monde. Nous devons saisir l’opportunité de discuter ouvertement et d’informer les gens sur la prévention du VIH. Cela peut sauver des vies. »

Jouissant du soutien du bureau de l’ONUSIDA au Brésil et d’autres partenaires clés, M. Nascimento et la São Paulo LGBT Pride Parade Association organisent actuellement la troisième réunion de prévention et de santé destinée aux jeunes LGBTI. Elle se tiendra en novembre.

« Après notre première réunion en 2017 dédiée à la prévention du VIH parmi les jeunes lesbiennes, gays, bisexuel(le)s et transgenres, plus de 20 % des associations organisatrices d’une Marche participantes ont commencé à proposer des discussions similaires dans leur ville. Notre objectif est simple : que chaque responsable de défilé sache comment mener ce type de format, et que les associations organisent leurs propres réunions au cours de la semaine des fiertés et tout au long de l’année. »

Region/country

Feature Story

VIH au Brésil : par les jeunes et pour les jeunes

11 octobre 2019

Au Brésil, les nouvelles infections ont augmenté de plus de 20 % entre 2010 et 2018. Par conséquent il est essentiel que les jeunes aussi se mettent à parler du VIH et des moyens de protection. C’est la mission que s’est donnée un projet mené par le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF).

Jonas da Silva consulte l'un de ses comptes sur les réseaux sociaux à la recherche d’informations sur les prochaines soirées et manifestations publiques à Salvador. Il chatte aussi en ligne avec d’autres jeunes, échange sur le sexe, sur l'utilisation de préservatifs avec leurs partenaires (le cas échéant), sur leurs connaissances en matière de prévention du VIH et sur leur dépistage. 

« Ce qui est cool dans ce projet, c’est que les jeunes s’adressent aux jeunes. Nous n’avons pas besoin de nous exprimer différemment, nous utilisons notre argot pour parler du VIH », explique-t-il. « Cette proximité est vitale. Nous constatons que les jeunes nous font confiance et c’est à cela que nous reconnaissons que les informations nécessaires ont touché leur cible. »

M. da Silva et 30 autres jeunes ont été formés pour travailler comme bénévoles au sein du projet Viva Melhor Sabendo Jovem (VMSJ) à Salvador. Leur mission est de sensibiliser les gens de leur âge sur l’importance du dépistage et de la prévention du VIH. Pour cela, l'équipe est présente là où se trouve leur groupe cible : sur Internet et en ville.

Le projet suit le calendrier des fêtes de rue traditionnelles et des festivals, en mettant l’accent sur les manifestations attirant un large public de jeunes. Il répond ainsi à une attente spécifique des populations clés demandant d’assurer une veille des évènements publics où se retrouvent les jeunes lesbiennes, gays, bisexuel(le)s, transgenres et intersexuel(le)s. Dans l’intimité de leur camionnette colorée, le Test Truck, M. da Silva et son équipe de bénévoles conseillent sur le VIH et effectuent des dépistages en toute confidentialité.

Depuis son lancement en août 2018, plus de 1 000 jeunes entre 16 et 29 ans ont fait un test du VIH au cours de la trentaine d’interventions du Test Truck. Dans le cadre d’un programme de promotion du dépistage parmi les adolescent(e)s et les jeunes, les bénévoles interviennent aussi dans les écoles. L'équipe y organise des ateliers sur le VIH et d’autres infections sexuellement transmissibles ou anime des discussions sur la sexualité et la santé sexuelle. Cette offre a été suivie par plus de 400 élèves au cours des six premiers mois du projet.

« La stratégie de sensibilisation par les jeunes et pour les jeunes menée par le VMSJ Salvador permet de les impliquer davantage dans ces activités. Ils et elles prennent ainsi conscience de l’importance de la prévention et des soins du VIH, » indique Cristina Albuquerque, directrice de la santé et du VIH/sida pour l’UNICEF au Brésil. « Les jeunes qui se font dépister au cours de nos activités saluent l’initiative et déplorent la rareté de ces services en ville. »

En 2018, selon une estimation du ministère de la Santé, les jeunes de 15 à 24 ans représentaient près de 15 % des nouvelles contaminations au VIH à Salvador.

« Pour nous aussi, les bénévoles, cette expérience est importante, car nous commençons à faire plus attention à nous, à mettre en pratique pour nous-mêmes ces méthodes de prévention et à diffuser ces informations autour de nous, auprès de nos proches et de notre famille », continue M. da Silva.

Le projet est mis en place en partenariat avec GAPA Bahia, l'une des premières organisations non gouvernementales dédiées au VIH dans le pays, avec le soutien du bureau brésilien de l’ONUSIDA. Les jeunes bénévoles, sans exception, ont subi une procédure de sélection rigoureuse, puis un programme de formation abordant p. ex. les droits de l’homme, les conseils et les informations sur le VIH et les autres infections sexuellement transmissibles. L'équipe a également obtenu des informations sur les programmes communautaires, le fonctionnement du système public de santé et les services liés au VIH disponibles à Salvador. Cette initiative comprend des formations continues sur des thématiques afférentes.

« L'une des choses les plus importantes que j’ai apprises est d’accepter les choix des autres. Notre rôle se limite à fournir les informations et les conseils qui nous semblent convenir le mieux au passé et au comportement de la personne », précise Islan Barbarosa, un autre bénévole.

« Ce projet est une réponse importante à la demande de dépistage du VIH dans la ville. Elle émane en particulier des populations clés qui évitent souvent de recourir aux offres du service public. Nous apportons le dépistage du VIH là où se trouvent ces personnes », conclut Mme Albuquerque.

Region/country

Feature Story

20 ans d’engagement en faveur de la riposte au VIH au Brésil

14 octobre 2019

Sept ans après avoir découvert sa séropositivité, Jair Brandão attendait un rendez-vous médical dans une clinique de Recife, une ville du nord-est du Brésil, lorsqu’un autre patient lui a indiqué qu’il pouvait bénéficier d’une assistance psychosociale auprès d’une organisation non gouvernementale des environs. Même si M. Brandão avait déjà accepté à cette époque son statut sérologique, ce qui lui avait toutefois pris plusieurs années, trois sessions de conseils ont suffi pour comprendre qu’il avait l’étoffe d’un militant de la lutte contre le VIH.

« J’étais très content, mais j’avais aussi peur, car je ne savais pas grand-chose sur les lieux où se joue la politique, ni sur le sida et les politiques de santé. Je n’avais aucune idée sur la manière de participer aux débats politiques », se souvient M. Brandão, qui, 20 ans plus tard, est une figure de proue du mouvement du VIH au Brésil. « J’ai dû commencer par m’accepter en tant que personne vivant avec le VIH, et cela n’a pas été une mince affaire. Puis il m’a fallu me renseigner sur le virus et me soigner correctement. Ce n’est qu’à partir de là que j’ai commencé à découvrir les problèmes sociaux et politiques. »

M. Brandão est persuadé qu’il a un talent naturel pour le militantisme. « Certaines personnes sont nées pour cela », explique-t-il. « Être un militant signifie ne pas tenir en place, mais aussi ne pas accepter les injustices et la violation des droits. Je pense que je suis né avec ce don, car j’ai toujours mené des actions, même sans savoir que c’était du militantisme, et que j’ai toujours eu à cœur d’aider et d’autonomiser les autres. »

Après avoir participé à trois des quatre réunions de haut niveau sur le sida aux Nations Unies et à celle sur la tuberculose organisée en 2018, M. Brandão mesure combien il est difficile d’entrer en contact avec d’autres membres de la société civile et des représentants d’autres pays. Il parle en effet le portugais qui n’est pas une langue officielle des Nations Unies. « Apprendre une autre langue est un défi important pour nous au Brésil. Nous devons connaître au moins l’espagnol. Seuls de rares militants parlent suffisamment bien anglais pour intervenir au cours de ce type d’évènements. »

En juillet 2019, M. Brandão a fait partie d’une délégation représentant des organisations non gouvernementales qui était invitées à participer au Forum politique de haut niveau pour le développement durable organisé aux États-Unis, à New York. Il représentait RNP+ (le réseau national de personnes vivant avec le VIH et le sida) en plus de sa propre ONG, Gestos : Soropositividade, Comunicação e Gênero.

« Il est essentiel que la société civile participe pleinement à la mise en place et au suivi national des mesures du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Nous n’atteindrons pas les Objectifs de développement durable sans l’engagement total de la société civile », continue-t-il. « Défendre le programme du sida implique également de discuter de problématiques transversales tout aussi importantes. »

Au titre de consultant du projet Gestos et de membre de RNP+, M. Brandão dirige également le projet « Indicateur de stigmatisation des personnes vivant avec le VIH 2.0 » pour le Brésil. Avec d’autres membres de Gestos et de réseaux nationaux de personnes vivant avec le VIH, ainsi qu’avec le soutien du Programme des Nations Unies pour le développement et l’ONUSIDA, il a aidé à former 30 personnes dans sept villes du pays aux techniques d’entretien. En deux mois, ces dernières ont mené 1 800 entretiens qui ont permis de recueillir des informations sur les stigmatisations et discriminations liées au VIH. Les premiers résultats seront publiés d’ici la fin novembre.

« Les militantes et militants qui ont mené les entretiens ont tiré une grande force de cette mission, après avoir écouté et vécu les expériences passées et présentes de nombreuses personnes, dont elles ne pouvaient parler à personne », se souvient-il. « L’épidémie du sida a commencé il y a 40 ans, mais les stigmatisations et discriminations sont encore monnaie courante. L’Indicateur de stigmatisation 2.0 est un outil qui nous en apporte la preuve au Brésil. Il nous permettra de lutter pour des lois et des services liés au VIH dénués de stigmatisation et de discrimination. »

M. Brandão déclare croire dans la force de la collaboration et des partenariats pour faire avancer le progrès social.

« Nous devons retrouver dans nos actions et dans nos cœurs la solidarité et l’esprit de communauté qui ont aidé à créer le mouvement de lutte contre le sida », poursuit-il. « Il est essentiel de repenser les stratégies et de créer des moyens de promouvoir le changement. Il est primordial d’autonomiser les nouvelles et nouveaux activistes, en particulier parmi les jeunes. Cette génération a besoin de se sentir accueillie tout en étant prête à recevoir des informations de la part des activistes de la lutte contre le sida qui l'ont précédée. Il est temps d’unir nos forces, pas de nous diviser. »

Region/country

Feature Story

Investir dans les communautés pour faire la différence en Afrique occidentale et centrale

09 octobre 2019

Plus de 5 millions de personnes vivent avec le VIH en Afrique occidentale et centrale, la région accuse un retard pour parvenir à l’objectif de mettre fin au sida d’ici 2030. Chaque jour, on y recense plus de 760 nouvelles contaminations et seulement 2,6 millions des 5 millions de personnes porteuses du virus suivent un traitement.

Un désintéressement de la classe politique, des systèmes de santé fragiles et un faible soutien accordé aux organisations citoyennes, auxquels viennent s’ajouter des barrières telles que la pénalisation liée au VIH, sont les principaux obstacles à toute amélioration. Un plan de rattrapage régional vise à aider la région à combler son retard pour atteindre son objectif de tripler le nombre de personnes suivant une thérapie antirétrovirale d’ici 2020 et de contrôler l’épidémie. Même si des progrès sont faits, leur rythme reste trop lent. La situation des enfants est particulièrement préoccupante dans cette région : seulement 28 % des moins de 15 ans vivant avec le VIH ont accès à une thérapie antirétrovirale.

« Nous avons besoin de réglementations et de programmes qui mettent l’accent sur les personnes et non les maladies. Cela permettra d’impliquer totalement les communautés dès les premières phases de conception, d’élaboration et de réalisation des stratégies de santé », a expliqué Gunilla Carlsson, Directrice exécutive par intérim de l’ONUSIDA, lors de son allocution au cours de la 6e Conférence de reconstitution des ressources du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme organisée en France à Lyon les 9 et 10 octobre.

En effet, les exemples d’investissements réussis dans les communautés ne manquent pas. « La riposte est plus rapide et efficace lorsqu’elle est menée par les personnes qui en ont le plus besoin », a indiqué Jeanne Gapiya qui vit avec le VIH depuis de nombreuses années et est à la tête de l’organisation non gouvernementale ANSS au Burundi.

Le dépistage et la prévention du VIH sont plus efficaces, en particulier parmi les groupes marginalisés, lorsqu’ils sont offerts par les communautés. « La plupart des personnes dépistées par les communautés le faisaient pour la première fois, ce qui illustre bien l’importance unique et cruciale des organisations citoyennes », a expliqué Aliou Sylla, directeur de Coalition Plus Afrique.

L’un des défis fondamentaux de la région consiste à réduire le nombre de nouvelles infections parmi les enfants et de garantir que les femmes accèdent aux services dont elles ont besoin. Les réseaux de mères séropositives qui s’entraident pour rester en bonne santé et pour éviter la transmission du VIH de la mère à l’enfant constituent un moyen efficace d’améliorer la santé aussi bien des mères que des enfants.

« Notre stratégie reposant sur les communautés fonctionne. Les endroits où nous sommes présents ont atteint l’objectif de zéro nouvelle infection au VIH parmi les enfants et tous les enfants qui viennent chez nous suivent un traitement », a indiqué Rejane Zio de Sidaction.

Le financement reste toutefois un problème. Même si les ressources totales allouées à la riposte au sida ont augmenté et que le VIH reste le thème prioritaire du développement de l’aide sanitaire, les investissements nationaux ne représentent toujours que 38 % des ressources disponibles pour lutter contre le VIH en Afrique occidentale et centrale, contre 57 % dans le monde entier. L’accélération de la riposte régionale nécessite d’intensifier les investissements nationaux et de renforcer simultanément l’aide apportée par les donateurs internationaux. Bintou Dembele, directrice exécutive d’ARCAD-Sida au Mali, a expliqué : « Les communautés disposent de l’expertise, mais les fonds nous manquent pour satisfaire les besoins. »

Les stratégies impliquant la base de la société dans la région jouissent d’un support croissant. Reconnaissant l’importance des efforts menés par les communautés, Expertise France et l’Institut de la Société Civile pour la Santé et le VIH en Afrique de l’Ouest et du Centre ont annoncé un nouveau partenariat, le 9 octobre. « L’institut réunit 81 organisations de 19 pays. Sa mission consiste à améliorer l’influence politique au niveau national et international, ainsi qu’à galvaniser l’expertise de la société civile dans la réalisation des programmes. Ce partenariat attire l’attention sur notre contribution essentielle », a déclaré Daouda Diouf, directeur d’Enda Santé et président du comité de direction de l’institut. « La situation en Afrique de l’Ouest et centrale reste une priorité. Il est indiscutable que les stratégies impliquant les communautés offrent plus de souplesse et sont mieux adaptées pour apporter une réponse aux pandémies », a ajouté Jérémie Pellet d’Expertise France.

L'adoption d'une approche mettant en avant les individus figure au cœur des réformes régionales. On assiste à un renforcement de la volonté régionale d’accélérer la riposte et de renforcer les stratégies communautaires éprouvées. Cela donne espoir en l’avenir pour ce qui est de la lutte contre l’épidémie du VIH en Afrique occidentale et centrale.

Feature Story

L’ONUSIDA et le Luxembourg collaborent en Afrique occidentale et centrale

09 octobre 2019

La prévention et le traitement du VIH en Afrique occidentale et centrale continuent d’accuser un retard par rapport au reste du continent. Le résultat : des millions de personnes sont exposées à une infection au virus et 2,4 millions de personnes vivant avec le VIH n’ont pas accès à un traitement. Suite aux appels à action formulés au cours de la Réunion de haut niveau des Nations Unies sur le VIH/sida de 2016 et lors du sommet de l’Union africaine de juillet 2016, l’ONUSIDA et ses partenaires ont lancé un plan visant à accélérer les efforts pour mettre fin aux nouvelles infections au VIH et garantir que chaque habitant de la région a accès un traitement pouvant lui sauver la vie.

Même si les ressources disponibles en Afrique occidentale et centrale pour la riposte au VIH ont augmenté de 65 % entre 2006 et 2016 pour atteindre 2,1 milliards de dollars (estimation), la plupart de ces pays continuent de dépendre fortement des donateurs. On assiste cependant à un recul des financements internationaux et les investissements actuels sont loin de couvrir les besoins pour assurer un changement pérenne.

Le Luxembourg est un pays qui maintient ses investissements en Afrique occidentale et centrale. Marc Angel, président de la Commission des Affaires étrangères et de la Coopération au développement au Parlement du Grand-Duché et ambassadeur de l’ONUSIDA pour les objectifs 90–90–90, s'est récemment joint à l’ONUSIDA pour une visite au Sénégal. Le but de la délégation était de voir comment l’ONUSIDA utilise la contribution du Luxembourg pour accélérer la riposte au sida en Afrique occidentale et centrale afin de faire la différence.

Grâce aux financements du Luxembourg, l’ONUSIDA et ses partenaires ont fondé l’Institut de la Société Civile pour le VIH et la Santé en Afrique de l’Ouest et du Centre. Cette entité innovante a pour mission de coordonner les quelque 80 organisations non gouvernementales qui œuvrent en faveur des intérêts des personnes affectées par le VIH dans 20 pays de la région.

Le CEPIAD est l'un de ces groupes. Il s’agit du premier centre d’Afrique occidentale spécialisé dans la réduction des risques chez les personnes s’injectant des drogues. Le personnel médical et d’assistance sociale y fait figure de pionnier dans la région. Il traite les toxicomanes en adoptant une approche de santé publique plutôt qu’en les jugeant. À Mbour, le centre de soins destiné aux populations clés, M. Angel a entendu les témoignages de personnes qui s'étaient injectés des drogues sur la manière dont le centre les aide à retrouver une place dans leur famille et dans la société.

« Le seul moyen de parvenir aux objectifs 90–90–90 est d’impliquer les populations clés », a déclaré M. Angel. « Les personnalités publiques et de la société civile du Sénégal doivent continuer de travailler main dans la main pour atteindre cet objectif. L’aspect des droits humains dans la lutte contre le sida et pour la santé dans le monde est essentiel pour la coopération au développement du Luxembourg. Avec l’ONUSIDA, nous devons garantir que les voix s’élevant des communautés sont entendues et que les efforts atteignent tout un chacun, notamment les populations vulnérables, sans oublier les enfants. »

M. Angel a visité le service de traitement pédiatrique du centre hospitalier Albert Royer où il a rencontré des jeunes vivant avec le VIH. Ils lui ont parlé du traitement contre le virus qui leur permet de mener une vie normale. M. Angel a noté les avancées faites pour arrêter les nouvelles infections parmi les enfants au Sénégal ainsi que les efforts touchant au VIH, mais aussi à la santé de la reproduction et sexuelle afin d’éviter les nouvelles contaminations parmi les adolescentes et adolescents.

Il a également salué le recul de la prévalence du VIH dans le pays au cours de rencontres avec le ministre de la Santé et de l’Action sociale, Abdoulaye Diouf Sarr, et avec la secrétaire-générale du comité national sénégalais contre le sida, Safiatou Thiam.

Il a cependant souligné des aspects préoccupants comme la prévalence élevée du virus parmi les populations clés et il a rappelé que l’accès au traitement pour ces groupes est fondamental pour mettre fin au sida d’ici 2030. Il a également plaidé pour une augmentation des ressources nationales afin d’apporter une riposte efficace et pérenne au VIH dans le pays.

Region/country

Feature Story

Le premier service hospitalier spécialisé dans le VIH de Londres a transformé la riposte au sida

03 octobre 2019

À son inauguration en 1987 par la Princesse Diana, le Broderip Ward était le premier service dédié aux soins des patients atteints du VIH au Royaume-Uni. Peter Godfrey-Faussett, conseiller scientifique principal à l’ONUSIDA, a débuté sa carrière dans ce service du Middlesex Hospital de Londres. Cette expérience intense et riche en émotions reste gravée dans sa mémoire.

 

Quels sont vos premiers souvenirs liés au VIH ?

J'étais en train de finir mes études de médecine à Londres lorsque les premiers rapports ont été publiés sur ce qui allait être connu comme le VIH et le sida. À l'époque, personne n'imaginait que nous faisions face à une situation inédite. J'étais étudiant en médecine et mes examens finaux approchaient. Je brûlais de connaître les faits, mais il était manifeste que nombre d'entre eux n'étaient pas encore compris. Peu après mes études, j'ai commencé à travailler à l'Hospital for Tropical Diseases de Londres et au Broderip Ward du Middlesex Hospital.

 

Comment le corps médical londonien a-t-il réagi face à ce nouveau défi sanitaire ?

À Londres, les services dédiés au VIH étaient organisés différemment selon les quartiers. Le personnel des cliniques de santé sexuelle, ou services de médecine génito-urinaire comme elles étaient appelées à l'époque, œuvrait pour mettre en place des offres ambulatoires à destination des personnes vivant avec le VIH. Il leur proposait des conseils, une assistance et des soins, mais ces équipes n'étaient généralement pas équipées pour traiter les personnes devant être admises à l'hôpital. Chaque établissement disposait d'une équipe spécialisée différente qui s'occupait du nombre toujours croissant de personnes vivant avec le VIH, et qui en mourait. Beaucoup de patients nécessitant des soins étaient atteints de pneumonie des suites d'une pneumocystose. D'autres souffraient de diarrhées graves persistantes, de problèmes neurologiques ou de maladies de peau, notamment du sarcome de Kaposi.

Nous formions une équipe fantastique autour de Steve Semple. Nous travaillions en collaboration étroite avec le personnel de la James Pringle House, un des centres spécialisés dans la santé sexuelle à Londres. Steve Semple était un pneumologue spécialisé dans la régulation normale de la respiration. Dans d'autres quartiers de Londres, les chefs d'équipe étaient des gastroentérologues, des immunologues ou des spécialistes des maladies infectieuses.

Tous, nous apprenions rapidement à soigner du mieux possible une vaste palette d'infections, de cancers et d'autres maladies tout en développant une meilleure compréhension du tissu et des comportements sociaux de nos patients, gays pour la plupart.

 

Cela a dû être une période éprouvante

C'était, bien entendu, une période incroyablement triste. Nous étions capables de soigner de nombreuses infections opportunistes et d'apporter des conseils et une assistance, mais, à cette époque, le VIH était fatal dans presque 100 % des cas. Nous avons vu l'état de santé de tant de jeunes hommes se détériorer peu à peu ou brusquement avant de les voir mourir. Ces personnes étaient souvent des figures de proue de communautés dynamiques et créatives qui faisaient de Londres une ville si fascinante.

Au cours de mes études de médecine et au début de ma carrière, la plupart des gens que je soignais se trouvaient à la fin de leur vie productive, mais ici, dans le Broderip Ward, des patients avaient mon âge, ils lisaient les mêmes livres, allaient voir les mêmes opéras et pièces de théâtre que moi. Bien souvent, il n'était pas facile de garder la distance requise par ma profession. Je me souviens clairement de tellement d'entre eux, mais aussi de beaucoup de leurs êtres chers et de membres de leur famille.

 

Comment l'ouverture du Broderip Ward a-t-elle transformé les soins apportés aux patients ?

L'infirmière responsable de ce service, Jacqui Elliott, était une femme formidable. Avec Steve Semple, elle nous encourageait à sortir des sentiers battus et à faire preuve d'imagination pour apporter les soins. Il faut savoir qu'à cette époque, l'organisation des hôpitaux était encore à l'ancienne et cloisonnée. L'infirmière en chef et le médecin-chef formaient le haut d'une gigantesque pyramide et il n'était pas rare de retrouver les patients aux échelons les plus bas !

Dès le départ, nous impliquions les patients et leurs partenaires, et, lorsque c'était nécessaire, nous fermions un œil sur le règlement. Notre service était le seul dans l'hôpital à disposer de réfrigérateurs supplémentaires. Ils étaient remplis de plats succulents mijotés et apportés par les partenaires de patients, et il arrivait souvent que ces repas soient partagés avec d'autres patients et le personnel soignant !  

À cette époque, au Middlesex Hospital, les cabines téléphoniques se trouvaient au fond de longs couloirs froids et les chemises d'hôpital étaient des blouses horribles à moitié ouvertes dans le dos. Nous avons été le premier service à installer un téléphone sur le bureau des infirmières afin que les patients puissent passer plus facilement des appels. Nous les avons encouragés à porter leurs propres vêtements et leur robe de chambre, ainsi qu'à entrer et sortir du service quand ils le voulaient. Tout le monde à Broderip travaillait 24 heures sur 24. Nos soirées étaient les plus populaires de l'hôpital.

Nous apprenions et nous avons très certainement fait des erreurs, mais nous avons surement fait partie des premiers professionnels de santé à écouter nos patients et à essayer de leur apporter ce dont ils avaient besoin.

 

Les pratiques médicales ont-elles alors évolué ?

Notre service a rapidement attiré l'attention d'équipes de tout l'hôpital universitaire. Chaque fois que nous faisions face à une situation inédite ou inattendue touchant à n'importe quelle discipline médicale, nous disposions des meilleurs spécialistes dans notre réseau. Les réunions cliniques hebdomadaires attiraient des professionnels de tout l'hôpital ainsi que d'autres établissements londoniens et d'ailleurs.

Ma carrière de médecin en était à ses balbutiements, j'étais terrifié à l'idée de présenter des cas complexes aux experts réunis et de récolter leur avis. Mais je pense que nos patients n'auraient pas pu recevoir de meilleurs soins dans un autre établissement. Nous entretenions des relations étroites avec les équipes de conseil psychosocial et de soins palliatifs qui faisaient tout leur possible pour rendre les derniers moments le plus agréable possible. Nous testions bien entendu de nouveaux antirétroviraux. Beaucoup de nos patients ont participé aux premiers essais pour la zidovudine et quelques-uns ont vu leur état s'améliorer. 

 

Comment les patients, leurs amis et leurs familles ainsi que le personnel ont-ils géré la situation ?

Chaque patient (et parfois patiente) était un individu à part entière qui avait des liens avec ses amis, ses amants et sa famille. Pour certains, toutefois, l'admission au Broderip Ward impliquait de révéler leur sexualité à leur famille, mais ils devaient aussi accepter le VIH ainsi qu'affronter leur mort imminente. Le personnel du service devait toujours faire attention aux informations qu'ils donnaient et à qui, afin d'empêcher les situations gênantes. Certains patients ne préféraient par exemple pas que leur famille sache le service dans lequel ils étaient admis. Une de nos missions consistait à faciliter la révélation de leur statut ainsi qu'à conseiller les patients, leur partenaire et leur famille lorsqu'ils acceptaient la situation. Nous avions également une équipe de maquilleurs pour aider à camoufler les signes du sarcome de Kaposi, ainsi que des diététiciens pour améliorer la nutrition des patients. Il régnait un sens aigu de la camaraderie et les occasions ne manquaient pas de rire, mais aussi de pleurer.

 

De quelle manière l'approche du Royaume-Uni par rapport au VIH a-t-elle évolué à partir des années 1990 ?

L'apparition de thérapies antirétrovirales de plus en plus efficaces a changé la donne. Les premiers traitements étaient toxiques et difficiles à prendre : certains médicaments devaient être pris en mangeant, d'autres à jeun, d'autres devaient être conservés au réfrigérateur et d'autres encore nécessitaient de régler un réveil pour les prendre au milieu de la nuit. Mais ils étaient efficaces.

Les patients de l'hôpital ont commencé à comprendre qu'ils n'allaient pas mourir dans l'année à venir ni dans celle d'après. L'excellent système de santé du Royaume-Uni, le National Health Service (NHS) et le vaste réseau de cliniques de santé sexuelle, assurait à toutes et à tous un accès gratuit à des soins et des traitements professionnels de qualité. Londres a toujours attiré les voyageurs et les migrations. Cette ouverture au monde s'est reflétée dans le diagnostic et le traitement des infections sexuellement transmissibles. En effet, personne n'avait à dire d'où il ou elle venait ni répondre de sa situation vis-à-vis des services de l'immigration. Même pour les soins hospitaliers, les règles pouvaient être interprétées de manière à n'exclure personne.

Une autre évolution majeure a été l'apparition et le financement d'organisations citoyennes au sein des communautés. Les personnes originaires de la diaspora africaine se sont mises à s'entraider, à mieux s'organiser et à se faire entendre. Les services dans les différents quartiers de Londres recevaient différents groupes de la population. Ainsi, dans notre hôpital, nombre de nos patients étaient des hommes gays, alors que l'est de Londres comptait une plus large population de femmes, généralement originaires d'Afrique. Inévitablement, les défis auxquels étaient confrontées les personnes reflétaient leur environnement social, ainsi que les aspects cliniques liés au VIH et spécifiques à leur genre.

Ces derniers temps, on assiste à un changement des systèmes qui ont fait du Royaume-Uni un endroit si accueillant pour les personnes vivant avec le virus. Le financement des cliniques de santé sexuelle et des organisations communautaires est plus limité et les règles concernant l'accès à un traitement auprès du NHS sont respectées de manière plus stricte. D'un autre côté, la plupart des villes du Royaume-Uni restent des endroits dynamiques et tolérants. La communauté gay en particulier a favorisé l'apparition d'un diagnostic, d'un traitement et d'une prévention plus précoces et de meilleure qualité. La stigmatisation, quant à elle, ne fait toujours pas partie du passé, mais je crois que la plupart des personnes peut trouver une clinique et une équipe qui les accueillent et les aident à surmonter les défis liés au virus.

 

Nous disposons aujourd'hui d'une large palette de traitements et de possibilités de prévention. L'épidémie de VIH est-elle terminée au Royaume-Uni ?

Nous réalisons des progrès sensationnels. Chaque année, le nombre de nouvelles infections recule, en particulier à Londres et dans d'autres grandes villes. Des foyers continuent néanmoins d'apparaître, comme récemment parmi les personnes s'injectant de la drogue en Écosse. Les stigmatisations et le déni empêchent toujours des membres de toutes les communautés, notamment parmi la diaspora africaine, de se faire tester et d'avoir accès rapidement à un traitement efficace ou à la prévention.

Et, bien entendu, le traitement est à vie. Ainsi, même si le nombre de nouvelles infections baisse, nous devons continuer d'apporter encore longtemps des soins, une assistance et une bonne surveillance de l'épidémie.

S'abonner à Feature Story