



Feature Story
Utiliser l’éducation pour améliorer la santé et en finir avec le sida
02 février 2018
02 février 2018 02 février 2018Lors de la réunion du Partenariat mondial pour l’éducation, organisée le 2 février par le Sénégal et la France, le Directeur exécutif de l’ONUSIDA Michel Sidibé a évoqué l’importance de l’éducation et de la santé. « Intégrer l’éducation et la santé est fondamental pour réussir à contrôler l’épidémie chez les jeunes. Sans systèmes de santé et d’éducation efficaces, durables et de qualité, nous échouerons auprès des jeunes », a déclaré M. Sidibé. Photo : ONUSIDA/B. Deméocq.
Marieme Faye Sall, Première dame du Sénégal, et Brigitte Macron, Première dame de France, ont inauguré un centre cardio-pédiatrique qui prend en charge le traitement chirurgical des enfants atteints de maladies cardiaques. Financé par la Fondation Cuomo de Monaco, le centre accueille les femmes et les enfants au Sénégal.
Lors de sa rencontre avec Mme Sall, M. Sidibé a insisté sur le fait que la prévention de la transmission du VIH de la mère à l’enfant était indispensable, tout comme l’implication de la communauté. La région d’Afrique centrale et occidentale est à la traîne en ce qui concerne l’accès au traitement et à la prévention, et c’est pourquoi l’ONUSIDA et ses partenaires ont lancé un plan de rattrapage pour l’Afrique centrale et occidentale.
M. Sidibé a également rencontré le Ministre de la Santé et de l’Action sociale Abdoulaye Diouf Sarr ; il a souligné que quelles que soient son identité ou ses origines, chacun a droit à la santé, à l’éducation, à l’égalité des chances et à l’épanouissement.
La Secrétaire générale de l’Organisation internationale de la Francophonie, Michaëlle Jean, soulèvera la question des médicaments contrefaits lors de la prochaine réunion de l’Assemblée mondiale de la Santé au mois de mai.
Nikolai Astrup, Ministre du Développement international norvégien, et M. Sidibé se sont rencontrés en marge de la réunion.
M. Sidibé en compagnie de l’Ambassadrice du Luxembourg, Nicole Bintner. Le Luxembourg est depuis toujours un participant et un donateur actif en Afrique occidentale et centrale.
Quand elle est en bonne santé, une fille peut s’épanouir, grandir, penser, découvrir et apporter sa contribution à sa communauté. Savoir comment rester en bonne santé et accéder à des services de santé de qualité lui permet de se prémunir contre la maladie, de bien manger, de gérer sa santé sexuelle, d’avoir des enfants en bonne santé quand et si elle le souhaite et d’assurer son propre bien-être. L’éducation et la santé sont les deux éléments qui transforment le plus en profondeur la vie d’une fille.
Region/country
Related


Feature Story
Le moment de vérité : briser les barrières
27 février 2018
27 février 2018 27 février 2018Lorsque Robinah Babirye est partie en pension, son secret est devenu difficile à cacher. Dans le dortoir de filles où elle passait la nuit, chacune savait ce que faisaient les autres, en particulier à l’heure du coucher. « C’était difficile de sortir mes médicaments », explique-t-elle. « Les autres se seraient posé des questions ».
Mme Babirye et sa sœur jumelle cachaient leur séropositivité au VIH. Avant l’internat, les filles et leur mère avaient pris l’habitude de prendre leurs médicaments tous les jours à 22 heures, et c’était tout.
Mais lorsque la jeune fille a intégré l’université en 2013 à Kampala, en Ouganda, se cacher est devenu plus difficile. Ses camarades se sont mises à avoir des soupçons et à répandre des rumeurs. Née avec le VIH, elle ne pouvait pas s’empêcher de penser que la vie était injuste.
« À l’époque, je n’avais pas encore accepté que je vivais avec le VIH et que je devrais vivre avec pour le restant de mes jours », raconte Mme Babirye. Elle décrit des années et des années passées à éviter de parler à qui que ce soit de ses visites régulières à l’hôpital ou de son traitement. Puis sa mère est décédée d’un cancer et elle s’est retrouvée totalement démunie.
Regardant par-dessus ses lunettes, elle ajoute : « en voyant ma mère lutter, cela m’a donné de la force, mais quand elle est morte, j’étais terrorisée ».
Mme Babirye a plus ou moins baissé les bras. Elle a cessé de prendre ses médicaments et elle est partie à la dérive.
Asia Mbajja, Fondatrice et Directrice de la People in Need Agency (PINA), une organisation non gouvernementale qui vient en aide aux jeunes vivant avec le VIH en détresse, parle des appels qu’elle reçoit de la part d’adolescents désespérés. Elle a apporté son aide à bon nombre d’entre eux lorsqu’elle travaillait comme coordonnatrice de traitement à l’hôpital pour enfants du Centre conjoint de recherche clinique.
« Je n’arrêtais pas de leur promettre que leur vie allait changer et s’améliorer, mais en grandissant, ce sont leurs besoins qui ont changé », explique-t-elle. « Il fallait que je fasse quelque chose qui ferait une différence ».
En 2012, Mme Mbajja quitte son travail pour créer la PINA. Parmi ses premiers clients se trouve Robinah Babirye, qu’elle connaît depuis l’âge de 10 ans. Elle ne cesse d’insister sur l’importance de prendre sa dose quotidienne de médicaments antirétroviraux.
« Le problème, c’est que l’encouragement enthousiaste d’Asia Mbajja disparaissait dès qu’elle n’était plus dans les parages », raconte Mme Babirye. La jeune femme se sentait définie par le VIH.
« Quand on m’a dit que j’allais devoir prendre des médicaments pour le restant de ma vie, le tout en devant affronter les rumeurs et la stigmatisation, j’ai eu peur d’être coincée pour toujours », explique-t-elle. « Même si je vis avec le VIH, je reste une femme, avec des sentiments ».
En s’engageant auprès de la PINA, en 2014, Mme Babirye est amenée à se rendre à la Conférence internationale sur le sida à Melbourne, en Australie. La jeune femme est alors ravie de découvrir un monde où son statut ne semble pas être un problème, mais à son retour, elle ne peut s’empêcher de penser qu’il existe une ligne qu’elle est incapable de franchir.
Elle se sent lasse. Elle hésite alors entre mettre fin à ses jours et changer de vie pour de bon.
Un jour, elle enfile un t-shirt « Je suis séropositive au VIH » et poste une photo d’elle sur Facebook. « Mon cœur s’est mis à battre si vite, j’étais paralysée à l’idée de voir les commentaires », raconte-t-elle. Elle s’arrête pour reprendre son souffle et ajoute : « Je m’attendais à beaucoup de réflexions négatives, mais les commentaires étaient largement positifs ».
Sa sœur jumelle, Eva Nakato, a du mal à croire ce qu’elle a fait. Après réflexion, elle décide qu’elle ne peut pas laisser sa sœur lutter toute seule, et dévoile elle aussi son statut.
« Quand les gens ont dit qu’il fallait plus de personnes comme elle, cela nous a motivées », explique Mme Nakato.
L’une des premières personnes à féliciter les jumelles, c’est Mme Mbajja. Depuis, le duo est en première ligne dans les actions de la PINA, avec ses témoignages, ses conseils et ses chansons. Mme Nakato explique qu’à l’hôpital pour enfants, elles avaient l’habitude de chanter en groupe ; à la PINA, elles portent la chanson à un tout autre niveau.
« Nous nous sommes mises à utiliser la musique pour faire passer des messages de sensibilisation au VIH », déclare-t-elle. Leurs chansons portent des titres comme Never Give Up (N’abandonne jamais), Yamba (Appel à l’aide) et ARV. Parmi leurs derniers projets en date figurent le lancement d’une série télévisée sur le VIH et les relations sociales, et un documentaire sur les violences sexistes.
« Nous avons rencontré des victimes d’abus sexuels et cela m’a poussée à faire un film », explique Mme Nakato, en ajoutant que les vidéos et la musique peuvent contribuer à faire passer des messages.
Mme Babirye, quant à elle, a terminé ses études universitaires l’an dernier et rêve d’indépendance.
Sur le long terme, elle dit que sa vision est celle d’une génération sans sida et sans stigmatisation. « Pour parvenir à un monde sans sida, chaque individu porte la responsabilité d’agir pour briser les barrières culturelles et sociétales », conclut-elle.
Region/country
Related


Feature Story
Devenir activiste pour en finir avec la discrimination
28 février 2018
28 février 2018 28 février 2018Mis à la porte par ses parents lorsqu’ils découvrent qu’il est gay, Ezechiel Koffi n’a jamais baissé les bras.
« Mes parents m’ont dit que je leur faisais honte et que je vivais la vie d’un pécheur », raconte le jeune homme originaire de Côte d’Ivoire. Ce qui lui fait le plus de mal, ce sont les insultes de sa mère, qui lui dit qu’il n’a aucun respect pour leurs valeurs religieuses. Il les supplie de comprendre qu’il est leur fils et qu’ils devraient l’accepter tel qu’il est.
M. Koffi, âgé à l’époque de 24 ans, séjourne quelque temps auprès d’Alternative, une organisation non gouvernementale lesbienne, gay, bisexuelle, transgenre et intersexe (LGBTI) située à Abidjan, en Côte d’Ivoire, où il est alors bénévole depuis trois ans. Il continue de suivre des cours, tout en admettant qu’il lui arrive alors souvent d’avoir le ventre vide. Psychologiquement, il se sent anéanti. « C’était difficile, mais je ne pouvais plus me cacher », explique-t-il.
Grâce à l’appui de sa sœur aînée, ses parents le laissent finalement rentrer à la maison au bout de six mois. Bien qu’il ait à nouveau un toit permanent au-dessus de la tête et mange correctement, Alternative est devenu son second foyer. Depuis ce temps-là, il est entièrement engagé dans l’organisation. Devenu éducateur VIH et agent de santé communautaire, il brandit fièrement ses certificats sur son téléphone mobile.
Philippe Njaboué, le coordonnateur de projet d’Alternative, décrit l’inépuisable énergie de M. Koffi. « On peut l’appeler à toute heure de la journée ou de la nuit, il est toujours prêt à donner un coup de main et il va souvent au-delà de son rôle en intégrant des gens qui ont été rejetés ». Quand on lui demande s’il est une sorte de famille de substitution pour beaucoup de personnes LGBTI, M. Koffi sourit timidement.
Les nombreux groupes de discussion et de soutien lui ont permis, selon lui, de partager son expérience et d’aider d’autres personnes. Le garçon réservé s’est émancipé. Il n’hésite plus à révéler sa séropositivité au VIH. « Ça fait 10 ans que je vis avec le VIH », explique-t-il.
Il se souvient qu’à l’époque il ne pouvait pas toujours négocier l’utilisation d’un préservatif. Aujourd’hui, il met un point d’honneur à dire à tout le monde que le VIH est une réalité. « Utilisez des préservatifs, on peut vous aider, vous n’êtes pas seuls », s’exclame-t-il.
Il dit se sentir pleinement vivant au sein de la communauté LGBTI très soudée de la ville. « Je suis à l’aise, je peux m’exprimer et c’est épanouissant », ajoute-t-il. Mais il fronce les sourcils quand il évoque la discrimination constante que ses pairs et lui-même rencontrent au quotidien. En plus des moqueries et des doigts accusateurs, M. Koffi déclare que les commentaires homophobes sont omniprésents sur les réseaux sociaux.
« Nous méritons les mêmes droits que les autres et c’est ce qui me motive », explique M. Koffi.
M. Njaboué fait remarquer que la société, la religion et l’État jouent tous un énorme rôle dans le tabou qui entoure l’homosexualité en Côte d’Ivoire. « Un discours récent du directeur d’Alternative a été qualifié par un site web de « Discours du Roi des homosexuels », avec à la clé d’innombrables menaces de mort », raconte-t-il.
Ajoutant que ce cas n’est qu’un exemple parmi d’autres, il estime que la situation ne peut changer que si le gouvernement prend à bras-le-corps la question des droits de l’homme.
« La plupart des gens ne connaissent pas leurs droits, ni la loi, y compris un grand nombre de personnes chargées de la sécurité publique », explique M. Njaboué. « Non seulement le gouvernement doit éduquer les gens, mais il doit aussi condamner les comportements illégaux », ajoute-t-il.
Pour M. Koffi, sa visibilité lui fait prendre des risques, mais il va de l’avant. « Je veux vivre dans un monde sans discrimination fondée sur la race, la religion ou la sexualité ».
Region/country
Related




Feature Story
Pili : un film sur le thème du but universel d’une vie meilleure
28 février 2018
28 février 2018 28 février 2018Binette sur l’épaule, marchant lentement le long d’une route poussiéreuse, Pili, une jeune Tanzanienne, regarde un étal de marché vide. Discutant avec son amie pendant qu’elles défrichent un champ, elle déclare : « Creuser toute la journée, se battre pour gagner de l’argent, je ne pourrai pas faire ça toute ma vie ».
C’est ainsi que commence le film « Pili », qui relate la vie d’une mère célibataire de deux enfants tentant de bâtir une vie meilleure pour elle-même et sa famille. Le travail agricole rapporte moins de 2 dollars par jour et la jeune femme de 25 ans a du mal à joindre les deux bouts, entre les frais de garde des enfants, les fournitures scolaires et les consultations médicales. Pili vit avec le VIH et s’efforce de garder le secret sur sa séropositivité. Elle a peur de la stigmatisation et craint de ne pas pouvoir obtenir de prêt pour payer l’étal de marché qu’elle rêve de louer.
Produit par Sophie Harman et réalisé par Leanne Welham, ce film nous plonge dans le combat quotidien de Pili pour réunir l’argent nécessaire afin de se mettre à son compte. Alerte spoiler : elle va réussir, mais cela aura un prix.
Mme Harman, enseignante à l’Université Queen Mary de Londres, n’aurait jamais imaginé faire un film. Mais elle a compris qu’un film pourrait prendre la forme d’un projet collaboratif qui lui permettrait de mettre en lumière la détresse de nombreuses femmes.
« Dans mes cours, j’utilise souvent des films, car ils ont un impact fort, et j’ai donc voulu faire mon propre film, mais sous la forme d’une histoire réaliste se déroulant en Afrique », explique Mme Harman.
En 2015, elle remporte un prix AXA Insurance Outlook Award pour son travail dans le domaine de la politique de santé mondiale et de la gouvernance en matière de VIH. Ce prix lui permet de récolter l’argent nécessaire, mais il lui faut aussi un réalisateur, et ces derniers se montrent méfiants quant à la production d’un film avec des acteurs novices et un budget serré au milieu de nulle part. Pourtant, dans l’année qui suit, elle fait la connaissance de Leanne Welham, une réalisatrice de courts métrages qui possède des années d’expérience en Afrique.
Le point décisif qui scellera l’accord entre les deux femmes sera l’accès de Mme Harman aux communautés au sein desquelles le film sera tourné. Avec la création en 2006 d’une organisation non gouvernementale baptisée Trans Tanz, Mme Harman trouve l’inspiration dans les histoires de femmes. Trans Tanz propose des transports gratuits aux personnes vivant avec le VIH habitant dans les zones rurales afin qu’elles puissent se rendre à l’hôpital.
Mme Welham et Mme Harman ont adapté leur idée de film aux réalités de la communauté et se sont mises à rassembler des histoires basées sur des expériences réelles.
« Afin de protéger ces femmes, nous avons bien expliqué à tout le monde que notre histoire serait basée sur nos 80 entrevues et sur mes recherches », explique Mme Harman. La communauté a donné son accord et formulé des commentaires sur le scénario.
Ensuite, il leur a fallu trouver les personnages et recruter l’actrice principale, Pili. Lors d’une audition, Mme Welham fait la connaissance de Bello Rashid, venue passer le casting par curiosité en compagnie de sa sœur aînée. La jeune femme surmonte sa timidité ; elle réagit bien aux consignes de la réalisatrice et finit par décrocher le rôle.
En raison de la langue du film (le swahili) et des divers degrés d’alphabétisation, l’équipe britannique du film mélange improvisation et script. Le film se déroule à Miono, un village situé près de la côte tanzanienne.
« Les acteurs sont tous des gens ordinaires, avec un seul acteur professionnel, et 65 % d’entre eux vivent avec le VIH », explique Mme Harman. « Je voulais protéger ces femmes et les rendre aussi anonymes que possible, tout en montrant leur labeur quotidien ».
Les cinq semaines de tournage début 2016 seront éprouvantes pour tout le monde.
« Non seulement notre budget était très restreint, mais nous avons aussi dû composer avec la maladie, des obsèques et une tentative d’extorsion », raconte Mme Harman. En y réfléchissant, elle se dit que tout cela a insufflé un sens élevé de camaraderie.
Ce qui a frappé Mme Welham, c’est le temps inimaginable qu’il faut aux gens pour se déplacer. « La notion de temps et l’impact qu’il a sur la vie des gens ne sauraient être suffisamment mis en avant.
En tant que réalisatrice, je voulais montrer le rythme tranquille de Miono, mais aussi la frustration et l’isolement », explique Mme Welham. Pili met 40 minutes à traverser le champ, avant de refaire le même parcours en sens inverse. Pour se rendre dans un dispensaire où personne du village ne pourra la reconnaître, elle doit prendre le bus. Celui-ci tombe en panne sur le chemin du retour ; à cause de ce contretemps, elle arrive en retard pour récupérer ses enfants et manque de rater sa réunion avec le conseil des femmes qui approuve les micro-prêts. Tout cela dans une chaleur étouffante.
Présenté pour la première fois en septembre 2017, le film a ensuite été diffusé à Genève, en Suisse, dans le cadre des célébrations de la Journée mondiale de lutte contre le sida, le 1er décembre. Il a remporté deux prix au Festival du Film britannique de Dinard et a fait partie de la sélection officielle du Pan African Film and Arts Festival. Le film sera projeté dans les cinémas britanniques au cours du premier semestre 2018, et tous les bénéfices seront reversés à la communauté de Miono.
Depuis le tournage, Mme Rashid a décidé qu’elle voulait arrêter de travailler dans les champs pour faire des études et devenir infirmière.
Mme Welham est particulièrement fière que le film permette au spectateur de se plonger dans un monde qu’il ne connaît pas forcément, et de voir que malgré la pauvreté, les problèmes sont toujours les mêmes. Sa productrice approuve. « L’essentiel à retenir de Pili, c’est qu’il s’agit d’une histoire universelle », conclut Mme Harman. « Même si vous n’êtes pas séropositif au VIH ou que vous ne vivez pas dans un petit village d’Afrique, vous pouvez vous identifier à quelqu’un qui veut rendre meilleure sa vie et celle de ses enfants ».
Multimédias
Region/country
Related

Feature Story
La défense des droits des professionnel(le)s du sexe en Côte d’Ivoire
01 mars 2018
01 mars 2018 01 mars 2018Chantant « akouaba » (bienvenue), un groupe de jeunes femmes se presse autour de Josiane Téty, la Directrice de Bléty, une organisation de Côte d’Ivoire dirigée par des professionnelles du sexe.
Basée à Yopougon, une banlieue d’Abidjan, Mme Téty explique que dans son centre, l’une des premières choses que font les filles entre elles, c’est de se donner des surnoms, par exemple Joie, Espoir ou Chance, car les femmes, selon elle, ont souvent besoin d’un élan de confiance et d’un sentiment de nouveau départ.
« Ici, nous prenons le temps de travailler sur l’estime de soi, pour que les filles croient en elles », explique-t-elle.
À Bléty, la plupart des femmes sont d’actuelles ou d’anciennes professionnelles du sexe qui assurent des services de proximité, allant de la sensibilisation au VIH et à l’éducation en matière de prévention du VIH, en passant par la défense des droits des professionnel(le)s du sexe et la formation professionnelle.
« Notre objectif est de donner aux jeunes femmes des opportunités et des alternatives, de manière à ce qu’elles soient moins vulnérables », explique Mme Téty. Désignant l’une des jeunes femmes présentes, elle déclare que Bonheur s’est lancée dans des cours de comptabilité pour débutants.
Mme Téty et les autres professionnelles du sexe ont créé Bléty en 2007, lorsqu’elles se sont rendu compte qu’elles disposaient de peu d’informations concernant leur santé ou leurs droits et qu’elles détestaient se sentir stigmatisées.
« Passer un test de dépistage du VIH ne veut pas dire que l’on vit avec le VIH, mais c’est comme ça que nous sommes perçues lorsqu’on nous voit sortir d’un dispensaire », explique-t-elle.
Elles se sont engagées à y remédier et se sont implantées au sein de la communauté.
Marie-Louise Sery s’est installée à Abidjan pour travailler après le décès de ses parents. Peu instruite, elle a du mal à trouver du travail, et s’engage alors dans le commerce du sexe. La jeune trentenaire, coiffée de tresses, reconnaît n’avoir eu aucune idée des risques qu’elle prenait.
« Bléty m’a sortie de cette situation », raconte Mme Sery. L’an dernier, elle est devenue l’une des pairs-éducatrices de Bléty.
La plupart du temps, explique-t-elle, les pairs-éducateurs ciblent les coins de rue animés pour parler aux professionnel(le)s du sexe, dont on estime le nombre à plus de 9 000 dans le pays. Outre la distribution de préservatifs, ils proposent également des tests de dépistage du VIH rapides et distribuent des cartes de visite avec les coordonnées des différentes antennes de Bléty, qui peuvent être contactées nuit et jour en cas d’urgence.
« Mon travail implique d’offrir beaucoup de soutien et de main tendue », explique Mme Sery.
Le commerce du sexe n’est pas illégal en Côte d’Ivoire, mais la législation dans ce domaine est floue. Il en résulte des cas d’abus et les professionnel(le)s du sexe se retrouvent vulnérables à la violence. « Nous insistons vraiment auprès de nos amis en leur disant que ce n’est pas parce qu’ils ou elles pratiquent le commerce du sexe que cela signifie que les gens peuvent profiter d’eux », déclare Mme Téty. En cas d’abus, les personnes concernées peuvent appeler un pair-éducateur de Bléty et elles sont accompagnées au commissariat ou à l’hôpital.
Mme Téty raconte que l’une de leurs récentes victoires a été la négociation avec les médecins et les prestataires de soins de santé en vue de la délivrance gratuite de certificats médicaux, sans avoir à débourser 35 dollars de frais. La loi nationale impose la présentation d’un certificat médical pour lancer des poursuites pénales.
En 10 années d’existence, Bléty a fait son affaire des pressions de la police et des habitants en vue de changer leur attitude vis-à-vis du commerce du sexe. Bléty a éduqué les forces de police et les professionnel(le)s du sexe afin de briser le climat de méfiance entre ces deux groupes.
« Nous avons établi de bonnes relations avec la police en uniforme, mais les effectifs changent souvent, et cela peut donc devenir frustrant de devoir tout recommencer sans cesse », explique Mme Téty.
Dans l’ensemble, elle reste optimiste. Le dépistage du VIH et des infections sexuellement transmissibles chez les professionnel(le)s du sexe est en route, les avocats se sont engagés à fournir des conseils juridiques et elle voit son centre poursuivre son développement.
Region/country
Related




Feature Story
La société civile a des solutions que l’ONUSIDA et ses partenaires doivent exploiter
21 février 2018
21 février 2018 21 février 2018Des leaders de la société civile d’Afrique centrale et occidentale ont élaboré une feuille de route dans le but de jouer un rôle plus actif dans l’élargissement de l’accès aux services de prévention et de traitement du VIH dans la région. Ces huit personnalités ont insisté sur le fait que sans leur engagement et leur aide, il sera difficile d’atteindre les personnes concernées et d’accomplir les objectifs de traitement.
« Nous voulons être impliqués davantage, car nous sommes sur le terrain et nous sommes les personnes concernées », a déclaré Daouda Diouf, Directeur d’Enda Dakar et rapporteur d’une réunion de trois jours entre la société civile, l’ONUSIDA et ses partenaires, qui s’est tenue du 19 au 21 février à Genève, en Suisse.
En 2016, la région d’Afrique centrale et occidentale a été confrontée à un nombre élevé de décès dus au sida, disproportionné par rapport à sa part de la population mondiale. Même si la prévalence du VIH reste faible dans la région, peu de personnes vivant avec le VIH y ont accès au traitement.
Les leaders de la société civile ont mis en avant les nombreux problèmes rencontrés. Dans beaucoup de pays francophones, les soins médicaux sont encore trop centralisés, proposés la plupart du temps dans les dispensaires, ce qui limite les possibilités d’intervention des pairs-éducateurs et des agents communautaires. Ils ont également expliqué que la stigmatisation et la discrimination faisaient fuir les gens. Souvent, les politiques de santé nationales ne permettent pas à la société civile de fournir des services élémentaires, comme le dépistage du VIH.
Les frais cachés induits par les services de santé que doivent payer les patients dissuadent également les gens de rechercher de l’aide. En outre, les financements et la volonté politique se sont affaiblis ces dernières années, entraînant une diminution des capacités.
Aliou Sylla, Directeur de Coalition Internationale Sida-Plus, a souligné que la société civile disposait de nombreuses solutions et d’une grande expérience issue de programmes pilotes dont les résultats se sont avérés positifs.
« Parce que nous avons des dispensaires qui ne ressemblent pas à des dispensaires, parce que nous proposons un dépistage du VIH par des pairs et parce que nous offrons des conseils, nous sommes bien plus à même d’atteindre les personnes vulnérables », a-t-il expliqué. « Faites-nous simplement confiance ».
Son collègue approuve sans réserve. Ibrahima Ba, coordonnateur auprès de Bokk Yakaar, une organisation non gouvernementale, et chef du réseau régional des personnes vivant avec le VIH, ajoute que la société civile peut non seulement atteindre les gens, mais elle peut aussi suivre les avancées des plans nationaux et régionaux de lutte contre le VIH. « Comptez sur nous pour être des acteurs de la mise en œuvre, mais aussi des sentinelles, pour que les gouvernements rendent des comptes ».
La feuille de route inclut une rencontre régionale qui doit se tenir prochainement et réunir les représentants de la société civile de 12 pays d’Afrique centrale et occidentale, dans le but d’intégrer leurs avis dans les plans nationaux de lutte contre le VIH. L’ONUSIDA s’exprimera en leur faveur pour qu’ils aient plus d’influence dans les pays.
Clôturant la réunion, le Directeur exécutif adjoint Luiz Loures a déclaré : « Les données et les preuves montrent que nous n’optimisons pas nos efforts dans la riposte au sida dans cette région ». S’adressant aux leaders de la société civile, il a conclu en ces termes : « Nous devons utiliser la société civile comme un moteur ».
Region/country
Related


Feature Story
Promouvoir le dépistage et le traitement du cancer du col de l’utérus chez les femmes vivant avec le VIH
08 février 2018
08 février 2018 08 février 2018Basilisa Ndonde arbore un large sourire en entrant dans son bureau de l’organisation de la société civile Tanzania Health Promotion Support. C’est une journée particulière pour elle : la Journée mondiale de lutte contre le cancer, célébrée chaque année le 4 février. Mme Ndonde est en première ligne dans la riposte au cancer sur le terrain, dans sa fonction de coordination du projet Afya Jali qui vise à promouvoir la sensibilisation et le recours aux services de lutte contre le cancer du sein et du col de l’utérus chez les femmes vivant avec le VIH.
Les femmes vivant avec le VIH sont quatre à cinq fois plus susceptibles de développer un cancer du col de l’utérus que les femmes séronégatives au VIH. Le VIH affaiblit le système immunitaire et réduit la capacité du corps à lutter contre les infections opportunistes, par exemple le papillomavirus humain (HPV), qui est à l’origine de 70 % des cas de cancer du col de l’utérus.
La République Unie de Tanzanie se place au sixième rang mondial en termes d’incidence du cancer du col de l’utérus et compte 1,4 million de personnes vivant avec le VIH.
Mme Ndonde est fière des résultats du projet Afya Jali (ce qui signifie « Prends soin de ta santé » en swahili) obtenus jusqu’ici, quelques mois seulement après son lancement. En collaboration avec le Ministère de la Santé, du Développement communautaire, de l’Égalité des sexes, de l’Enfance et des Personnes âgées et avec le réseau tanzanien des femmes vivant avec le VIH, Mme Ndonde a contribué à l’élaboration de supports documentaires pour les agents de santé et les intervenants communautaires destinés à sensibiliser les femmes sur la nécessité de se faire dépister pour le cancer du col de l’utérus et le cancer du sein. « Pour la première fois dans le pays, nous disposons de directives complètes pour les agents de santé concernant la prévention, le dépistage et le traitement des cancers qui touchent les organes reproducteurs », explique-t-elle.
Mme Ndonde a obtenu l’appui des autorités administratives locales des quatre régions dans lesquelles le projet a été mis en œuvre. Elle a également organisé un atelier de formation pour les formateurs dans ces mêmes régions à l’attention de 30 femmes vivant avec le VIH, qui sensibilisent d’autres femmes sur le cancer du col de l’utérus et le cancer du sein et encouragent la divulgation de la maladie afin de faire reculer la stigmatisation. « Toutes les participantes ont dû s’entraîner et montrer, devant les personnes présentes à l’atelier, qu’elles savaient comment faire passer les messages dans leurs communautés respectives », raconte Mme Ndonde.
Le projet est financé par l’ONUSIDA dans le cadre de l’initiative Ruban rose Ruban rouge (RRRR), un partenariat mondial qui réunit des gouvernements, des organisations non gouvernementales et multilatérales, des fondations et des grandes entreprises dans un objectif commun de réduction des décès dus au cancer du col de l’utérus et du sein dans les pays à revenu faible et intermédiaire. En République Unie de Tanzanie, la mission de RRRR est de s’appuyer sur les programmes sanitaires existants pour intégrer les services de prévention, de dépistage et de traitement du cancer du col de l’utérus et du cancer du sein et pour élargir l’accès à la vaccination contre le HPV.
L’ONUSIDA travaille aux côtés des pays pour respecter les engagements pris lors de la Réunion de haut niveau des Nations Unies de 2016 sur la fin du sida, visant à sortir le sida de l’isolement au moyen de systèmes axés sur l’individu, afin d’améliorer la couverture santé universelle, y compris le traitement de la tuberculose, du cancer du col de l’utérus et des hépatites B et C.
Region/country
Related




Feature Story
Promouvoir le leadership des femmes dans les sciences et la santé
11 février 2018
11 février 2018 11 février 2018Le 11 février marque la Journée internationale des femmes et des filles de science. L’an dernier, dans le cadre de la campagne « Droit à la santé » de l’ONUSIDA, l’Ambassadrice spéciale de l’ONUSIDA pour les adolescentes et le VIH et fervente militante de la présence des jeunes femmes dans les sciences, le Professeur Quarraisha Abdool Karim, a évoqué dans un dialogue avec sa fille le travail de sa vie et l’importance de l’implication des femmes dans la science et la santé.
Dans une conversation entre mère et fille, Quarraisha Abdool Karim (Q), Directrice scientifique associée du Centre du programme de recherche sur le sida en Afrique du Sud, et Aisha Abdool Karim (A), étudiante à l’École supérieure de Journalisme de l’Université de Columbia, parlent de la santé et de ses implications pour les jeunes femmes en Afrique du Sud.
A : En ce qui me concerne, j’ai grandi dans un environnement scientifique et la science a fait partie de mon quotidien, mais toi, comment en es-tu venue à t’intéresser à la science et à la santé ?
Q : Je crois que toute ma vie, j’ai considéré que la science et ses applications étaient des moyens d’améliorer la vie des gens. J’ai donc voulu devenir une scientifique et faire quelque chose qui aiderait les autres.
A : La science reste un domaine très masculin, comme beaucoup d’autres ; j’ai donc l’impression que tu as apporté un point de vue intéressant dans tes recherches. Dans quelle mesure penses-tu que ton expérience de jeune femme a pu influencer tes recherches ?
Q : Alors que j’étais encore relativement jeune, à 28 ans, j’ai réalisé ma toute première étude avec la première enquête en population menée en Afrique du Sud. Les données étaient très claires : les jeunes femmes présentaient un taux d’infection à VIH quatre fois plus élevé que les jeunes hommes et les femmes contractaient le VIH environ cinq à sept ans plus tôt que les hommes. Ces résultats m’ont beaucoup intriguée et j’ai passé la vingtaine d’années qui ont suivi à tenter de mieux comprendre, réellement, pourquoi les jeunes femmes étaient infectées et pas les jeunes hommes, et à quoi correspondaient certains des facteurs qui incitaient les jeunes femmes à devenir sexuellement actives.
A : Je trouve intéressant que tu aies choisi de te concentrer sur les raisons qui expliquent pourquoi les femmes deviennent sexuellement actives, car j’ai le sentiment que l’enseignement secondaire que j’ai suivi était très focalisé sur l’abstinence. Certes, nous avons reçu une éducation sexuelle sous une certaine version, mais elle n’était pas très instructive ni utile. Penses-tu qu’il y a eu des changements dans l’éducation sur les sujets tels que la santé reproductive depuis que tu as quitté l’école ?
Q : Tu sais, j’ai grandi à une époque beaucoup plus conservatrice, où il était très mal vu d’avoir des relations durant les années du secondaire et de devenir sexuellement actif. Mais je pense que les enseignants sont toujours encore très mal à l’aise quand il s’agit de parler de la santé et des choix sexuels, ainsi que des questions de santé reproductive en général en Afrique du Sud, voire, je dirais même plus, dans toute l’Afrique.
A : Je suis d’accord avec toi, je crois qu’il existe toujours cette hésitation à parler ouvertement de sexe à l’école. Alors que le sujet du sexe n’avait pas vraiment de limites à la maison, j’ai sans aucun doute suscité de la gêne chez certains de mes amis quand j’ai abordé le sujet dans nos conversations.
Q : Tu me rappelles une autre chose que j’ai apprise en travaillant avec les jeunes, c’est qu’ils n’aiment pas obtenir des informations des adultes et des personnes qui leur sont familières. Ils sont plus à l’aise quand ces informations viennent de leurs pairs. Cela montre à quel point la connaissance est importante, mais aussi la manière dont elle est considérée au sein de la communauté et comment la société dans laquelle on vit influe sur notre capacité à agir.
A : Tu parles justement du rôle de la communauté, qui va au-delà de l’éducation et des politiques. De nos jours, je crois que les gens sont de plus en plus conscients de l’intersectionnalité des thématiques, la santé ne fait pas exception. Les jeunes femmes ont été au cœur de tes recherches. Quels sont les autres facteurs qui touchent leur vie ?
Q : J’ai appris que la vulnérabilité des jeunes femmes est très largement liée aux différences de pouvoir entre les sexes au sein de la société, et que ces disparités sont très importantes dans la perpétuation de la vulnérabilité des jeunes femmes sur le plan social, économique et politique. Et cela va bien au-delà du VIH.
A : La réalité de la dynamique de pouvoir entre les sexes est un aspect que j’ai commencé à comprendre seulement quand je suis arrivée à l’université, car cela n’a jamais été une vraie question pour moi dans mon lycée de filles. Penses-tu que l’évolution vers la démocratie du paysage politique sud-africain a eu un impact sur cette dynamique des genres ?
Q : Malgré les changements politiques, la traduction ne s’est pas faite au niveau communautaire. Les jeunes femmes d’aujourd’hui doivent comprendre qu’elles vivent désormais dans un monde différent en Afrique du Sud, avec beaucoup plus d’opportunités.
A : Ce qui nous ramène à l’idée de dynamique des genres et de communauté. J’ai l’impression qu’il existe une idée répandue selon laquelle les filles sont moins indépendantes et qu’il est plus difficile, en particulier pour les jeunes femmes, de sentir qu’elles peuvent prendre leurs propres décisions quand il s’agit de leur corps.
Q : En effet, je crois qu’il existe une telle tension, et j’estime que tu es mieux placée que moi pour parler des femmes de ton âge ou plus jeunes. Autrefois, il y avait cette croyance selon laquelle les femmes devaient être ignorantes à propos de leur corps et que leur partenaire serait être capable de tout leur dire. Au contraire, je pense que pour devenir autonome, il faut en réalité connaître son propre corps. Il est extrêmement important que les jeunes femmes aient accès aux informations sur la santé. Nous devons encourager une attitude avec laquelle les jeunes femmes n’auraient plus honte de connaître leur corps. Penses-tu qu’il y ait un moyen d’agir en ce sens ?
Q : Avoir un environnement social qui soit propice à ce genre de normes est absolument impératif, car les jeunes femmes elles-mêmes disposent de peu de moyens d’action. Mais pour créer ce climat et ce contexte, il va falloir que les hommes assument davantage leurs responsabilités, que les garçons soient plus responsables d’eux-mêmes et de leur comportement.
A : L’éducation est un élément essentiel de la création d’un tel environnement et du traitement de la question de la santé. En voyant l’impact que tes recherches ont eu sur la perception du grand public, j’ai compris le pouvoir que l’information pouvait avoir et c’est en partie pour cette raison que j’ai décidé de devenir journaliste. C’est un aspect particulièrement important de notre époque, si nous devons combattre la propagation des fausses informations et détruire les mythes qui existent dans la santé et au-delà.






Feature Story
Le pouvoir de la télévision pour éduquer et divertir des millions de personnes en Afrique de l’Ouest
07 février 2018
07 février 2018 07 février 2018Un bébé abandonné aux portes d’un dispensaire, un petit ami violent, des problèmes de cœur et des médicaments contrefaits : autant d’intrigues traitées dans la série télévisée intitulée C’est la vie, qui se déroule et est produite en Afrique. Tournée au Sénégal, la sitcom a lieu dans le dispensaire fictif de Ratanga, où des sages-femmes interagissent avec les patients et travaillent sur différents cas. Leur histoire personnelle et la politique administrative sont également abordées, ajoutant des rebondissements, mais l’objectif général est de sensibiliser le public sur les questions sanitaires en passant par le divertissement.
Cette série, première du genre en Afrique de l’Ouest, a été inspirée par le pionnier mexicain Miguel Sabido, qui s’est servi des telenovelas pour promouvoir l’alphabétisation et la planification familiale, ainsi que par la série télévisée éducative Shuga. La série anglophone de MTV Shuga en est aujourd’hui à sa sixième saison et a rencontré tellement de succès que son lieu de tournage a quitté le Kenya pour aller filmer de nouvelles histoires au Nigeria et en Afrique du Sud.
L’organisation non gouvernementale Réseau africain d’éducation pour la santé (RAES), soutenue par plusieurs agences des Nations Unies et par le gouvernement français, a créé Keewu, une société de production, pour diffuser la série.
Alexandre Rideau, membre fondateur de RAES et aujourd’hui producteur de Keewu, explique que c’est la possibilité d’atteindre des millions de personnes par la télévision qui l’a motivé à lancer C’est la vie. « Les statistiques parlent d’elles-mêmes en Afrique de l’Ouest », indique M. Rideau. « Les jeunes ne connaissent rien à la sexualité, la prévention du VIH et des choses simples comme les menstruations ». Il ajoute que les nombreuses questions qu’ils reçoivent illustrent de manière flagrante que les gens ont vraiment du mal à accéder à l’information.
La série met en avant un grand nombre de réalités de la région, du taux élevé de mortalité maternelle à celui des infections à VIH. En Afrique occidentale et centrale, quatre enfants vivant avec le VIH sur cinq ne reçoivent toujours pas de traitement antirétroviral vital et les décès dus au sida chez les adolescents âgés de 15 à 19 ans sont en hausse dans la région, selon un rapport ONUSIDA/Fonds des Nations Unies pour l’Enfance intitulé Step up the pace.
Lors de la deuxième saison, C’est la vie est devenu encore plus populaire, tant et si bien que les acteurs sont maintenant reconnus dans la rue. M. Rideau raconte qu’un receveur d’un poste de péage de Dakar a refusé de laisser passer au volant de sa voiture une actrice incarnant un personnage désagréable dans la série.
Diffusée dans les pays d’Afrique occidentale et centrale sur les chaînes A+ et TV5 Monde Afrique, ainsi que sur des chaînes locales, la série réunit environ 100 millions de téléspectateurs. M. Rideau explique que la série ne va pas forcément modifier le comportement des gens, mais elle a le mérite de susciter un dialogue essentiel sur les questions de santé. Au Sénégal et au Togo, des débats ouverts sur les thématiques abordées dans la série sont organisés dans les parcs des villes après chaque passage à l’antenne.
M. Rideau indique vouloir étendre la diffusion de la série suivi de débats dans six autres pays en 2018. Une série produite pour la radio en langue haoussa est actuellement en cours pour le Niger.
TEASER - C’est la vie ! - Saison 1 à voir Keewu Production sur Vimeo.
Region/country
Related




Feature Story
L’ONUSIDA pleure le décès de Jimmie Earl Perry
12 janvier 2018
12 janvier 2018 12 janvier 2018Jimmie Earl Perry, premier Ambassadeur itinérant national de l’ONUSIDA pour l’Afrique du Sud, nous a quittés.
Chanteur et acteur chevronné dans des productions théâtrales aux quatre coins du monde, M. Perry était connu pour son travail basé sur les arts créatifs pour instruire le public. Au Centre africain de gestion du VIH/sida de l’Université de Stellenbosch, en Afrique du Sud, il a mis en scène des pièces de théâtre éducatives jouées devant plus de 3 millions de personnes dans les communautés et sur les lieux de travail au niveau national et international.
Lors de sa nomination en tant qu’Ambassadeur itinérant national de l’ONUSIDA, M. Perry avait déclaré : « Si nous voulons inverser la tendance de cette épidémie, les Sud-Africains doivent vraiment comprendre ce qu’est le virus, comment il se propage, que ce n’est pas une sentence de mort grâce au traitement médical, et qu’il faut en finir avec la peur et la stigmatisation pour ceux qui vivent avec le VIH ».
Selon Michel Sidibé, Directeur exécutif de l’ONUSIDA, la nomination de M. Perry en 2009 correspondait à un moment critique pour la riposte au sida en Afrique du Sud, avec des changements politiques de grande ampleur annoncés par le Président sud-africain, Jacob Zuma, lors de la Journée mondiale de lutte contre le sida cette année-là. « J’avais décidé de nommer Jimmie Earl Perry en tant qu’Ambassadeur itinérant national en raison de sa capacité d’inspiration et de sa volonté d’entraîner et d’autonomiser les autres. Il croyait fermement au potentiel de chacun d’améliorer sa situation et il encourageait le meilleur dans tous ceux qu’il rencontrait ».
M. Sidibé a déclaré que le décès de M. Perry était une grande perte pour la communauté de la lutte contre le sida. « Jimmie Earl Perry a encouragé et inspiré mon action de sensibilisation mondiale et mes efforts pour en finir avec l’épidémie de sida comme menace de santé publique d’ici à 2030. Notre association avec M. Perry a été extrêmement positive pour l’ONUSIDA, et nous lui sommes reconnaissants pour ses services et son dévouement. Je me sens honoré de l’avoir compté parmi mes proches en tant qu’ami et frère », a-t-il ajouté.